
Le bien-être et les conditions de travail diffèrent nettement entre les frontaliers et les travailleurs résidant au Luxembourg. Dans son nouveau numéro “Betterwork” publié jeudi, la Chambre des salariés (CSL) revient en détails sur le rôle que jouent notamment les trajets domicile-travail et le télétravail.
Le temps de trajet demeure un facteur clé dans la satisfaction au travail et “les disparités entre résidents luxembourgeois et frontaliers restent marquées”, annonce d’emblée la CSL. Les chiffres parlent d’eux-mêmes: 62% des salariés résidant au Luxembourg mettent moins de 30 minutes pour se rendre au travail.

Un temps de trajet qui fait rêver de nombreux collègues qui franchissent matin et soir une frontière pour se rendre sur leur lieu de travail car la majorité des frontaliers connaissent des trajets nettement plus longs. Et c’est particulièrement vrai pour les frontaliers français: “66% déclarent un temps de trajet supérieur à 46 minutes, suivis des Belges (53%) et des Allemands (52%)”. Certains peuvent aisément mettre le double de temps.
Ce temps de trajet “à rallonge” a inévitablement un effet sur le niveau de satisfaction des salariés. Tandis que 60% des résidents luxembourgeois se disent satisfaits ou très satisfaits (16% sont quand même insatisfaits), les frontaliers sont plus nombreux à être insatisfaits: 48% des Français sont mécontents du temps passé sur la route. C’est aussi le cas pour 39% de leurs collègues belges et 31% des Allemands.
Le temps passé sur la route impacte évidemment plusieurs dimensions du bien-être au travail. On peut très simplement retenir que “plus le trajet est long, plus les indicateurs de bien-être se détériorent”, excepté pour le “bien-être psychologique général (WHO-5), pour lequel aucune différence significative n’est observée”, écrit la CSL.

La satisfaction au travail baisse en fonction du temps passé dans la voiture pour se rendre au boulot: elle passe de 66,6 pour les salariés ayant un trajet de moins de 15 minutes à 57,7 pour ceux dont le trajet excède 90 minutes.
Les conflits entre vie professionnelle et vie privée augmentent de la même manière. Ils culminent à 39,9 pour les trajets de 46 à 60 minutes, contre une moyenne générale de 36,8.
Le burnout et les problèmes de santé physique “s’intensifient également avec la longueur du trajet”, assure la Chambre des salariés. Le score moyen de burnout passe de 31,4 (0-15 minutes) à 36,2 (91+ minutes), tandis que les problèmes de santé atteignent un maximum de 36,7 pour les trajets les plus longs.
La motivation au travail diminue progressivement jusqu’à la catégorie des trajets de 46-60 minutes (50,7), mais reste ensuite relativement stable pour les trajets les plus longs (52,4 pour 61-90 minutes et 52,2 pour 91+ minutes).
Le télétravail apparaît comme un “levier de régulation des contraintes liées aux déplacements domicile-travail”, note la CSL. Après un fort essor pendant la pandémie, “sa pratique s’est stabilisée à un niveau global de 32% en 2024 (au moins plusieurs fois par mois)”.
Mais les inégalités persistent : si environ 40% des résidents luxembourgeois y recourent régulièrement, ce n’est plus le cas des frontaliers.

Les frontaliers ont vu leur taux de télétravail reculer depuis la fin des mesures fiscales et sociales dérogatoires. En 2024, “seuls 24% des frontaliers français, 22% des Belges et 19% des Allemands” avaient encore recours au télétravail.
La baisse est encore plus marquée pour le “télétravail fréquent”, c’est-à-dire pratiqué plusieurs jours par semaine. Alors que 26% des salariés résidents au Luxembourg y ont encore accès en 2024 (contre 31% en 2021), “cette fréquence est devenue marginale chez les frontaliers : 4% seulement chez les Français, les Allemands et les Belges, contre environ 23 à 28% en 2021”, remarque la CSL.
Le télétravail reste évidemment lié au secteur et au type de profession. Il reste une pratique privilégiée chez les cadres et professions intellectuelles, mais il est quasi inexistant dans des domaines comme la construction, les services de proximité, la restauration ou la santé par exemple.