Virginie Schweger, Madinatu Abdulrasheed et John Sinner vivent dans une situation financière précaire, chacun pour des raisons différentes.

Cependant, ils sont tous touchés par la hausse des coûts de la vie et du logement au Luxembourg. Maladies, accidents ou crises personnelles les ont placés dans des situations précaires dont il est difficile de sortir.

Virginie Schweger, 54 ans : "Votre vie peut s’effondrer en un instant"


Virginie Schweger a quitté la France pour le Luxembourg à 18 ans et a travaillé normalement jusqu'à ce qu'un accident de voiture la laisse partiellement invalide à 32 ans. Après des mois de paralysie et de convalescence, des douleurs chroniques l'ont empêché de reprendre le travail. Elle vit sans devoir payer de loyer chez un ami et l'aide pour les tâches ménagères et les soins. Pendant près d'un an, elle a dû compter sur les prestations sociales pour couvrir ses frais médicaux et s'approvisionner en nourriture dans des épiceries sociales. Mais en août, elle a commencé à percevoir son allocation pour salariés handicapés, ce qui lui a enfin apporté un sentiment de stabilité. "Tant que je n'ai pas de loyer à payer, je m'en sortirai", dit-elle.

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Madinatu Abdulrasheed, 47 ans : "Je suis en Europe, mais je n'ai rien à offrir à mes enfants"


Originaire du Nigéria, Madinatu Abdulrasheed a vécu confortablement au Luxembourg avec sa famille jusqu'à son divorce en 2017, qui l'a laissée sans emploi et avec quatre fils à charge. N'ayant ni les qualifications ni les compétences linguistiques nécessaires pour trouver du travail, elle a sombré dans la dépression et dans les difficultés financières. Aujourd'hui, elle vit dans un logement social et perçoit l'aide sociale. Elle s'efforce de retrouver son indépendance en gérant un café à Esch-sur-Alzette. "Il fut un temps où je ne croyais pas que je pourrais réussir, mais maintenant, j'y crois."

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John Sinner, 64 ans : "En tant que Luxembourgeois, je me sens rejeté par la société"


John Sinner est confronté à l'instabilité depuis son enfance : il a quitté son foyer d'accueil pour rejoindre des membres de sa famille, plus tard, il a lutté contre la toxicomanie et fait de la prison. Il a fini par trouver du travail, mais il y a quelques mois, sa santé s'est détériorée et il a été mis en arrêt maladie.

Il vit dans une chambre de 14 mètres carrés avec seulement un micro-ondes et une salle de bain commune, pour laquelle il paie 900 euros. Il rêve d'un logement social. "Je ne me sens pas accepté dans cette société, même pas par mon propre gouvernement", confie John Sinner.

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De plus en plus de personnes seules recherchent de l’aide

Le risque de pauvreté progresse en permanence au Luxembourg depuis 2005. La précarité ne touche pas seulement les personnes vivant dans la rue. Selon le rapport annuel de la Chambre des Salariés, un résident luxembourgeois sur cinq est aujourd'hui menacé de pauvreté. Un emploi n'est pas une garantie de sécurité financière, car une personne sur sept qui travaille est également menacée de pauvreté. Cela fait du Luxembourg le pays de la zone euro où le taux de travailleurs pauvres est le plus élevé. 13,4% des travailleurs vivent sous le seuil de pauvreté.

"La hausse du coût de la vie, la crise du logement et la crise énergétique mettent les familles dans une situation difficile", explique Laurence Koenn, directrice des services sociaux de la Croix-Rouge. "Et nous ne parlons pas seulement du chômage, de nombreuses personnes ayant un emploi sont également en difficulté." Depuis 2019, les demandes d'aide aux services sociaux de la Croix-Rouge ont augmenté de 26 %. Outre des parents isolés et des familles nombreuses, un nombre croissant de personnes seules ont également besoin d'aide.

"Nous voyons des jeunes qui débutent leur carrière et qui doivent soudain payer un loyer et des frais pour leur voiture, ainsi que des personnes âgées qui n'ont que leur retraite pour vivre et ont beaucoup de frais. En général, les personnes qui vivent seules ont davantage besoin d'aide", explique Nathalie Bley, directrice adjointe des services sociaux à la Croix-Rouge.

Quelles aides pour lutter contre la précarité ?

Ces dernières années, le gouvernement a mis en place divers programmes destinés aux familles financièrement vulnérables, notamment des subventions telles que l'allocation de vie chère, des aides au logement telles que la subvention de loyer et des subventions pour les frais de chauffage comme la prime énergie.

Sur le site guichet.lu, les personnes concernées peuvent vérifier les conditions d'éligibilité, utiliser des simulateurs pour estimer le montant de l'aide potentielle et trouver des formulaires. Cependant, une étude publiée l'année dernière pour le compte de la Chambre des Salariés révèle qu'environ 80% des personnes éligibles à la subvention de loyer ne déposent pas de demande et que 40% des personnes éligibles à l'allocation de vie chère ne l'utilisent pas. Le manque d'information, les difficultés à remplir les formulaires et la stigmatisation sont les principales raisons pour lesquelles les familles ne profitent pas de ces prestations

Demander de l'aide avant qu'il ne soit trop tard


Les bureaux des services sociaux sont disponibles pour fournir des informations sur les aides existantes et l'éligibilité des demandeurs, ainsi que sur d'autres types d'aide personnalisée. "La Croix-Rouge propose une aide dans de nombreux domaines. Cela peut inclure l'assistance à la demande d'aide financière pour un étudiant, l'aide à la recherche d'une maison de retraite pour une personne âgée, l'aide pour les démarches administratives ou l'aide à la recherche d'un logement", explique Nathalie Bley.

"Les gens viennent nous voir et leur dossier est examiné pour déterminer quels documents sont nécessaires, quelles informations manquent et comment nous pouvons les aider au mieux à trouver l'aide dont ils ont besoin." 

L'aide de la Croix-Rouge est composée à 75% de prestations administratives, les 25% restants étant d'ordre financier, dont une aide pour les frais médicaux, l'accès aux épiceries sociales et une aide aux frais liés au logement, comme le loyer et la caution. "Tout le monde peut demander de l'aide aux services sociaux, qu'elle soit financière ou non", explique Laurence Koenn, qui donne un conseil : "N'attendez pas d'être en grande difficulté pour venir nous voir. Tout le monde peut avoir besoin d'aide à un moment ou un autre. Les services sociaux ne sont pas réservés aux personnes pauvres, ils sont là pour tout le monde."

Le reportage de RTL en luxembourgeois et en français: