
Les réactions se multiplient depuis que ING est accusée de forcer ses clients "non rentables" au Luxembourg à se trouver une nouvelle banque. Le ministre des finances vient de demander à la banque néerlandaise, qui se mure pour l'instant dans le silence, "une communication claire".
Dans un post sur le réseau social "X", Gilles Roth a annoncé avoir eu une conversation avec le CEO d'ING Luxembourg mardi matin. Le ministre luxembourgeois des Finances y a clairement fait savoir au directeur de la banque qu'il attendait une "communication claire" ainsi qu'une "solution ordonnée" pour les clients concernés. La Commission de Surveillance du Secteur Financier (CSSF), qui est chargée de la surveillance du secteur bancaire, s'intéresserait aussi de très près à cette affaire, poursuit Gilles Roth.
Les critiques se multiplient depuis que la banque néerlandaise a demandé à une partie de ses clients au Luxembourg de se trouver une nouvelle banque. Comme nous le rapportions il y a quelques jours, de nombreux clients se sont plaints de la manière dont procède la banque : "Je suis cliente depuis 12 ans, mon salaire arrive et j'ai un compte épargne [...]. Ils ont pourtant clôturé mes comptes" déplorait une personne sur les réseaux sociaux.
Marc U., client de la banque depuis 40 ans, a dû lui aussi trouver une nouvelle banque : "Ils m'ont dit que la direction menait une nouvelle politique et que mon compte n'était pas suffisamment rentable pour eux."
Depuis ces témoignages, l'affaire a pris un tournant politique. "La banque ING, une des plus grandes banques de détail de notre place financière, a contacté ses clients privés afin de les informer que leurs comptes seront clôturés le 16 juillet 2024 en raison de cessation d’activités au Luxembourg, les invitant à transférer leurs avoirs sur d’autres banques. La banque n’a pas commenté cette décision, à part d’annoncer qu’il y aurait plus d’informations dans les semaines à venir" rapporte ainsi le député Laurent Mosar (CSV) dans une question parlementaire. "Une telle décision d’une banque majeure de la place risque d’avoir des répercussions négatives sur les autres banques et endommager la réputation de notre place financière dans son ensemble. En outre, elle risque d’aggraver les difficultés qu’ont les personnes physiques et morales d’ouvrir et de maintenir un compte au Luxembourg" ajoute-t-il.
La banque néerlandaise a doublé son bénéfice net en 2023
Selon une source au sein d'ING citée par L'Essentiel, la politique d'ING "serait de ne garder que ceux qui gagnent au moins 5.000 euros par mois et qui possèdent une épargne d'au moins 50.000 euros"; "On est bien dans cet ordre de grandeur", leur a également confirmé l'Aleba, le syndicat du secteur financier.
Comme le rappelle Nico Hoffmann, président de l'ULC (Union Luxembourgeoise des Consommateurs), les conditions des banques ne mentionnent aucune obligation de justifier la fermeture d'un compte. Il explique que, dans une telle situation, il ne reste plus au client concerné qu'à se tourner vers une autre banque, ce qui n'est pas toujours évident non plus, "certaines banques refusent déjà ce genre de clients". Nico Hoffmann en appelle donc au gouvernement afin de légiférer dans l'intérêt du client, afin d'éviter que ce genre de situation ne se reproduise: "il est plus que temps que les responsables politiques prennent leurs responsabilités, afin de réellement agir dans l'intérêt des citoyens. On se demande vraiment quelle valeur le consommateur normal a encore aux yeux des banques".
Il faut noter que depuis plusieurs années, la majorité des agences ING au Luxembourg sont ouvertes uniquement sur rendez-vous. En 2023, ING comptait environ 1.000 salariés dans le pays.
Rappelons également que le géant bancaire néerlandais a annoncé en février dernier que son bénéfice net avait presque doublé en 2023 pour atteindre 7,29 milliards d'euros grâce à la "hausse rapide des taux d'intérêt et à un environnement économique favorable". En 2023 toujours, ING a accueilli 750.000 nouveaux clients, "surtout en Allemagne, en Espagne aux Pays-Bas", et en comptait 15,3 millions à travers le monde.