On aurait tendance à croire que la lutte contre le changement climatique serait exclusivement une préoccupation des Verts (déi gréng). Cependant, dans la pratique, c'est plus compliqué que ça. Si les engagements de chaque parti ne se valent pas forcément, nombreux sont ceux qui annoncent des mesures plus ou moins radicales pour combattre le changement climatique.

Moins polluer, protéger les forêts, développer les énergies renouvelables, économiser l'eau, préserver la biodiversité, investir dans la mobilité douce: tant d'engagements que l'on retrouve dans quasiment tous les programmes électoraux.

Si chaque parti propose une version personnalisée des moyens à employer pour lutter contre le changement climatique, ils n'ont pas tous osé brusquer les électeurs avant le jour J.

Nous avons épluché les programmes des huit grands partis du pays afin d'identifier les mesures qui sortent du lot à l'approche des élections législatives.

Les Verts n'ont pas froid aux yeux 

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Spécialistes en la matière, déi gréng ont pris les devants en annonçant vouloir protéger 30% du territoire national et créer de nouvelles réserves naturelles.

Rappelons que le pays est actuellement plongé dans une crise du logement et qu'il peine déjà à mobiliser des terrains pour construire. Et ils vont plus loin.

En effet, les Verts veulent réviser le droit de préemption des pouvoirs publics "afin d’étendre la possibilité d’acheter en priorité des terrains revêtant une importance écologique particulière".

Ils évoquent également l'introduction d'une taxe nationale sur l'imperméabilisation des sols. Cela dans le but de limiter l'exploitation des sols.

Les Verts comptent aussi étendre les surfaces sans pesticides et introduire des valeurs minimales pour les espaces verts et aquatiques dans les zones urbaines.

Tant de mesures restrictives qui risquent de décourager une partie de l'électorat luxembourgeois. Mais le parti ne s'en cache pas, protéger l'environnement reste sa priorité.

La mesure qui sort du lot: déi gréng veut créer une "Green Valley" pour accueillir les entreprises de la "Green Tech", comme les fabricants de batteries, de panneaux solaires ou de turbines au Luxembourg.

Le LSAP prend des risques (mesurés)

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On le sait, la protection de l'environnement et la lutte contre le changement climatique n'est pas une priorité pour tout le monde. C'est d'ailleurs souvent la question qui fâche quand on évoque l'avenir du Luxembourg. Conscient d'évoluer en terrain miné, le LSAP n'a pourtant pas hésité à se positionner sur la question.

Le parti socialiste annonce notamment vouloir réduire le trafic aérien à coup d'interdictions. Les jets privés "ne faisant pas l'objet d'une exploitation commerciale" pourraient être les premiers visés. Le LSAP se dit également en faveur de l'interdiction des vols commerciaux dont la destination est atteignable en moins de trois heures de train.

Il ne cache pas non plus son intention d'accélérer le passage à l'électromobilité en recourant à des incitatifs fiscaux. Une prise de position qui pourrait lui coûter quelques votes ce dimanche.Dans ce contexte, le LSAP rappelle l'importance de donner le bon exemple en menant à bien l'électrisation de la flotte de véhicules publics.

Le parti socialiste fait également de la préservation de l'eau et de sa qualité une de ses priorités. Il préconise des investissements dans le traitement de l'eau de la Moselle afin de prévenir d'éventuelles pénuries. Il compte également inciter les entreprises à faire des économies d'eau en réhaussant la taxe sur les eaux usées.

La gestion de l'eau pourrait même devenir un critère d'autorisation pour les nouvelles zones de construction, si le LSAP a son mot à dire dans la prochaine législature.

Des mesures qui restent dans la continuité de ce qui avait été amorcé lors du dernier quinquennat mais qui devraient faire grincer des dents dans certaines sphères de la société luxembourgeoise. 

La mesure qui sort du lot:
mettre en place un plan d'action pour développer de l'hydrogène vert au Luxembourg. Rien de concret n'est annoncé dans le programme du LSAP si ce n'est qu'une analyse de potentiel doit d'abord être réalisée avant d'avancer sur cette piste.

Le DP mise... sur l'énergie solaire 

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Miser sur l'énergie solaire, ça peut paraître contre-intuitif dans un pays qui présente un taux d'ensoleillement inférieur à 40%. Et pourtant, c'est le pari que veut tenir le parti démocrate. En effet, dans la partie "durabilité" de son programme, de nombreuses initiatives sont liées à l'exploitation de cette énergie renouvelable.

Le DP ambitionne par exemple de rendre l'installation de panneaux photovoltaïques obligatoire sur tous immeubles résidentiels neufs. Il veut également mobiliser les surfaces disponibles sur le toit des bâtiments existants et faire des installations "PV" une norme sur les entrepôts du pays.

Et il ne s'arrête pas là. Le parti démocrate veut promouvoir leur installation sur les parkings, le long des autoroutes ou encore le long des voies ferrées. Il "encourage" également la mise en place de centrales électriques de balcon sans cependant évoquer d'éventuels incitatifs ou financements étatiques.

Le DP indique vouloir développer des parcs éoliens ainsi que les capacités du pays à stocker de l'électricité, tout cela dans le but de s'affranchir de sa dépendance aux énergies fossiles et nucléaires.

Le parti démocrate s'oppose d'ailleurs fermement à la construction de nouvelles centrales nucléaires et veut, à terme, obtenir la fermeture de la centrale de Cattenom.

La mesure qui sort du lot: la sortie "progressive" du tourisme à la pompe. Très lucratif en termes de recettes fiscales, le DP considère qu'il est "indispensable" d'en sortir mais n'a pas encore trouvé la solution pour compenser la perte budgétaire que cela impliquera.

Pour les Pirates, mieux vaut encourager que punir

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Parmi toutes les idées avancées par le parti pirate, c'est bien celle d'un bonus climatique qui pose le plus de questions.

Les Pirates disent vouloir encourager les citoyens à être plus respectueux de l'environnement en introduisant une aide directe, ajoutée aux salaires, de 50 euros par mois.

Ils n'abordent cependant pas la question du financement de cette aide ni comment celle-ci est censée inciter les résidents à adopter des comportements plus respectueux de l'environnement.

Le parti pirate veut également instaurer un système où les 2.000 premiers litres d'eau seraient gratuitspour tous les résidents pays chaque mois.

Au-delà, le prix devrait augmenter progressivement indiquent les Pirates qui ne précisent pas en quoi cela doit contribuer à lutter contre le changement climatique. La mesure est pourtant listée sous "protéger l'environnement, le climat et la nature".

Un programme climatique qui n'a pas de quoi fâcher grand monde mais qui risque d'en laisser certains perplexes.

La mesure qui sort du lot: la vente sans TVA des poissons provenant d'élevages locaux et biologiques. Voilà qui inciterait les résidents à consommer local et donc à réduire l'importation de poissons venant de pays lointains.

L'ADR ne ferme aucune porte

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C'est probablement ce qui démarque l'ADR dans le contexte de la lutte contre le changement climatique: le parti nationaliste ne ferme pas la porte à l'énergie nucléaire. Ils vont même plus loin en affirmant vouloir soutenir la recherche dans le domaine de la fusion nucléaire en Europe.

Ils ne ferment pas la porte aux énergies renouvelables mais considèrent l'idée d'un approvisionnement en énergie à 100% renouvelable comme "illusoire". Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans la région, l'ADR croît en une approche coopérative et pense qu'il faudrait concentrer les efforts là "où il y a le plus d'émissions".

D'après le parti nationaliste, il faudrait avant tout moderniser les anciennes centrales électriques situées à l'étranger avant de s'attaquer aux adaptations à entreprendre sur le réseau luxembourgeois. À long terme, l'ADR considère un reboisement à grande échelle comme "une initiative très judicieuse".

La mesure qui sort du lot: l'ADR le souligne, ils n'ont pas l'intention de d'imposer les "énergies alternatives" et ils n'interdiront pas le moteur à combustion.

Pour Fokus, l'Etat doit avancer l'argent

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Parmi les idées avancées par Fokus, c'est bien celle du "tiers payant" dans la construction de logements qui est la plus intrigante. En clair, le parti politique propose un système d'aides qui seraient avancées aux ménages comptant s'équiper de panneaux solaires ou voulant rénover leur logement.

Fokus se positionne en faveur des énergies renouvelables, en particulier l'hydrogène, mais ne "souhaite pas participer à l'hostilité générale" envers l'énergie nucléaire. Il n'est pas non plus en faveur de l'interdiction des moteurs à combustion, au vu de l'avenir que l'on prédit aux carburants synthétiques.

Le parti Fokus évoque également l'importance d'une agriculture solide, durable et économiquement saine afin de contribuer à une autonomie alimentaire qui, à son tour, délesterait le pays d'une grande charge CO2 (importations, transport de nourriture...). Il n'indique cependant pas comment il compte atteindre cet objectif.

La mesure qui sort du lot: Fokus veut attirer des institutions et des structures innovantes au Luxembourg. L'exemple de la banque de l'hydrogène prévue par l'UE est évoqué.

Si certains partis politiques ne sont pas listés dans cet article, c'est parce qu'ils n'annoncent pas de mesure osée ou originale pour lutter contre le changement climatique.