
Le long de la Semois, l’Arlésienne s’appelle la loutre. On en parle beaucoup, mais on ne la voit jamais. Pourtant, sa présence est certifiée. “Des mesures ADN environnementales prises en juin 2022 attestent de sa présence”, confirme Quentin Dubois, chargé de mission au Parc National de la Vallée de la Semois. «Plusieurs actions sont menées dont une qui consiste à rechercher des indices de présence via les pièges photographiques ou vidéos ou alors à travers les crottes ou les empreintes que pourrait laisser l’animal.»
Les sceptiques restent sur leur faim, mais la technique de recherche d’ADN est fiable selon Quentin Dubois. “Ce sont des codes-barres développés spécifiquement par un institut de recherche flamand. Cette méthodologie est éprouvée.” Pourquoi dès lors est-il si difficile de capturer visuellement cet animal d’un peu moins d’un mètre de long? “Elle est très discrète. Elle vit la nuit. Des efforts importants sont déployés le long de la Semois pour l’observer mais rien n’y fait jusqu’à présent. Pas mal d’articles scientifiques témoignent de la difficulté à l’observer. C’est difficile à expliquer d’autant plus qu’on n’a pas encore trouvé de crottes, ce qui peut aussi se justifier par la faible densité de population de l’espèce qui ne se sent pas obligée de marquer son territoire.”

Menacé de disparition en Europe il y a un siècle, le mustélidé a bénéficié d’un statut de protection et de programmes de réintroduction pour repeupler les berges de rivières comme aux Pays-Bas. “Certaines observations en Flandre laissent à penser que des loutres sont venues de Hollande. Ça semble toutefois un peu loin pour imaginer qu’elles arrivent jusque chez nous même si on commence à en apercevoir aussi dans le Grand Est français.” D’où l’importance de localiser des épreintes, le nom exact des déjections des loutres, afin d’en analyser la provenance.
La loutre a beaucoup d’exigences en ce qui concerne son habitat et notamment ses ressources alimentaires. Elle consomme beaucoup de poissons, ce qui semble compatible avec la Semois, bien pourvue à ce niveau. Elle a besoin aussi de quiétude en zone de reproduction, ce que la rivière wallonne, qui prend sa source à Arlon, offre aussi. Tout est fait pour le confort de l’animal, y compris des actions entreprises par le Parc pour sécuriser ses déplacements et éviter les collisions, principale cause de mortalité aux Pays-Bas.
On dit encore de la loutre qu’elle est un indicateur de la bonne santé des cours d’eau. “C’est le phénomène de bio accumulation. Si les ressources qu’elle consomme sont contaminées, elle finira pas en payer le prix à travers sa reproduction ou le développement de maladies”, ponctuait Quentin Dubois.
La loutre n’est pas le seul animal à intriguer les naturalistes et les amoureux de la faune en province de Luxembourg. Le lynx fait aussi l’objet de tous les fantasmes. Là aussi les photos se font rares, mais l’Intelligence Artificielle pourrait, à travers le décryptage de bruits, éclaircir ce mystère dans un futur rapproché.