
À la Chambre des députés, les avis sont très partagés sur les raisons du manque de personnel qui frappe les services de la justice au Luxembourg.
Après que la bourgmestre de la Ville de Luxembourg, Lydie Polfer, ait critiqué mardi sur RTL le fait que la justice ne donne pas suite à de nombreuses infractions, le Procureur général d’Etat, Martine Solovieff, a confirmé mercredi lors de la réception de Nouvel An de ses services, une grave pénurie de personnel dans la magistrature et à la police judiciaire.
Le constat du manque de personnel est tout sauf nouveau, selon la précédente ministre de la Justice verte Sam Tanson. Mais même si le portefeuille ministériel a été aux mains de son parti de 2013 à 2023, la responsabilité du manque de personnel incombe aux autres, selon la présidente du groupe parlementaire des Verts:
"Je ne veux pas maintenant faire un travail de mémoire pour dire d'où vient exactement le problème, mais en tout cas, je ne laisserai pas dire que j'ai bloqué pour créer plus de postes. Au contraire, je me suis toujours battue pour cela, et je l'ai parfois fait contre les partenaires de coalition, pour imposer qu'on recrute davantage au niveau de la justice."
Laurent Mosar choqué par les propos de Sam Tanson
Le député CSV et président de la Commission de la Justice, Laurent Mosar, ne trouve pas qu'il se soit passé grand-chose ces dernières années au niveau de la justice et il commente ainsi la déclaration de Sam Tanson:
"Et maintenant, j'entends, parce que j'étais par hasard à côté, que Madame Tanson a dit qu'elle n'avait pas réussi, qu'elle avait en partie échoué à s'imposer aux partenaires de coalition. Je dois dire que c'est quand même extrêmement grave. Cela signifie que pendant des années, personne n'a été embauché, parce qu'il n'y avait pas d'accord dans les gouvernements précédents sur le fait que ce devait être fait."
À la différence de l'actuelle ministre de la Justice, Elisabeth Margue, qui a apporté à la Chambre une loi pour des recrutements supplémentaires.
Les Piraten souhaitent de meilleures conditions de travail
Pour le député pirate Sven Clement, l'amélioration des conditions de travail est la clé de la lutte contre le manque de personnel: "Bien sûr, nous devons travailler sur le recrutement, nous devons travailler sur la formation et nous devons veiller à ce que les personnes que nous formons restent là et ne se tournent pas tôt ou tard vers une économie privée mieux rémunérée, où ils devront peut-être moins travailler pour le même salaire ou un salaire supérieur. Tel est le grand défi: créer une fonction publique attractive aussi bien pour la magistrature que pour la police."
Le LSAP comprend que la justice doive faire des choix
La justice indique ne pas pouvoir suivre chaque petite infraction, mais devoir se concentrer sur de graves affaires. Pour le député LSAP Dan Biancalana, il est tout à fait compréhensible que des violations de l'interdiction de la mendicité, par exemple, ne figurent pas tout en haut de la liste des priorités, par exemple.
"Ce sont effectivement des éléments qui peuvent être perçus comme dérangeants dans un paysage urbain, mais ce ne sont pas des choses qui suscitent en soi une insécurité ou qui font de nous une victime potentielle. C'est pourquoi il est important qu'en plus de la police, le pouvoir judiciaire mette également l'accent sur les poursuites là où la sécurité et les citoyennes et les citoyens sont réellement en danger."
Dan Biancalana souligne toutefois aussi que ces dernières années, beaucoup de choses ont été réalisées pour embaucher du personnel, par exemple avec la création de la carrière de référendaire de justice. Les critères de recrutement pour les nouveaux magistrats ont également été adaptés.
L'ADR favorable à une juridiction spéciale pour les questions d'asile et d'immigration
Le député ADR Dan Hardy fait quant à lui référence au président du tribunal administratif, Francis Delaporte, qui a déclaré devant la Commission de la Justice que la sonnette d'alarme résonnait parce que les délais devenaient de plus en plus longs.
"C'est pourquoi nous sommes allés proposer, comme le demandait Monsieur Delaporte, une juridiction spéciale pour les questions d'asile et d'immigration. Il a en effet déclaré à la Commission que si nous l'avions, nous aurions à nouveau plus de marge pour d'autres affaires. Mais bon, nous avons présenté une motion en tant qu'ADR, qui n'a malheureusement pas été approuvée."
Même si les initiatives du gouvernement sont bonnes, les partis d'opposition souhaitent des mesures plus concrètes.
À lire également:
Manque de personnel et de locaux: La justice ne peut plus assurer un suivi conséquent des affaires