
Situé à 3 km à vol d’oiseau du Luxembourg, la nécropole de Thil est un lieu glaçant. Les belles prairies vallonnées des alentours ne parviennent pas à faire oublier la nécropole érigée à l’emplacement de l’ancien camp annexe (Kommando) du camp de concentration de Natzweiler-Struthof.
L’histoire de ce lieu sinistre débute en août 1943. Après la destruction du site de fabrication d’armes secrètes (les missiles V1 et V2) de Peenemunde (Allemagne), les Allemands décident de disperser leurs sites de production et de les enterrer.
Ce projet les mènent tout au nord de la Lorraine, à Thil. L’ancienne mine de fer du Tiercelet est choisie pour installer une usine. Une main d’oeuvre forcée est envoyée sur place. Les forçats sont Nord-Africains, Russes, Ukrainiens, Polonais, Yougoslaves, Hongrois... Ils sont internés dans les camps d’Errouville et de Morfontaine près de Thil où ils sont amenés chaque jour par train.
Les conditions de vie et de travail sont effroyables. De nombreux décès sont signalés. Les corps sont soit enterrés, soit brûlés à l’air libre.
Le 1er juin 1944, un camp annexe du Konzentrationslager Natzweiler-Struthof est créé sur place. C’est un cas exceptionnel à double titre : alors que le camp principal de Natzweiler-Struthof est situé en Alsace annexée de fait par le IIIème Reich, le camp annexe de Thil est le seul ouvert en France occupée.
Le 20 juin 1944, 500 Juifs en provenance du KL Auschwitz sont chargés des gros travaux d’aménagement extérieurs et intérieurs du camp. Un four crématoire est également installé dans l’enceinte du camp. Il provient d’une usine d’équarrissage située à Villerupt. “Il semble qu’il était utilisé pour brûler les corps des déportés du Kommando mais également ceux des prisonniers d’Errouville” peut-on lire sur la plaque commémorative de la nécropole.

Un deuxième convoi, composé de Juifs hongrois, arrive le 7 juillet du KL Neuengamme. Choisis en fonction de compétences professionnelles bien spécifiques, les deux convois de détenus juifs sont majoritairement constitués d’ouvriers de la métallurgie. Ils sont notamment chargés des travaux d’aménagement et ensuite de la production des V1 et V2 (les premiers missiles de croisières, capables de frapper des cibles à des centaines de kilomètres). Ils forment un Kommando spécial, baptisé “Minette”, occupant une place à part parmi les détenus de Thil.
Le 1er septembre 1944, les troupes alliées gagnent du terrain, et les nazis donnent l’ordre d’évacuer le KL Natzweiler. Tous les kommandos du camp situés à l’ouest du Rhin sont concernés. 557 hommes du Kommando de Thil partent en direction de Coblence ; en chemin, ils sont déviés vers le camp annexe de Kochendorf. Les 300 spécialistes du deuxième convoi partent quelques jours plus tard en direction du KL Dora.
Au total, une quarantaine de déportés seraient morts durant la brève existence du Kommando de Thil.
Un devoir de mémoire qui est honoré ce lundi 27 janvier, journée de commémoration des victimes de l’Holocauste, 80 ans après la libération d’Auschwitz. Au matin du 27 janvier 1945 quelques 7.000 détenus se trouvaient encore dans les camps d’Auschwitz-Birkenau. Plus d’un million de personnes déportées dans le camp d’Auschwitz y ont péri. On estime à six millions le nombre de Juifs qui ont été exterminés dans les camps de la mort.