
Après une année 2023 désastreuse, les acteurs du marché de l'immobilier espèrent une reprise dès que possible. Va-t-elle se matérialiser au cours de l'année 2024? Nous avons posé la question à trois experts.
Après plusieurs années d'augmentation "anormale" des prix, le marché de l'immobilier luxembourgeois a fini par atteindre son pic il y a maintenant un peu plus d'un an. Depuis, les prix ont dégringolé aux quatre coins du pays. De quoi plonger tout un secteur dans la crise.
Une crise "très différente de celle qu'on avait connu en 2008-2009", souligne Julien Licheron, chercheur à l'Observatoire de l'Habitat. En effet, le Luxembourg avait déjà traversé des épisodes de baisse des prix mais le marché n'avait jamais connu une chute de l'activité aussi importante et "prolongée".
Un problème de taille pour un pays qui n'a jamais réussi à construire assez pour satisfaire la demande en logements liée à sa croissance économique. Une situation qui a empiré au cours de l'année 2023 puisque les acheteurs se sont désintéressés du neuf. En clair: très peu de nouveaux projets ont été pu être lancés.
Une crise que l'on doit bien évidemment aux hausses successives des taux d'intérêt ces 18 derniers mois. La bonne nouvelle, c'est que les choses pourraient s'améliorer en 2024. Après plusieurs semaines de stabilisation, les taux ont commencé à baisser au mois de décembre dernier. Et cette tendance pourrait se confirmer dans les mois à venir.
"La baisse des taux couplée à la baisse des prix notable dans l'existant resolvabilise certains dossiers" explique Pierre Clément, directeur de Nexvia. Il est d'avis que l'activité devrait reprendre si les taux longs restent aux niveaux actuels (+- 3,65%). Néanmoins, il précise que c'est l'existant qui profitera en premier lieu de la reprise.
Pourquoi? Parce que la correction de prix observée sur le neuf n'a pas été assez importante pour resolvabiliser les ménages qui s'y intéressaient. En effet, alors que les prix ont chuté de près de 20% sur l'ancien, les prix n'ont baissé "que" de 7,7% sur les appartements en VEFA.
Cela n'empêche pas le PDG d'atHome Group, Soufiane Saadi, de se montrer optimiste. "Tous les ingrédients sont là pour une reprise (...). Il y a des éléments factuels qui me permettent d'être optimiste", affirme-t-il. Il fait référence à la baisse des taux, la baisse des prix et aux mesures annoncées par le nouveau gouvernement.
Rappelons que le Premier ministre, Luc Frieden, a annoncé une série de mesures "limitées dans le temps" qui doivent venir stimuler l'investissement dans la pierre. Une "offensive sur le logement" qui reposera principalement sur trois axes: amortissement accéléré, baisse de l'imposition sur les plus-values et augmentation du Bellegen Akt.
De quoi donner un nouveau souffle au marché du neuf. Le problème, c'est que ces mesures ne seront pas votées tout de suite. Aux dernières nouvelles, cela devrait se faire au mois d'avril. C'est pourquoi Pierre Clément pense que "le neuf ne reprendra pas avant le troisième trimestre 2024". "Et il faudra une baisse des prix", ajoute-t-il.
Pour sa part, Julien Licheron est convaincu que les mesures prévues par le nouveau gouvernement "peuvent être efficaces à court terme". Cependant, à long terme, le chercheur est d'avis qu'il faudra opter pour une autre stratégie. Dans ce contexte, il rappelle que cette méthode n'a jamais vraiment fait ses preuves en termes d'augmentation de la production de logements.
"Le problème reste le foncier, (...) il faut mobiliser des terrains à tout prix", martèle-t-il avant d'ajouter "l'ancien ça tourne mais c'est bien ça le problème, ça tourne et il faut construire de nouveaux logements". Pour Pierre Clément, c'est la compétitivité du Luxembourg qui est en jeu. "Le problème est là, (...) on risque de devenir un pays de vieux", déplore-t-il. C'est pourquoi une reprise dans le neuf est d'autant plus importante pour l'avenir du Luxembourg.
Et à ceux qui pensent qu'une reprise impliquerait forcément une nouvelle flambée des prix, le chercheur de l'Observatoire de l'Habitat répond que "les capacités d'achat ne peuvent pas monter jusqu'au ciel". On l'a d'ailleurs vu avec la hausse des taux en 2023.
"On est arrivé au maximum de la capacité d'achat des ménages. Ils n'ont pas été capables d'absorber la hausse de taux et ils ne seront donc pas capables d'absorber une hausse de prix", explique-t-il. Un point de vue partagé par Pierre Clément et Soufiane Saadi qui abordent la nouvelle année avec beaucoup plus d'optimisme qu'il y a douze mois.
Les détails de ces échanges sont à consulter dans le nouvel épisode de "La Bulle Immo" ci-dessous.
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