Il file à travers la capitale et foncera bientôt jusqu'à Esch. L'histoire du tram de Luxembourg est liée à celle de la sacro-sainte voiture. Remis sur les rails en 2017, il est promis à un bel avenir.

À l'heure où le moteur thermique doit céder sa place à la batterie électrique dans les voitures, le tram a plusieurs longueurs d'avance dans les rues de la capitale. Il est déjà 100% électrique. Il permet de traverser Luxembourg-Ville plus vite. Il est gratuit. Il va très bientôt permettre aux usagers d'aller d'un trait, de la Cloche d'Or jusqu'au Findel. Et les conduira même jusqu'à Esch-sur-Alzette, deuxième ville du pays, dans un peu plus de dix ans.

Le tram à Luxembourg c'est une longue success-story. Et elle ne date pas du 10 décembre 2017, jour où le grand-duc Henri et des politiciens de tous bords, le ministre écolo François Bausch en tête, l'ont inauguré sous la neige après plus de 20 ans de discussions animées sur le moyen de transport le plus adapté à une capitale de taille humaine. Ce jour-là était celui d'une résurrection. Car l'histoire du tramway a démarré il y a presque 150 ans!

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Imaginez que le 21 février 1875 sont apparus les premiers tramways dans le paysage urbain. Le premier tronçon de 2,6 km allait de la Gare à l'Athenée. Mais les trams de la Société Anonyme des Tramways Luxembourgeois (SATL), société privée dirigée par le Luxembourgeois Charles de Féral, "étaient tractés par des chevaux qui tiraient quatre tonnes sur les pavés durant huit heures, mais avec des interruptions. On changeait évidemment les chevaux pour les ménager car ce sont eux qui assuraient l'exploitation", explique Romain Rech, responsable du Musée du tramways dans le quartier Hollerich. En 1889, le tram à cheval transportait 550 personnes chaque jour.

Tout était en beau bois. Jusqu'à ce que la révolution électrique en éclaire l'intérieur, mais n'actionne pas l'essuie-glace du pare-brise, longtemps resté manuel. En 1908, les chevaux sont rentrés dans leurs écuries et le tram est devenu électrique. "À la fin des années 1930, le réseau comptait 38 km de voies. Les Tramways électriques de la Ville Luxembourg" (TVL) -la Ville avait racheté le réseau en 1907- possédaient un parc de 34 motrices et 22 remorques. Dans leurs ateliers du Limpertsberg, les TVL construisaient leurs propres motrices plus grandes et plus modernes", glisse Romain Rech. À L’époque, le tram transportait 4.500 personnes par jour, contre 100.000 quotidiennement aujourd’hui.

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Le tram a connu un vrai succès populaire car "le tram de Luxembourg était du dernier cri!". Son prix inaccessible pour le commun des mortels au départ, s'est démocratisé "de sorte qu'autour de 1920-1930, tout le monde pouvait circuler en tram", raconte Romain Rech qui a d'ailleurs contribué à l'ouvrage de référence sur "le tram de Luxembourg Ville", publié en deux tomes par les Amis du Musée du tram.

Mais dans les rues de la capitale s'est rapidement développé un autre moyen de transport, plus individuel. "La Ville voulait se donner une image de ville moderne et Luxembourg a éliminé son tram pour laisser la place à la voiture, c'était nouveau!", raconte Romain Rech. Si bien que le samedi 5 septembre 1964 a circulé le dernier tram en ville.

Pour renaître 53 ans plus tard sous la houlette de Luxtram, la société anonyme à capitaux publics qui conçoit et exploite le réseau que nous connaissons aujourd'hui. "Nous ne transportions personne il y a six ans. Dans une petite quinzaine d'années, nous transporterons sans doute entre 200.000 et 250.000 personnes par jour", lance avec sa bonhommie perpétuelle André Von der Marck, directeur général de Luxtram et "père" du nouveau tram luxembourgeois à l'aube de sa retraite.

Plein de projets d'avenir

"épine dorsale" du transport public dans la capitale, le tram est promis à un bel avenir. La prochaine extension de la ligne de tram est toute proche. Le nouveau tronçon de 3,7 kilomètres et cinq nouveaux arrêts, relieront le lycée de Bonnevoie et le stade à la Cloche d'Or au sud-ouest de la capitale. Yuriko Backes, ministre de la Mobilité a confirmé, début mars, que son ouverture au public est prévue le 7 juillet 2024.

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Dès début 2025 les usagers pourront se rendre à l'aéroport du Findel, au nord-est de Luxembourg-Ville, promet le directeur général de Luxtram, André von der Marck. Une extension de 3,9 kilomètres qui longera l'A1 et traversera en partie une forêt. Une rame devrait partir circuler toutes les 7 minutes entre le Findel et LuxExpo.

En 2027, une nouvelle ligne (K2) créée au Plateau du Kirchberg à partir de la station Rout Bréck-Pafendall (à l'extrémité du Pont Rouge) permettra de rejoindre les futurs quartiers mixtes "Laangfur" et "Kuebebierg" à proximité de RTL City.

En 2028, existera aussi une ligne entre la Gare centrale et le futur quartier "Nei Hollerich". Le prolongement de la ligne (HO) sera réalisé en deux étapes. Dans une première étape, un nouveau tracé verra le jour à partir de la ligne existante, après la Gare centrale. Il desservira le futur quartier "Nei Hollerich" ainsi que  le pôle d’échange Hollerich. Plus tard, ce nouveau tracé sera prolongé jusqu'au futur quartier "Porte de Hollerich" et jusqu'au P&R Bouillon.

À l'horizon 2035, une toute nouvelle ligne de tram rapide reliera Luxembourg et Esch. Cette toute nouvelle ligne de 18,7 km s'inscrit dans un vaste projet de couloir multimodal qui passera par un élargissement de l'A4 à 2x3 voies, la création de cinq nouveaux pôles d'échanges et d'une piste cyclable express qui longera les rails. L'usager du tram pourra relier le stade de Luxembourg à Belvaux en 31 minutes.

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Une trajectoire ponctuée d'anecdotes

L'histoire récente du tram de Luxembourg a été ponctuée d'incidents, d'accidents et d'anecdotes. Tout a démarré trois mois avant son inauguration officielle. Le 26 septembre 2017, lors des portes ouvertes organisées au Tramsschapp pour permettre aux Luxembourgeois de découvrir pour la première fois leur future tram, l'avant du tram s'est pris les "pieds dans le tapis rouge" et a abîmé sa belle carrosserie en frottant la rampe d'accès spécialement installée pour l'occasion.

Lors de la "marche à blanc", six jours avant son inauguration officielle (le 10 décembre 2017), une rame a percuté une voiture dont le conducteur avait grillé un feu rouge de nuit. À peine 19 jours plus tard et toujours sous la neige, le tram a percuté une voiture qui se trouvait trop près des rails au Kirchberg.

La liste des accidents entre une rame et divers types de véhicules s'est allongée depuis, mais l'accident le plus spectaculaire s'est produit le 20 juillet 2019 au carrefour de l'avenue J.-F. Kennedy et de la rue Alphonse Weicker au Kirchberg. Un conducteur de bus n'a pas vu le tram arriver, la collision a fait cinq blessés, de gros dégâts matériels et... dérailler la rame.

Parmi les anecdotes plus amusantes, on retiendra un passager inhabituel qui a laissé pantois les usagers d'une rame en juillet 2022. Un touriste slovaque, Janez Cetin, a pris le tram le plus naturellement du monde avec son Nandou d'Amérique!

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