
Le 11 avril 2023 dans le quartier Cronenbourg à l’ouest de Strasbourg, ces cinq CRS ont fait monter par la force deux jeunes hommes “de type nord-africain” dans leur véhicule. Après un premier transport, ils ont procédé à un contrôle dans une impasse, où ils ont relâché l’un des deux individus, conduisant l’autre au commissariat.
“On le ramène, on l’a trop secoué”, déclare un policier, audible sur un enregistrement diffusé à l’audience. L’homme sera relâché à l’issue de 48 heures de garde à vue. Il se plaint d’avoir été frappé et accuse les forces de l’ordre de lui avoir dérobé son argent liquide, soit 410 euros. Un médecin lui délivrera une ITT d’un jour.
A l’audience, la présidente, Isabelle Karolak, a reproché aux policiers le flou autour des motifs de l’interpellation: “On a l’impression qu’il y a une sphère de non-droit, de non-procédure, personne ne sait pourquoi on interpelle les gens”.
Selon l’agent, les deux suspects ont été interpellés après avoir proféré “des insultes” à l’encontre des forces de l’ordre. Aucune insulte n’est audible sur les enregistrements vidéos, mais ceux-ci ont été déclenchés après le début de l’altercation.
Au regard des différences entre le récit des policiers sur les procès-verbaux, et les images diffusées à l’audience, les juges leur ont reproché de “ne pas écrire la réalité”, soulignant que l’interpellation et le transport d’une des deux personnes, par exemple, n’ont pas été mentionnés sur les procès-verbaux d’intervention.
“On a une personne embarquée sans motif. Des blessures, et pas d’explication. Un billet de 10 euros (le seul argent visible sur une vidéo, NDLR) qui disparaît, et pas d’explications: ça fait beaucoup. Ça vous parait sérieux ?”, interroge le procureur, Alexandre Chevrier.
Le chef des CRS n’a pas souhaité répondre. “La peur doit changer de camp, et c’est pas près d’arriver. Il suffit qu’un jeune de la rue dise n’importe quoi pour qu’on se retrouve au tribunal”, a-t-il regretté à la fin de son interrogatoire.
L’audition des policiers doit se poursuivre dans l’après-midi. Ils encourent jusqu’à sept ans de prison.