Au cours de son discours sur l'état de la nation, le Premier ministre a esquissé les grandes lignes de la réforme des retraites prévue au Luxembourg. Voici ce qu'il faut en retenir.

Travailler plus longtemps. De toutes les possibilités mises sur la table depuis le début du débat, le Luxembourg a donc choisi d'allonger les carrières.

Lors de son discours mardi après-midi à la Chambre des députés, Luc Frieden a dévoilé les "points principaux" d'une réforme qui oppose fermement syndicats et patrons. Et qui continuera certainement à le faire, le Premier ministre ayant conforté "toutes les inquiétudes exprimées par le front syndical OGBL/LCGB", ont fait savoir les syndicats dans une réaction commune.

Au Luxembourg, il faudra travailler plus longtemps

N'y allons pas par quatre chemins, cette décision était attendue. C'était même la piste privilégiée pour une réforme. Le gouvernement a confirmé sa réticence d'augmenter les cotisations. Pour financer le système des retraites, dont le déséquilibre est annoncé pour l'année 2026, il faudra travailler plus longtemps.

Oubliez donc les 40 années de cotisations pour boucler une carrière complète au Luxembourg, cette durée va augmenter. "La carrière nécessaire pour ouvrir le droit à une pension sera allongée progressivement de trois mois par an sur plusieurs années" a fait savoir Luc Frieden.

De combien de temps ? Le Premier ministre s'est bien gardé de le dire. Mais il semble difficile d'imaginer une carrière inférieure à 41 ans. Au mieux. À partir de quand cet allongement sera mis en place ? Là encore, pas de réponse, il faudra attendre le projet de loi du gouvernement pour le découvrir. Il sera présenté avant l'été. Qui sera concerné ? A priori, tous les travailleurs, à l'exception de ceux "proches" de la retraite, sans que le chef du gouvernement ne se risque à donner un âge ou une durée de cotisation pour illustrer cette limite.

Le Premier ministre a également refusé d'infliger des changements aux personnes déjà à la retraite. Une question de "confiance" estime-t-il. Le modèle social n'est donc pas chamboulé : les travailleurs feront l'effort pour leurs ainés.

En revanche, comme attendu, il n'y aura pas de changement sur l'âge légal de 65 ans. "Grâce à cette modification, nous ferions en sorte que l'âge effectif de départ se rapprochera de l'âge légal de 65 ans." Car le Luxembourg a effectivement l'image d'un petit paradis social dans ce domaine : en moyenne, les Luxembourgeois partent à la retraite autour de 61 ans. Bien avant l'âge légal donc. Et ils cotisent bien moins longtemps que leurs voisins allemands, belges et français.

Un acquis toutefois : les années complémentaires ne seront pas modifiées. Les travailleurs pourront donc toujours faire jouer leurs années d'études et les "baby years" lors de leur départ en pension. Luc Frieden a également évoqué un système permettant une retraite partielle et progressive, pour un départ en transition en fin de carrière.

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La pension minimale ne sera pas revalorisée

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Demande principale des syndicats pour combattre la pauvreté, la revalorisation de la pension minimum n'a pas été évoquée par le Premier ministre. Qui a préféré annoncer une "aide sociale ciblée" pour ceux qui "risquent de basculer dans la précarité" à la retraite.

Ces derniers pourraient d'ailleurs subir les effets de la réforme de 2012, qui compte plusieurs garde-fous en cas de dérapage budgétaire. Dont une pension seulement partiellement adaptée aux salaires réels, un mécanisme qui est appliqué tous les deux ans.

Le Premier ministre a également évoqué la possible utilisation d'une partie de la taxe CO2 pour contribuer au budget du système des retraites. Cette dernière servant normalement à des mesures sociales.

Un coup de pouce pour les travailleurs les mieux payés

Le Luxembourg devrait donc donner une place plus grande à son 3e pilier. Puisque le premier représente la retraite obligatoire (celle de l'État, pour laquelle tout le monde cotise), et le deuxième reposant sur les plans de pensions privés des employeurs (facultatifs), le 3e pilier, à savoir la prévoyance-vieillesse personnelle, sera rendu plus attractif.

Il permet aujourd'hui de bénéficier d'un avantage fiscal pouvant atteindre 3.200€ par an (6.400€ pour un couple) en cas de contribution à une prévoyance privée. "Pour celles et ceux qui ont la possibilité d'épargner, nous rendrons les retraites privées du troisième pilier plus attractives, afin de les encourager à se constituer une réserve pour les périodes difficiles."

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La réserve sera protégée... mais pas utilisée

Enfin, la réserve des pensions, véritable matelas de sécurité du système, aujourd'hui rembourré de 27 milliards d'euros, soit plus de quatre années de dépenses, sera "maintenue". Et ce, afin qu'elle "continue à générer autant de revenus financiers que possible". Car cet argent ne dort pas, il travaille sur les marchés. L'utiliser en cas de besoin urgent, c'est donc se priver de revenus supplémentaires. Et ça, le Luxembourg n'y tient pas.

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