Vivre sous une tente au Luxembourg"La pauvreté progresse, nous ne parvenons plus à le dissimuler"

Anne Wolff
Stefan et Ferenc, deux sans-abri, vivent sous leurs tentes au Kirchberg, depuis un an et demi. La pauvreté progresse et le fait de voir des sans-abri sous des tentes au Luxembourg est un nouveau phénomène qui prend de l'ampleur, reconnaît directrice de la Stëmm vun der Strooss.
Vivre sous une tente au Luxembourg
Stefan et Ferenc, deux sans-abri, vivent sous leurs tentes au Kirchberg, depuis un an et demi. La pauvreté progresse et le des sans-abri dorment sous tente.

L’Action Hiver (“Wanteraktioun”) vise à accueillir des personnes sans domicile fixe pendant les mois d’hiver pour leur fournir un lit pour la nuit et trois repas par jour. Elle s’était terminée le 15 avril, mais le retour du froid a poussé les autorités à rouvrir le foyer de nuit jusqu’au 28 avril 2024.

Après la fermeture du foyer de nuit, les sans-abri étaient retournés dans la rue pour une vie non seulement épuisante, mais aussi dangereuse. L’asbl Stëmm vun der Strooss, qui œuvre en faveur de l’intégration sociale et professionnelle de personnes défavorisées, constate qu’au cours des dix dernières années, le nombre de ses bénéficiaires a pratiquement été quadruplé rien qu’à Luxembourg-Ville.

Peu avant-midi dans le quartier Gare à Luxembourg-ville: la file d’attente est longue devant le local de la Stëmm vun der Strooss. L’un après l’autre, les bénéficiaires sont admis pour recevoir un repas chaud.

Maintenant que l’Action Hiver se termine et que le ramadan est fini, la fréquentation bat à nouveau son plein le midi, explique Alexandra Oxaceley, directrice de la Stëmm vun der Strooss. Entre 280 et 350 repas sont distribués rien qu’à Luxembourg-Hollerich.

Attendre que la gare ouvre, pour pouvoir dormir

La pluie verglaçante pousse la plupart des clients quelques mètres plus loin dans les locaux du “Saxophon”, où l’asbl distribue des sacs de couchage et où les gens peuvent se reposer.

Nous retrouvons Alain Rayeck, que nous avions rencontré cet hiver au foyer de nuit. Maintenant, il a un hébergement, mais il sait que dormir dans la rue est dangereux, il faut donc toujours être au moins deux.

“Je sais qu’à Bonnevoie, il y a des bandes de jeunes qui traînent et qui s’amusent à piétiner une personne allongée seule dans un sac de couchage. C’est un bizutage pour appartenir à la bande, pour être cool. Où on piétine une personne déjà faible jusqu’à ce qu’elle ne bouge plus.”

Daboné Solo vit aussi dans la rue. Depuis la fin de l’Action hiver, il lui arrive parfois de rester éveillé jusqu’à 5h00 du matin. Il attend l’ouverture de la gare pour pouvoir y dormir.

De plus en plus de gens en arrivent à dormir sous des tentes au Luxembourg. “Lorsque j’ai remarqué en décembre que des gens dormaient sous des tentes à Luxembourg, c’était une nouveauté pour moi. Je savais déjà qu’il y en avait qui dormaient dans la forêt. Mais c’est un phénomène qui prend de l’ampleur désormais. On voit vraiment maintenant que la pauvreté progresse. Nous ne parvenons plus à le dissimuler”, avoue Alexandra Oxaceley.

Vivre sous une tente

Stefan et son ami Ferenc nous accompagnent dans la forêt au Luxembourg-Kirchberg. Ils vivent ici sous leurs tentes avec leurs chiens Chilli et Pici depuis un an et demi.

© Ryck Thill

Malgré la pluie et le froid, ils ne veulent pas aller à l’Action Hiver, explique Stefan. Il y a trop de gens dans un local, trop de cultures différentes et cela conduit à des agressions.

En plus, ils ne pourraient pas garder leurs chiens. Ici, dans le bois, ils se sentent en sécurité. Ils ont tenté autant que possible de rendre le lieu agréable. Ils nettoient et se débarrassent des ordures une fois par semaine.

© Ryck Thill

Les deux amis sont venus de Hongrie. Stefan explique qu’il cherche un travail. Il a appris le métier de cuisinier, mais quand vous êtes à la rue et que cela se remarque, il est difficile de trouver un travail. Mais pas question de retourner en Hongrie. Là, vous ne gagnez pas d’argent et le monde politique est “fou”.

Back to Top
CIM LOGO