Faudra-t-il travailler plus longtemps au Luxembourg? Prudente sur ce sujet explosif, la ministre de la Sécurité sociale Martine Duprez concède qu'il y a d'autres leviers à actionner avant de toucher à l'âge de la retraite.

Si on en vient à une éventuelle réforme des retraites, faudra-t-il ou non travailler plus longtemps à l’avenir au Luxembourg?

Fin 2023, lorsque la ministre Martine Deprez a présenté aux membres de la Commission de la Sécurité sociale l'accord de coalition du nouveau gouvernement CSV-DP, il a déjà été question des retraites.

Selon le procès-verbal de la réunion, Martine Deprez a déclaré que si des changements étaient apportés à l'architecture du système de retraite, il faudrait prévoir une période transitoire suffisamment longue: "En effet, il s’agit de prendre en compte les attentes des assurés ayant commencé leur carrière sous le régime donné. En revanche il faut éviter des décisions à court terme, comme un relèvement de l’âge du départ à la retraite, qui risquent de se heurter à une forte opposition."
 
Cela signifie-t-il que le gouvernement ne relèvera définitivement pas l’âge de la retraite? Sur cette question, interrogée par RTL, Martine Deprez noie le poisson.

"Au Luxembourg, il n'existe en fait pas de véritable âge de la retraite qui soit remis en question. L'âge de départ à la retraite est 65 ans. Et si nous l'avions partout, nous aurions déjà en partie surmonté le pire."

Là, Martine Deprez joue sur la différence entre l'âge légal de la retraite, c'est-à-dire 65 ans, et l'âge effectif de départ à la retraite. En 2022, ce dernier variait entre 61 et 62 ans. En vertu des dispositions sur la pension vieillesse anticipée, un assuré peut prendre sa retraite à partir de 57 ans, s'il a à son actif 40 annuités cotisées, les fameuses périodes obligatoires, ou à partir de 60 ans, s'il a une carrière d'assurance globale de 40 annuités, dont 10 cotisées.

Une solution serait de rendre plus compliqué le départ anticipé à la retraite

A cause de ces dispositions, on ne pourrait pas parler d'un relèvement de l'âge de la retraite, dit Martine Deprez: "Si nous disions maintenant que nous allons passer de 65 à 67 ans, sans rien changer d'autre, je ne peux pas imaginer, dans la situation actuelle, que nous le ferions sans actionner d'autres leviers."

Quels leviers faut-il actionner, étant donné que selon les prévisions de l'IGSS, l'Inspection générale de la Sécurité sociale, après 2027, les cotisations ne suffiront plus à payer les dépenses courantes? La réponse à cette question ne devra être établie que par la consultation et la ministre de la Sécurité sociale ne veut pas anticiper sur cette consultation.

Mais même si Martine Deprez n'a pas évoqué cette possibilité, une manière de relever l'âge de la retraite sans toucher à l'âge légal de 65 ans serait de durcir les conditions d'octroi de la pension de vieillesse anticipée. De cette manière, les assurés pourraient être contraints de travailler jusqu’à 65 ans, c’est-à-dire plus longtemps qu’aujourd’hui.

A propos des cotisations, on peut lire dans le procès-verbal de la réunion avec des députés déjà cité plus haut: "Madame la ministre juge peu réaliste de prévoir dans la situation économique actuelle une augmentation des cotisations. Il lui semble en effet peu probable que les entreprises soient disposées à effectuer des dépenses aussi conséquentes dans un environnement économique défavorable, sachant que les cotisations sont plafonnées à une rémunération brute équivalente à cinq fois le salaire social minimum par mois."

La ministre ne veut toutefois pas que cela soit compris comme un engagement ferme que les cotisations ne seront pas augmentées. Dans l'interview accordée à RTL, elle souligne: "C'était une appréciation. Ce n'était pas une piste qui était écartée ou devait être promue. Vous pouvez retrouver la position dans l'avis du Conseil économique et social. Ce qui est certain, c'est que nous avons un système basé sur la croissance. Et si cette croissance ne suit plus, nous devrons voir comment y remédier."

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