Alors que la Cour des Comptes vient de rendre un rapport sévère sur le modèle économique du ski français, jugé fragile dans la perspective du changement climatique, de nombreuses stations de moyenne altitude souffrent du fort redoux que connaît le pays avec des températures parfois record en montagne. “Maintenant, les mauvaises saisons, c’est presque tous les ans” résume un habitant.
Tandis que les vacances d’hiver, cruciales pour les stations, démarrent, nombre d’entre elles ont dû fermer une partie de leurs pistes et remontées mécaniques faute de neige, voire sont à l’arrêt dans l’attente des flocons. Les 23 stations du massif des Vosges subissent un enneigement aléatoire, saison après saison, quand seules la moitié d’entre elles sont dotées de canons à neige.
A Gérardmer, l’une des deux plus importantes stations du massif, l’exploitation est confiée à la municipalité depuis 2008. “À l’époque, c’était ça ou la station fermait”. Mais le modèle, qui ne repose aujourd’hui que sur les deniers de la commune, “n’est plus tenable”, selon le maire Stessy Speissmann-Mozas.
Depuis trois ans, les finances sont négatives, ce qui force l’édile à “remettre entre 1 et 2 millions d’euros” chaque année pour compenser le manque à gagner. Et cette année, c’est encore pire, il va falloir mettre 3 millions d’euros au bout pour équilibrer les comptes.
Le dérèglement climatique, “incontestable” pour M. Speissmann-Mozas, donne régulièrement des “inversions de température, de la pluie, du vent” en janvier, “capables en deux ou trois jours de balayer totalement le manteau neigeux”, ou encore des “saisons de plus en plus courtes”.
La plupart des stations ont un front de neige compris entre 800 et 1.200 mètres d’altitude, ce qui ne garantit pas un enneigement tout l’hiver. Pour ne rien arranger, certaines ont vu leurs dépenses “multipliées par deux ou trois” avec l’augmentation des tarifs de l’énergie.
“Il n’y a pas de neige sur les massifs de moyenne montagne (Vosges, Jura, Massif central)”, résume MétéoFrance dans un point mercredi.
Pour les stations de ski des Vosges, les mauvaises années se succèdent. À Gérardmer ou à la Bresse, on ne roule plus sur l’or blanc. Ces stations sont obligées de s’adapter au changement climatique et repensent leurs offres pour s’assurer un avenir économique.
Les réservations sont en chute libre dans certains massifs comme le Jura, les Vosges et le Massif Central avec des reculs de plus de 40% en février sur un an, selon une récente étude du groupe PAP Particulier à Particulier.
Ces massifs “font les frais du contexte d’inflation, de manque d’enneigement et des blocages routiers des dernières semaines” et “sont possiblement en train de laisser la main aux grandes stations des Alpes”, explique sa directrice générale Laetitia Caron.
“L’enneigement est un des premiers sujets, les gens veulent se garantir le fait d’avoir des bonnes conditions”, faute de quoi ils sont prêts à “renoncer complètement au séjour” et même à partir à la mer à la place, souligne-t-elle.
Une étude, “ClimSnow”, réalisée en partenariat avec Météo-France, propose trois scénarios d’enneigement d’ici à 2050. Le plus optimiste table sur une augmentation de 1,5 degré dans le massif, quand le pire prévoit un réchauffement de 4 degrés.
Dans tous les cas, la température hivernale, de décembre à avril, “augmente” de manière “homogène pour toutes les altitudes”, selon le rapport, ce qui entraîne, au long du XXIe siècle, “une baisse notable de l’enneigement”.