Chambre des salariés"Nous n'étions pas vraiment satisfaits du ministre du Travail"

Annick Goerens
traduit pour RTL Infos
Mardi matin, RTL recevait le directeur de la Chambre des salariés. Il a été question du plan national de lutte contre la pauvreté, mais Sylvain Hoffmann est également revenu sur la démission du ministre du Travail, Georges Mischo.
© Annick Goerens

“Ce n’est un secret pour personne que les représentants des travailleurs n’étaient pas très satisfaits du ministre du Travail, pour l’exprimer poliment”, a déclaré mardi sur RTL le directeur de la Chambre des salariés (CSL), Sylvain Hoffmann. La collaboration a été difficile et, en conséquence, la Chambre des salariés n’a émis ces derniers mois que des avis négatifs sur les projets de loi. Avec Marc Spautz, qui devrait succéder à Georges Mischo, la CSL espère désormais “un dialogue social d’égal à égal et la mise en œuvre de certains projets, comme la directive sur le salaire minimum ou la directive sur les plateformes”.

Plan national de lutte contre la pauvreté : “Une bonne chose qu’il soit enfin en place”

C’est une bonne chose que le nouveau plan national de lutte contre la pauvreté soit enfin en place”, a déclaré Sylvain Hoffmann. C’était “une revendication de longue date” de la Chambre des salariés, et les 106 mesures montrent qu’il y a “un réel besoin”. La Commission européenne a d’ailleurs régulièrement mis “une mauvaise note au Luxembourg dans le domaine social” ces dernières années. C’est donc bien d’avoir une approche globale. Parmi les points positifs figure notamment “l’augmentation des allocations familiales d’environ 15 %". Soit 45 euros par mois pour les jeunes enfants et 60 euros pour les plus âgés. Il existe sur ce point “un retard important, d’au moins 10 %, car il est question de réindexer les allocations familiales depuis 2014”. Toutefois, cette “mesure relativement simple à mettre en oeuvre aurait pu être anticipée et appliquée dès 2026", au lieu de 2027. Il faut savoir que, “pour les enfants, les inégalités sociales sont en grande partie responsables des inégalités scolaires”.

Précisément en matière de travail, il aurait fallu aller plus loin

Le volet consacré au travail” précisément, un élément “central dans la lutte contre la pauvreté, est très faible”, regrette Sylvain Hoffmann. “Il faut notamment mettre en œuvre la directive sur le salaire minimum, et c’est cruellement nécessaire au Luxembourg, car nous avons le taux le plus élevé de travailleurs pauvres en Europe.” Et il va de soi que “des parents pauvres font des enfants pauvres”. Relever le salaire minimum profitera aussi aux enfants. Actuellement, “au Luxembourg, le salaire minimum est inférieur au seuil de risque de pauvreté, au budget de référence du Statec, ainsi qu’aux recommandations de l’UE, et il doit donc impérativement être augmenté”, exige le directeur de la CSL. Il ne faut “pas tenter, comme l’a fait Monsieur Mischo, de contourner cela avec d’autres méthodes de calcul”.

Pauvreté des seniors : il aurait fallu augmenter la pension minimale

Le plan de lutte contre la pauvreté prévoit une mesure spécifique pour les ménages comprenant une personne âgée de 65 ans et plus ou percevant une pension, mais la Chambre des salariés aurait préféré que la pension minimale soit augmentée. Il n’est pas normal qu’après avoir travaillé 40 ans, un retraité soit exposé au risque de pauvreté à cause de sa pension. L’augmentation de la pension minimale bénéficierait surtout à de nombreuses femmes. Malheureusement, “il est toujours vrai que les femmes ont des retraites beaucoup plus faibles et touchent bien plus souvent la pension minimale”. Un autre avantage de cette hausse serait que les frontaliers pourraient en profiter. La mesure prévue, en revanche, ne bénéficiera qu’aux résidents luxembourgeois.

Quid des mesures en faveur du logement ?

En matière de logement, Sylvain Hoffmann espérait aussi des mesures plus concrètes. Des mesures importantes et utiles sont prévues, comme la simplification administrative, mais les problèmes structurels ne sont pas abordés. Il faut également faire davantage pour le logement abordable, mais le budget ne prévoit pas grand-chose à ce sujet. “Rien n’est entrepris contre la spéculation et aucune incitation n’est prévue pour que de nouveaux terrains arrivent sur le marché. Des projets sont certes dans les tuyaux, mais il faut enfin entreprendre quelque-chose pour lutter contre les terrains et logements vacants.” Par ailleurs, les loyers ont explosé ces dernières années, et là encore, “aucune mesure concrète n’est prévue pour freiner cette hausse”.

Pour lutter contre la pauvreté, nous devons aussi cibler la richesse

Lorsqu’on parle de pauvreté, il faut aussi parler de richesse.” Et ce n’est pas le cas dans ce plan. Il existe pourtant de nombreuses options, notamment une imposition plus forte des revenus élevés dans le barème unique, qui doit être introduit. “Les revenus du capital devraient également être davantage taxés, car au Luxembourg ils sont souvent exonérés ou très faiblement imposés par rapport aux salaires. Et je pense qu’il faudrait aussi s’attaquer au patrimoine, via un impôt sur les successions ou un impôt sur la fortune, car sur ce point, nous sommes très, très faibles au Luxembourg”, a déclaré Sylvain Hoffmann.

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