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Sylvain Hoffmann, le directeur de la Chambre des salariés, était jeudi l'invité de la rédaction de RTL. Il a été question de l'adaptation du barème d'imposition aux tranches indiciaires.
La Chambre des salariés poursuit son combat contre le fonctionnement du barème de l'impôt. "Toute non-adaptation est, en soi, une augmentation d'impôt déguisée", a tancé le directeur de la Chambre des salariés, Sylvain Hoffmann, ce matin sur RTL. Une référence à la fameuse "progression à froid" que nous évoquions récemment et dont la modification peut vous permettre de payer moins d'impôts.
L'ajustement du barème à 2,5 tranches indiciaires en 2024, comme l'ont décidé le gouvernement et les partenaires sociaux lors de la réunion tripartite début mars, est à saluer, selon Sylvain Hoffmann. Un pas en avant mais une démarche incomplète car la Chambre rappelle qu'il faudrait rattraper huit tranches pour compenser les pertes des dernières années.
Cet effort financier, le gouvernement n'y est pas prêt. La ministre des Finances, Yuriko Backes, l'a bien fait comprendre ces derniers mois: ajuster le barème à huit tranches indiciaires, cela signifierait plus d'un milliard d'euros de recettes en moins pour l'État. Un choix qui serait "irresponsable" en temps de crise, selon la ministre.
Ce à quoi le directeur de la Chambres des salariés répond: "C'est bien sûr un fait que si vous faites traîner en longueur, cela devient plus cher. C'est pourquoi, comme je l'ai dit, vous devez le faire régulièrement et cela ne coûtera pas si cher d'un coup."
Le crédit d'impôt de 2023 est insuffisant
Sylvain Hoffmann critique également le crédit d'impôt bientôt mis en place et rétroactif au 1er janvier 2023. Celui-ci correspondra à une adaptation de deux tranches indiciaires.
Dans son avis, la Chambre des salariés a indiqué qu'avec le crédit d'impôt, les ménages n'obtiendront pas l'équivalent d'un ajustement du barème à deux tranches. Sylvain Hoffmann a expliqué que le crédit d'impôt serait mal calibré, parce qu'il serait basé sur la classe d'imposition 1. Même dans cette classe, il "ne marcherait pas vraiment". Sans oublier les contribuables de la classe d'imposition 1A (personnes divorcées ou veuves et veufs) qui s'en tireront moins bien que si le barème était ajusté à deux tranches indiciaires. Il estime encore que l'impôt de solidarité aurait été oublié de l'équation, de sorte qu'après les tranches indiciaires, les contribuables devraient payer davantage.
"Soulager rapidement et simplement" les contribuables, comme le voulait le gouvernement, "n'est probablement pas très simple", a admis Sylvain Hoffmann. Malgré tout, selon lui, on aurait pu faire un "fine-tuning", un réglage précis, en d'autres mots, peaufiner. Ou bien décider d'une adaptation rétroactive du barème plutôt que le crédit d'impôt.

Sylvain Hoffmann, directeur de la Chambre des salariés.
Un ajustement du barème inéquitable?
Sylvain Hoffmann a reconnu que contrairement au crédit d'impôt énergie, qui avait été décidé lors de la première réunion tripartite l'an dernier et s'est terminé en avril de cette année, un simple ajustement du barème soulagerait surtout davantage les revenus élevés. Sylvain Hoffmann a toutefois souligné que les revenus moyens en profiteraient le plus, car la progressivité (l'augmentation des taux de tranche en tranche dans le barème) est la plus forte entre 11.000 et 50.000 euros bruts par an.
En outre, la Chambre des salariés continuera à réclamer un système fiscal plus juste. "Cela commence effectivement par le barème, où il faut élargir les tranches du bas et les tirer vers le haut, pour qu'il y ait là une décharge et ajouter des taux en haut", selon le directeur de la CSL. Mais cela ne suffirait pas: les plus-values seraient moins imposées que les salaires et "ne parlons pas du patrimoine, qui n'est pratiquement pas imposé au Luxembourg."
Le gouvernement cherche-t-il à gagner du temps ?
Près de deux mois après la tripartite, le crédit d'impôt n'a pas encore été à l'ordre du jour de la Commission spéciale de la Chambre. Et l'hebdomadaire d'Lëtzebuerger Land se demande si le gouvernement ne cherchait pas en toute conscience à gagner du temps. Car les législatives ont lieu en octobre et plus le crédit d'impôt arrivera tard, plus les particuliers recevront d'argent lors de son application. À cette question, Sylvain Hoffmann a simplement répondu qu'il serait "bon de voter cela dès que possible". Beaucoup de ménages auraient des problèmes et ils seraient nombreux à avoir déjà contacté les syndicats.
Interrogé à ce propos, le député libéral et président de la Commission spéciale, Gilles Baum, a déclaré: "Je n'y vois absolument aucun calcul ni aucune mauvaise intention." Il a expliqué que la Commission a déjà reçu des explications du ministère des Finances et de l'Administration des contributions directes et qu'elle attend à présent l'avis du Conseil d'Etat. Selon lui, il pourrait arriver vendredi, ou sinon après le congé de Pentecôte. Sans l'avis, il ne pourrait pas poursuivre son travail, assure Gilles Baum.