
Quelques jours avant les élections, RTL Infos a publié une série d’articles thématiques sur les promesses des partis. Travail, revenus, famille... De toutes ces mesures, ce sont finalement celles du CSV et du DP qui ont convaincu les électeurs le 8 octobre.
Le CSV et le DP commenceront ce mercredi à négocier ensemble dans le but de former une nouvelle coalition gouvernementale “forte”, comme le souhaite le futur Premier ministre, Luc Frieden. Le leader du CSV a expliqué que le choix de négocier d’abord avec le DP s’est imposé, car “après une première analyse, nous sommes d’avis qu’une coalition avec les libéraux mènerait à une cohérence programmatique”.
Conservateurs et libéraux vont maintenant tenter de trouver un accord de coalition pour les cinq prochaines années. De nombreuses mesures les rapprochent déjà. D’autres montrent des différences d’approche et donneront sans nul doute lieu à des discussions plus ardues pour trouver une ligne commune.
Les deux partis, tour à tour au pouvoir depuis plus de vingt ans et qui se sont rejetés l’inactivité politique dans le domaine du logement, savent que c’est “le” terrain sur lequel ils seront le plus attendus. Ça tombe bien, CSV et DP sont exactement sur la même longueur d’onde. Avec des nuances, tous deux veulent construire beaucoup plus de logements dans un pays quasi paralysé par la problématique.

Le CSV a annoncé vouloir “construire plus, plus vite, plus haut et plus dense” tout en abolissant “les mesures de compensation environnementale” et en réduisant le nombre d’études d’impact. Le DP veut construire des logements publics en masse et, pour accélérer la cadence, se débarrasser des “procédures fastidieuses et des lois inutilement restrictives notamment en ce qui concerne la protection de l’environnement”.
Les deux partis sont tout aussi d’accord sur la nécessité d’une relance économique du Luxembourg. Le CSV veut “donner un nouvel élan à notre économie” et a promis de veiller à maintenir le Triple A. Il est “essentiel pour la compétitivité de l’économie”, cosigne le DP. Le pays a “besoin de croissance” qui devra être “durable et inclusive”, estime le CSV qui compte favoriser le développement des PME en mettant à leur disposition plus de terrains dans les zones industrielles. Le DP met au cœur de sa politique une “fiscalisation compétitive des entreprises”.
Avec un tandem CSV-DP au pouvoir, l’indexation des salaires en fonction de l’inflation restera garantie. Le CSV “tient” à l’index et ne le plafonnera pas en fonction des salaires. Le DP veut aussi maintenir l’index.
Mais pas question de tendre vers la semaine de 35 heures (comme en France), voire moins, comme l’ont suggéré déi Lénk durant la campagne. CSV et DP tiennent à la semaine de 40 heures. Les deux partis s’opposent à une généralisation de la réduction du temps de travail, mais sont favorables à une flexibilisation accrue du travail dans le but de mieux concilier vie professionnelle et vie privée.

Le CSV est prêt à “réorganiser le temps de travail”, mais “dans le dialogue social”. Le DP est prêt à “aider les entreprises qui le souhaitent à tester des réductions du temps de travail”. Ça va dans la même direction.
Le télétravail sera encouragé, mais ne sera pas obligatoire. Les deux partis se rejoignent sur ce point. “Nous n’avons ni le droit, ni l’obligation de télétravailler”, c’est le leitmotiv du CSV. Pour lui, le télétravail “se fait toujours sur la base d’un accord mutuel entre salariés et employeurs.” Le DP voit aussi la chose comme ça.
Reste aussi à clarifier le rôle de la tripartite, le fameux modèle du dialogue social luxembourgeois qui réunit patronat, syndicats et représentants du gouvernement autour de la même table en cas de crise majeure. Comme lors de la poussée inflationniste de 2022 qui a fait exploser les prix de l’énergie et les prix à la consommation. CSV et DP sont pro-tripartite et considèrent que c’est l’instrument de crise par excellence.
Mais une note discordante est apparue en fin de campagne dans la bouche de Xavier Bettel. Le candidat du DP avait annoncé dans un face-à-face télévisuel sur RTL qu’il “organiserait une tripartite directement à la fin de cette année pour discuter des différents scénarios (de réformes fiscales) avec les partenaires sociaux”. Luc Frieden ne partageait pas du tout cette vision. Il est d’avis que “la politique fiscale, et notamment la suppression d’une classe d’impôt, est une décision politique”.
Les deux partis devront donc s’accorder sur leur approche et une utilisation plus généralisée de la tripartie -comme prônée par le DP- ou pas, à l’avenir.
Si CSV et DP écartent d’office l‘impôt sur la fortune pour les particuliers, ça coince en revanche sur la vision des deux partis quant à la politique fiscale à mener à l’avenir.
Les deux partis sont d’accord sur la nécessité de mener une réforme fiscale d’ampleur au Luxembourg, mais pas à la même vitesse. L’objectif de la réforme est de gommer les classes d’impôt (1, 1a et 2) au profit d’une imposition individuelle plus juste. Le système actuellement en vigueur avantage les couples tandis que les célibataires, les veufs et les monoparentaux en sont les oubliés.

Une “injustice structurelle” à laquelle le DP veut mettre fin en “introduisant une classe d’impôt unique qui traite tous les modes de vie à égalité”, “à moyen terme”. Le CSV est prêt à discuter de la suppression des classes d’impôts et veut présenter des mesures fiscales “de grande envergure dès la première année” de la nouvelle législature. Sa grande promesse électorale est de “réduire le plus rapidement possible la charge fiscale des citoyens”, notamment de la classe moyenne. Le DP refuse toute “hausse générale de l’impôt sur le revenu”.
Les deux partis veulent adapter le barème d’impôt à l’inflation. “Par étapes” pour le CSV. “Régulièrement” pour le DP.
Les deux partis, s’ils décident de gouverner en tandem, ont du travail pour s’accorder sur la politique familiale. Le CSV a surtout promis d’accorder aux parents d’enfants en âge de scolarité fondamentale le droit à quatre heures parentales non rémunérées par semaine. Il veut aussi apporter un soutien financier aux parents qui élèvent leurs enfants à la maison jusqu’à la scolarité obligatoire, en doublant l’allocation familiale pour chaque enfant. Le CSV a promis davantage de flexibilité pour le calendrier et la durée du congé parental.
Le DP s’engage pour l’extension du congé parental jusqu’à trois mois, et pour faire passer le congé de paternité de dix à quinze jours. Les couples homosexuels doivent évidemment également pouvoir recourir à ce congé. À l’avenir, le DP indexera régulièrement l’allocation familiale.
La façon de mener une politique climatique, reste l’autre sujet compliqué. Les deux partis veulent développer massivement les énergies renouvelables d’”ici 2030” se fixe le CSV. Par contre, ce sera une “priorité absolue” pour le DP qui veut investir massivement dans l’éolien et le solaire et accélérer clairement les procédures d’autorisation des projets énergétiques.
Concrètement, le DP compte rendre l’installation de panneaux photovoltaïques obligatoire sur tous immeubles résidentiels neufs et promouvoir leur installation sur les parkings, le long des autoroutes ou encore le long des voies ferrées. De son côté, le CSV veut exploiter pleinement le potentiel de l’énergie solaire “sur les surfaces scellées” et “encourager le développement de la photovoltaïque au niveau des particuliers et des entreprises par des incitations fiscales”. Beaucoup d’idées pour capter l’énergie du soleil, encore va-t-il falloir rayonner dans la même direction politique.
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