JobLa Lorraine perd des emplois, le Luxembourg en crée des milliers

Thomas Toussaint
Le marché de l'emploi se porte à merveille au Luxembourg, où les entreprises recrutent à tour de bras. Toute la Grande Région ne peut pas en dire autant.
Photo d'illustration - Le Luxembourg attire des milliers de nouveaux frontaliers chaque année.
Photo d’illustration - Le Luxembourg attire des milliers de nouveaux frontaliers chaque année.
© Alex Kotliarskyi / Unsplash / Domaine public

Croissance insolente pour les uns, pépite économique pour les autres, le Luxembourg affiche depuis plusieurs décennies une santé à faire pâlir d’envie ses partenaires européens. Grâce à un marché du travail ultra dynamique, le pays est, malgré sa taille modeste, un des poumons économiques de l’Europe de l’ouest. En particulier de la Grande Région. Une situation qu’il doit en partie à une main d’oeuvre voisine très abondante, dans laquelle il pioche depuis de nombreuses années.

“La dynamique de l’emploi luxembourgeois se démarque clairement de ses voisins les plus proches” note le Statec dans son rapport d’octobre 2019 sur le travail et la cohésion sociale. “De 2003 à 2017, l’emploi au Grand-Duché a augmenté de quelque 48%, alors que, dans l’ensemble de la Grande Région, on n’enregistre qu’une augmentation de 11%.” Sur le 485.000 postes supplémentaires qui ont vu le jour depuis 2003 dans la Grande Région, 30% ont été créés au Luxembourg, soit 145.500 environ.

Véritable locomotive, le Luxembourg est à la limite d’avoir complètement décroché et semé ses voisins. La Wallonie et le Rheinland-Pfalz ont connu une augmentation de l’emploi supérieure à 10% sur la période 2003-2017, mais c’est loin, très loin des performances luxembourgeoises: +48%. La croissance du Saarland est plus modeste, inférieure à 5%.

Les hauts fourneaux d'ArcelorMittal à Florange, symbole d'une industrie à l'agonie en Lorraine.
Les hauts fourneaux d’ArcelorMittal à Florange, symbole d’une industrie à l’agonie en Lorraine.
© JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

Côté français, la Lorraine fait figure de canard boiteux: environ 50.200 emplois y ont été détruits entre 2007 et 2017.“Le moteur de la croissance de l’emploi est en berne et le nombre absolu de postes en déclin depuis la grande récession de 2008" commente l’institut de statistiques. L’ancienne région française se distingue même de la croissance de l’emploi en France, qui a atteint 10% entre 2003 et 2017. La Lorraine semble toutefois entrevoir le bout du tunnel: elle a réussi à enrayer sa chute en 2015 et 2016, avec une stagnation de l’emploi, avant de créer 2.000 postes de plus en 2017.

L’EMPLOI AU LUXEMBOURG BOOSTÉ PAR LES FRONTALIERS

En rouge, la ligne représentant l'emploi des frontaliers montre une croissance bien plus soutenue que celle des résidents (emploi national) et du pays (emploi intérieur).
En rouge, la ligne représentant l’emploi des frontaliers montre une croissance bien plus soutenue que celle des résidents (emploi national) et du pays (emploi intérieur).
© Rapport travail et cohésion sociale, Statec 2019

Si l’emploi total du Luxembourg a bien augmenté à une allure folle entre 2000 et 2018 (+70%), le nombre de frontaliers a lui explosé (+124%). L’emploi des résidents a connu une très forte hausse, mais bien plus modeste que celle des frontaliers: +43%.

Cette attraction très forte des travailleurs voisins vers le Luxembourg a aussi eu pour conséquence de modifier son marché du travail. Alors que la part des frontaliers était encore limitée à 25% du total de l’emploi en 1995, celle-ci atteint désormais environ 44% en 2018, avec une tendance “légèrement à la hausse”.

Alors, chanceux les frontaliers? Certainement. Mais leur situation est à relativiser. En plus d’être les premiers à profiter et surtout à répondre aux besoins de main d’oeuvre du Luxembourg, ils sont aussi les premiers à subir les ralentissements de son économie. En 2009, lors de la crise financière, la croissance de l’emploi frontalier a été inférieure à celle des résidents. Un phénomène “assez exceptionnel” pour le Statec mai qui rappelle que le marché du travail luxembourgeois n’est pas inébranlable. Depuis la crise, la croissance de l’emploi au Luxembourg, bien que très soutenue, reste plus lente que pendant les années 2000. Il en faudra tout de même plus pour assombrir l’éclat du Grand-Duché: en mai 2019, le nombre de frontaliers y travaillant a dépassé le cap symbolique des 200.000 employés.

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