Nous vivons une époque extrêmement complexe et angoissante. Guerres, attaques terroristes, tensions religieuses, crise climatique... Les peurs et incertitudes liées à cette actualité anxiogène ont entraîné une flambée de fausses informations et de rumeurs conspirationnistes.
Mais pourquoi les théories du complot se répandent-elles si vite, en Europe et dans le monde ?
Sur Internet, la déferlante de fake news et de théories conspirationnistes est massive. Et les réseaux sociaux et leurs algorithmes n’ont fait que renforcer leur diffusion.
Malgré les progrès scientifiques et l’accès à des informations fiables, certaines personnes continuent d’adhérer à des idées non fondées ou à des théories du complot. Les personnes qui croient que la Terre est plate, qu’il y a des micropuces dans les vaccins, des clones de présidents, qui nient des événements historiques comme le 11 septembre ou croient que “la pandémie de Covid 19, c’est du bidon” sont influencées par des facteurs psychologiques, sociaux et culturels.
N’en déplaise aux “platistes”, on sait que la terre est ronde depuis fort longtemps. Le philosophe et mathématicien Ératosthène avait même déterminé la circonférence de la Terre (à 2-3% d’erreur près) au IIIe siècle avant Jésus Christ ! Le tout en utilisant la trigonométrie et des mesures de distance.
Aujourd’hui, des collectes de fonds sont lancées pour “prouver que la terre est plate”. Le youtubeur américain Logan Paul - très populaire mais aussi très controversé - fait le buzz en surfant sur ces thèses. En janvier 2018, une étude de l’Ifop avançait que 9% des Français croyaient “possible que la Terre soit plate et non pas ronde comme on nous le dit depuis l’école”.
Selon des chercheurs de l’université de Cambridge, ces personnes vont au-delà d’un simple manque de connaissances, car elles ont tendance à rechercher des informations qui confirment leurs croyances préexistantes, en ignorant ou en rejetant les preuves contraires. Par exemple, un adepte du platisme peut se concentrer uniquement sur des vidéos ou des articles qui “prouvent” son point de vue, tout en rejetant les images satellites et les données scientifiques.
Des études menées par l’Institut pour le dialogue stratégique montrent que, en période de crise ou d’instabilité, les théories du complot fournissent des explications simplifiées à des événements complexes. Croire qu’une “élite secrète” contrôle le monde, par exemple, peut sembler plus compréhensible que d’accepter la complexité et le caractère aléatoire de la réalité.
Le complotisme est partout et touche tout le monde. “Il y a les radicaux et les plus soft, vous, moi, tous ceux qui à un moment se disent: on nous ment”, estime Marie Peltier, auteure de plusieurs livres sur le sujet.
“Le climat de défiance vis-à-vis des institutions, des médias, s’est diffusé dans toutes les sphères, universitaires, associatives, politiques”, constate-t-elle, relevant trois grands marqueurs de l’histoire du complotisme au XXIe siècle: les attentats du 11 septembre 2001, gigantesque traumatisme collectif, “gros événement structurant pour le conspirationnisme contemporain"; le développement des réseaux sociaux; et “aujourd’hui, le Covid, qui agit comme un immense révélateur”.
“Le conspirationnisme donne un logiciel explicatif, il désigne des héros, des coupables, c’est une grande partie de son succès”, souligne-t-elle.
Le conspirationnisme peu avoir des répercussions sont très concrètes. La preuve avec le mouvement QAnon, cette mouvance d’extrémistes pro-Trump persuadés de lutter contre des élites pédophiles et satanistes, devenue un véritable phénomène de société aux Etats-Unis.
Nombre de QAnon figuraient parmi la foule ayant attaqué le Capitole le 6 janvier 2021.

Internet et les réseaux sociaux peuvent renforcer ce phénomène en créant des communautés qui valident ces récits. L’adhésion à des théories non prouvées procure souvent un sentiment d’appartenance à une communauté.
Selon l’Oxford Internet Institute, les forums en ligne et les groupes sur les réseaux sociaux créent des bulles dans lesquelles les croyances se renforcent mutuellement, renforçant ainsi l’identité du groupe.