Une vice-présidente grecque et un ex-eurodéputé italien arrêtés... La finale de la Coupe du monde n'aura pas suffi à éclipser l'affaire de corruption qui secoue le Parlement européen. Réactions indignées dans la capitale belge.

Il va falloir frapper fort car l'impact sur l'opinion est déplorable.

Jeudi dernier à Strasbourg, les eurodéputés ont voté à la quasi-unanimité un texte dans lequel ils demandent "instamment la suspension des titres d'accès des représentants d'intérêts qatariens" le temps de l'enquête. Cette décision de la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, est arrivée rapidement après la révélation d'une enquête autour de soupçons de corruption impliquant notamment une vice-présidente du parlement européen, la Grecque Eva Kaili, et un ex-eurodéputé italien, Pier Antonio Panzeri.

"La décision d'imposer au Qatar une restriction aussi discriminatoire, limitant le dialogue et la coopération avant la fin de la procédure judiciaire, aura un impact négatif sur la coopération régionale et mondiale en matière de sécurité, ainsi que sur les discussions en cours sur la rareté et la sécurité énergétiques mondiales", a réagi dimanche un diplomate qatari.

Le Qatar, qui "rejette fermement" les accusations dont il fait l'objet, regrette "les jugements fondés sur les informations inexactes révélées par des fuites sans attendre la conclusion de l'enquête", a affirmé le diplomate qatari dans un communiqué.

Alors qu'il n'est pas le seul pays cité dans l'enquête ouverte par la Belgique - le Maroc serait également impliqué -, les critiques et les attaques ciblent "exclusivement" le Qatar, a-t-il estimé.

Les mesures du Parlement européen à l'encontre du Qatar, dont l'accès à l'assemblée pourrait être bloqué dans le cadre de cette affaire de corruption présumée, auront un "impact négatif" sur les relations avec le riche émirat gazier et l'approvisionnement mondial en énergie, a prévenu Doha dimanche.

"QUAND ON VOIT 55.000 LOBBYISTES À BRUXELLES, CE NE SONT PAS 55.000 ÉLUS"

L'ouverture d'une enquête à Bruxelles visant notamment l'eurodéputée grecque Eva Kaili, soupçonnée d'avoir été payée par le Qatar pour défendre les intérêts du pays qui a accueilli le Mondial de football, a ébranlé l'institution.

L'implication présumée de l'émirat dans ce scandale, et les nombreuses controverses sur le Mondial - au sujet du respect des droits humains ou de l'écologie - n'ont pas découragé le président français, Emmanuel Macron, de se rendre à Doha pour participer à la finale opposant dimanche la France à l'Argentine.

Dans les rues de Bruxelles, capitale européenne, on est particulièrement heurté par ces révélations.

"Oui... Honteux, évidemment, nous a confié une Bruxelloise. Qu'est-ce que vous voulez qu'on dise ? On se dit que c'est notre argent qui part dans la poche de gens qui en gagnent déjà pas mal chaque mois. Donc, insupportable, je dirais."

Plus loin, ce sont de jeunes étudiantes impatientes que leur génération arrive aux manettes pour changer la donne: "C'est une mauvaise nouvelle pour la génération qui suit déjà parce que la politique en ce moment n'a pas une très bonne image - on va dire ça comme ça - que ce soit de droite, de gauche, centriste."

D'autres sont plus désabusés, comme ce citoyen sans illusions: "Il faut faire un ménage, c'est tout. De toute manière, ça fait longtemps qu'il y a de la corruption en Europe, en Belgique, aux institutions européennes. On sait que c'est l'argent... Quand il y a 55.000 lobbyistes à Bruxelles, ce ne sont pas 55.000 élus ! Voilà... C'est un mauvais film mais c'est la réalité."

"QUAND ON VOIT CE QU'IL SE PASSE AU PARLEMENT WALLON, ON S'INTERROGE AUSSI"

Les Belges se seraient bien passés de cette affaire au moment où une autre mauvaise "histoire belge" concerne les mauvaises pratiques du parlement wallon et alimente la défiance à l'encontre des politiques dans le Royaume:  "Quand on voit ce qu'il se passe au parlement wallon, on s'interroge aussi. Des histoires de voyages surfacturés, des dépenses qui n'ont pas été contrôlées, un greffier qui est parti en vrille et qui a fait des dépenses phénoménales. Donc l'un et l'autre, ça ne donne pas vraiment confiance."