Fatima Rougi est née au Maroc, a grandi en Corse et s'est épanouie au Luxembourg, dans le journalisme et la communication. Si elle sait qu'elle est un symbole de l'ouverture du pays, cette militante pour les droits des femmes n'hésite pas à pointer les failles du Grand-Duché.

Je monte, je monte… Mes parents se sont dit que j’allais finir au Pôle Nord !” Le soleil marocain et le ciel azur corse semblent bien loin, en 2025, alors que Fatima Rougi s’affaire dans les allées du superbe bâtiment de la Philharmonie Luxembourg dont elle est désormais l’attachée de presse.

Née à Temsamane au Maroc, Fatima n’y a passé que la première année de son existence. C’est en Corse qu’elle a grandi et qu’elle a été scolarisée, avant d’entamer des études qui l’ont menée à Aix-en-Provence, Grenoble puis Paris.

En France, elle rencontre un Luxembourgeois avec lequel elle décide de s’installer au Grand-Duché il y a une quinzaine d’années. Sa première expérience professionnelle est un poste de journaliste pour un média luxembourgeois, mais une autre aventure tente Fatima : “C’est vrai que j’ai travaillé assez longtemps dans le journalisme, mais dans ma tête, j’avais toujours la culture.” Cette dernière rejoint le service communication et presse de la Kulturfabrik à Esch où elle officie durant sept ans.

Depuis 2024, Fatima Rougi a relevé un nouveau défi, celui d’assurer la mission d’attachée de presse de la Philharmonie, “l’un des lieux culturels que j'affectionne le plus au Luxembourg.”

Derrière ce parcours professionnel exemplaire s’inscrit un activisme de militante. Désireuse de s’investir davantage dans la société luxembourgeoise, Fatima intègre le conseil d’administration du planning familial en 2015, un lieu qui a beaucoup de sens pour la jeune femme. C’est au planning, dans son adolescence en Corse, que Fatima est allée chercher les réponses aux questions qu’elle n’osait poser dans une famille plutôt religieuse et conservatrice.

Au Luxembourg, Fatima peut se targuer d’être à l’origine d’un changement de législation sur les produits menstruels - TVA passée de 17% à 3% - à la suite d'une campagne orchestrée avec le soutien du planning en 2019. “On limite souvent le planning à ses actions en rapport avec l’avortement et les grossesse non désirées, mais ce qu’on oublie souvent, c’est que le planning fait énormément dans les écoles, les foyers, les maisons de retraite… Dans tous les endroits où se manifeste le besoin d’éducation sexuelle et affective.”

"On reste quand même dans un pays qui est très conservateur"

Elle le dit elle-même, Fatima a plusieurs identités et le Luxembourg est l'une d'elles, un pays “très différent de ce qu’il laisse paraître… Un peu comme moi !”. D’ailleurs elle n’hésite pas à pointer les failles de son pays d’adoption, qui “se prétend sans problèmes, alors que pas du tout. Au Luxembourg, on va pas se mentir, on peut quand même avoir ce constat global qu'on est plutôt bien lotis. Mais on reste quand même dans un pays qui est très conservateur, qui vient d'une grande tradition catholique. Du coup, il y a encore de gros efforts à faire sur une détabouisation de certains sujets, les menstruations, tout ce qui est lié à l'avortement, le corps des femmes, la contraception, la stérilisation aussi.

Désormais totalement investie dans la société luxembourgeoise, Fatima Rougi n’oublie pas ses origines : “La Corse m’a construite. Il y a des valeurs qui sont très corses en moi.”