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Avec la hausse des taux, l'évolution des prix et les nouvelles aides annoncées par le gouvernement, l'équation a considérablement changé pour les acheteurs au Luxembourg. Acquérir une maison coûte aujourd'hui beaucoup plus cher qu'il y a deux ans.
Acheter un bien immobilier n'est plus à la portée de tout le monde au Luxembourg. C'est un fait depuis quelques années. En effet, le dernier épisode de hausse des prix a exclu de nombreux résidents du "rêve immobilier". Ceci dit, ils étaient encore nombreux à pouvoir prétendre à la propriété avant la hausse des taux d'intérêt.
Aujourd'hui, malgré les aides annoncées par le gouvernement au mois de janvier,c'est devenu une toute autre affaire d'acheter au Grand-Duché. Surtout quand il s'agit d'acquérir une maison "sur plan". C'est d'autant plus compliqué lorsqu'on veut s'installer autour de la capitale luxembourgeoise. Et pourtant ce n'est pas l'offre qui manque en ce moment.
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Une maison à 1,5 millions d'euros

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Pour déterminer ce que coûte une maison aujourd'hui, nous avons pris contact avec le CEO de Credihome, Vincent Quillé. Ensemble, nous avons estimé le coût moyen d'une maison sur plan "finie" à 1,5 millions d'euros. Dans ce contexte, il nous confirme que les taux fixes sur 30 ans "se situent actuellement entre 3,8 et 3,9%". Ce sont les bases que nous avons pris pour calculer les mensualités à assumer par un éventuel acquéreur.
S'il s'agit d'un primo-accédant, "ce qui est invraisemblable dans le cas d'une maison au Luxembourg" rappelle Vincent, il peut profiter de l'intégralité du "nouveau" Bëllegen Akt et payer une grande partie de ses frais d'enregistrement. Il peut également se présenter avec un apport minimum, estimé à 20.000 euros pour ce type de transaction.
Dans ce cas, "le client doit gagner entre 15.000 et 16.000 euros net par mois", calcule Vincent Quillé. En effet, ses mensualités s'élèveraient approximativement à 7.000 euros et les banques ne prennent généralement pas beaucoup de risque en ce qui concerne le taux d'effort.

Vincent Quillé, CEO de Credihome
À noter qu'il est plus intéressant d'acheter à deux pour partager la mensualité et profiter des 80.000 euros de Bëllegen Akt offerts par l'Etat en 2024.
"Si l'on prend une situation plus classique, pour une maison à 1,5 millions d'euros, je m'attends à ce que le client mette un apport d'au moins 200.000 euros sur la table", explique le CEO de Credihome. Les mensualités seraient alors de l'ordre des 6.000 euros et le client ou le ménage devrait gagner 13.600 euros net par mois.
Des montages qui ne sont possibles que si la banque accepte de les financer. Cela dépend évidemment des liquidités du ménage, des garanties dont il dispose et de son historique auprès de l'institut financier. Vincent Quillé affirme que les banques sont nombreuses à accepter des dossiers où le taux d'effort dépasse les 40%, quand les bases sont solides.
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Et si on voyait plus petit?
Pour ceux que ça ne dérange pas de faire un peu de route, ne vous inquiétez pas. Nous avons pensé à vous en prenant l'exemple d'une maison à 1 million d'euros. Sans apport considérable, les mensualités s'élèveraient actuellement à 4.600 euros par mois. Il faudrait donc un salaire net minimum de 10.500 euros pour pouvoir se permettre cet achat. On reste ici sur un montage à taux fixe sur 30 ans.
Si l'on voit un peu moins grand et qu'on veut rester autour de la capitale, "on peut trouver un bel appartement deux chambres à 750.000 euros", d'après Vincent Quillé. Pour ceux que la vie en appartement ne dérange pas, il est bon de savoir que l'on peut s'en tirer, sans apport conséquent, avec des mensualités avoisinant les 3.500 euros. Pour être "finançable", il faudrait alors un salaire net d'au moins 8.000 euros par mois.
Le problème du neuf

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Pourquoi le marché du neuf a-t-il connu un aussi gros coup de pompe ces derniers mois? Il y a plusieurs facteurs qui entrent en compte, dont les prix qui restent encore très élevés, malgré une activité au bord du gouffre.
Le facteur déterminant reste le délai d'attente et surtout, ce qui va avec. En effet quand on achète sur plan, on accepte généralement d'attendre entre 24 et 36 mois pour que le projet soit finalisé. Dans certains cas plus récents, ce délai a pu descendre jusqu'à 12 mois.
Si c'est une bonne nouvelle, cela n'empêche que les acheteurs doivent continuer à se loger jusqu'à la remise des clés. Avec l'explosion des loyers, c'est devenu moins évident.
Et ce n'est pas faute de flexibilité puisque les banques proposent désormais couramment à leurs clients de ne payer que la part des intérêts de leur prêt pendant la phase de construction. Seulement, ceux-ci ont également fortement augmenté depuis 2022. Concrètement, on peut se retrouver à payer plusieurs milliers d'euros par mois.
Les acheteurs se retrouvent donc à devoir jongler entre le loyer, leur prêt logement et le coût de la vie qui ne cesse d'augmenter. Autant de facteurs qui les détournent du marché du neuf tout en rendant l'existant plus attractif, cela en attendant un changement de paradigme.
Un marché "bloqué"
Vincent Quillé ajoute: "Quand ils achètent une maison à 1,5 millions d'euros, les clients se posent la question. Avec des coûts de financement qui ont triplé, qui va m'acheter ma maison à 2 millions d'euros dans 10 ans? Dans de telles circonstances, pas sûr que ce soit un investissement intéressant."
Pour suivre ce rythme, il faudrait que les salaires augmentent "sérieusement" ou que les taux d'intérêt retombent à des niveaux tels qu'on les a connus en 2020, "ce à quoi j'ai du mal à croire". En clair, il faut arrêter de s'attendre à de très bons rendements sur le logement au Luxembourg. Du moins, tant que la situation ne se sera pas "débloquée" sur le marché du neuf.
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