
Gary Robinson a donné rendez-vous à notre collègue de RTL par visioconférence. L’homme de 49 ans est retourné en Irlande il y a quelques mois. Il a réemménagé chez ses parents. Depuis plus de 18 mois, il n’a toujours pas pu reprendre le travail.
Gary a attrapé le Covid 19 en décembre 2020. Sur le coup, il a été très malade. Cependant les symptômes du Covid long sont seulement apparus trois mois plus tard. Lui qui réalisait des études scientifiques au Liser, pouvait à peiner se concentrer une vingtaine de minutes d’affilée. À l’époque, il avait l’impression que de l’électricité parcourait tout son corps. Il ne parvenait plus à dormir, il souffrait de maux de tête.
“Si j’ai un rendez-vous, comme aujourd’hui, je ne peux rien faire d’autre de la journée. Ensuite, je dois me reposer, je ne peux pas lire un livre, je ne peux pas regarder un film. Ce n’est pas une fatigue normale. C’est comme si vous chargiez vos batteries à 5-10% et que vous deviez tenir toute la journée avec”, avait raconté Gary Robinson à RTL en mars 2022.
Aujourd’hui, Gary ne va pas beaucoup mieux. Et en cas de léger mieux, il doit prendre garde à ne pas en faire trop, comme il en a à nouveau fait l’expérience récemment, lorsqu’il a rempli une demande pour recevoir une aide sociale financière de l’État irlandais. Plus de dix pages de documents. Cela a été tellement épuisant qu’il en ressent encore les séquelles, nous explique Gary.
“Si vous vous dépensez, vous vous faites avoir. Les symptômes s’aggravent et il faut beaucoup de temps pour en revenir là où vous étiez avant.”
C’est ce qui lui est arrivé: acouphènes, problèmes de vision, maux de tête de divers types, son cerveau ne fonctionne pas correctement, il peut encore à peine écouter de la musique depuis.
Au moment du diagnostic, Gary Robinson avait bénéficié d’un accompagnement psychologique à la Rehaklinik du CHNP (Centre Hospitalier Neuro-Psychiatrique) d’Ettelbruck dans le cadre du programme Covid long. L’objectif du traitement est d’améliorer les capacités cognitives des patients, mais aussi de les aider à mieux vivre leur maladie au quotidien.
Au départ, la Rehaklinik du CHNP à Ettelbruck comptait moins de patients, mais cela a changé avec le temps, explique le docteur Charel Benoy, psychothérapeute au CNHP. Les personnes souffrant de problèmes chroniques représentent aujourd’hui la moitié des patients atteints de Covid long soignés à la Rehaklinik. “Que nous accompagnons parfois depuis près de deux ans. Qui souffrent d’un syndrome psychique, voire d’un syndrome de stress chronique.”
Au cours de la prochaine décennie, le Covid long pourrait devenir une nouvelle maladie endémique, selon une modélisation récemment publiée dans la revue renommée Nature. D’après celle-ci, le nombre de personnes concernées pourrait se rapprocher de celui des patients atteints de problèmes cardio-vasculaires.
“Cela signifie que nous avons soudain de nombreuses personnes souffrant d’un syndrome comparable, qui ne peuvent pas ou ne peuvent plus jouer le même rôle qu’avant dans la société. Qui sont partiellement ou complètement invalides, mais qui sont jeunes ou qui avaient jusqu’à présent une vie tout à fait normale.”
Il faudra chercher des voies pour maintenir ces patients de manière digne dans la société et les réintégrer dans le monde du travail, dit Charel Benoy.
Gary Robinson, pour sa part, a du mal à envisager l’avenir avec optimisme. “Qui va embaucher une personne qui ne peut se concentrer que pendant 15 minutes d’affilée et doit ensuite se reposer une heure?”, se demande-t-il.
Il a aussi le sentiment que peu d’argent est consacré à la recherche sur le Covid long. D’après sa récente expérience en Irlande, les médecins n’ont pas le temps de se renseigner sur le sujet. Son rendez-vous chez un neurologue s’est avéré particulièrement décevant. Ce dernier lui a dit: “tout est psychosomatique, juste dans votre tête!”
Fatigue chronique, essoufflement, difficultés de concentration... ce ne sont là que quelques-uns des plus de 200 symptômes qui peuvent survenir avec le Covid long. Il est question de Covid long ou de post-Covid lorsque des patients souffrent de certains symptômes trois mois après une infection au SARS-CoV2. Selon l’OMS, entre 10 et 20% des personnes ayant contracté le Covid, sont concernées.
Un programme pour les patients atteints d’un Covid long existe depuis deux ans au Luxembourg. Le lieu d’accueil centralisé est au Centre hospitalier de Luxembourg. A partir de là, selon les symptômes, les patients sont envoyés en thérapie soit au centre de rééducation du Kirchberg, soit aux thermes à Mondorf ou à la Rehaklinik du CHNP à Ettelbruck.
A la date du 27 novembre 2023, 1.234 patients avaient été intégrés au programme Covid long. La moyenne d’âge de ces patients est de 47,4 ans. 64,3% sont des femmes, 35,7% des hommes. La durée moyenne d’une prise en charge est de 307 jours. 586 patients ont terminé leur parcours.
Mireille Mulheims a fait partie des premiers patients soignés pendant plusieurs semaines contre le Covid long en août 2021 aux thermes de Mondorf. Notamment pour pouvoir mieux respirer. Elles était également encadrée psychologiquement pour faire face à sa situation. La mère de famille souffrait d’une terrible fatigue et elle culpabilisait car elle manquait d’énergie pour faire des choses avec ses enfants. En plus elle avait des problèmes de concentration, il lui était souvent difficile de trouver ses mots.

“Si j’avais une journée de stress, je ne pouvais simplement plus rien faire le lendemain. J’avais à nouveau tous les symptômes du coronavirus. Le corps me jouait des tours, j’étais de nouveau malade”, expliquait Mireille au cours de l’été 2021.
Même deux ans plus tard, elle souffre encore de symptômes du coronavirus après des situations stressantes, a expliqué Mireille à RTL en décembre. Les problèmes de concentration et la fatigue sont restés, selon l’éducatrice, qui a repris le travail à temps plein. “Ca va, mais ça ne va pas toujours bien. Il y a des moments où je rentre à la maison et puis plus rien ne va. Alors je m’allonge et je dors une heure.”
Ensuite elle peut s’y remettre, mais il y a beaucoup de choses qui sont laissées de côté à cause de cela, regrette Mireille. Après la cure aux thermes de Mondorf, son dossier lui a été renvoyé par la centrale Covid long du CHL, avec la remarque qu’on ne pouvait plus beaucoup l’aider davantage. C’était à l’automne 2021. Depuis, elle ne suit plus de traitement spécifique. A l’époque, elle a décidé d’apprendre à faire face à ses problèmes.
Samuel Clerc a souffert longtemps de graves problèmes respiratoires. Il a donc suivi une thérapie Covid long au Rehazenter au Kirchberg, à raison de trois séances hebdomadaires de trois heures chacune pendant quatre mois. C’était avant que nous le rencontrions en janvier 2022. A l’époque, l’ancien coureur pouvait à peine courir un kilomètre.

En décembre 2023, notre collègue de RTL avait rendez-vous avec lui dans le parc de la Coque. Samuel arrive en courant et raconte qu’il va beaucoup mieux aujourd’hui. “J’arrive à courir comme à l’époque, avant le Covid. Je cours régulièrement plusieurs dizaines de kilomètres même. Donc un effort quasi normal.”
Mais depuis son infection au Covid en octobre 2020, Samuel est asthmatique. Son odorat n’est pas encore complètement revenu. Sons sens du goût a changé. Il s’est rétabli de sa terrible fatigue. Elle réapparaît seulement avec force s’il est malade. Les problèmes respiratoires reviennent alors aussi. Ils durent environ trois semaines.
Le reportage de RTL en luxembourgeois: