L'influenceur Franco-Luxembourgeois traverse décidément une très mauvaise passe. Ce lundi, il doit être jugé à Paris, car soupçonné d'avoir détourné de grosses sommes d'argent grâce à des cagnottes humanitaires.
L'influenceur, originaire d'Arlon, qui a passé une partie de sa vie au Luxembourg avant de s'envoler pour Dubaï, est accusé depuis plusieurs années d'escroquerie, d'abus de confiance en lien avec des projets humanitaires.
L'affaire vient de prendre une nouvelle tournure. L'ex-candidat de télé-réalité doit être jugé pour abus de confiance à Paris ce lundi 20 octobre. Il est soupçonné d'avoir détourné plusieurs dizaines de milliers d'euros de cagnottes destinées à des projets humanitaires à Madagascar, pour maintenir son train de vie d'influenceur à Dubaï.
Comme le rapporte BFM, l'affaire débute en décembre 2021, lorsque Dylan Thiry crée l'association "Pour nos enfants". Cet ancien candidat de l'émission Koh Lanta, qui s'y était surtout illustré par les mocassins Gucci ramenés sur les plages cambodgiennes, avait effectué depuis 2020 plusieurs voyages humanitaires avec des associations.
Il décide donc de lancer sa propre association, affirmant qu'elle vise notamment à venir en aide aux enfants dans le besoin.
Deux ans plus tard, ce n'est pas exactement le constat qu'ont fait les enquêteurs de la Brigade de répression de la délinquance astucieuse (BRDA). Selon un rapport d'enquête consulté par BFM, pour financer les opérations humanitaires de son association, Dylan Thiry a lancé trois cagnottes en ligne sur la plateforme Cotizup lors de l'année 2022. En tout, elles ont reçu plus de 250.000 euros.
"Pour Mehdi Mazi, co-fondateur du collectif de victimes d'influenceurs AVI, si ces cagnottes ont reçu autant d'argent, c'est aussi parce que Dylan Thiry s'est donné une "image pieuse", parlant beaucoup de sa religion, l'islam, sur ses réseaux sociaux" écrit BFM.
"Son story-telling, c'était: 'je montre les enfants, je montre que je leur donne à manger, donc faites-moi confiance, donnez-moi de l'argent et je vais leur distribuer", décrit encore Mehdi.
En 2022, l'association est pourtant dissoute, en raison des polémiques autour de l'influenceur, selon les enquêteurs de la BRDA.
Des voitures de luxe et des comptes mélangés
Leur rapport montre que seule une partie de l'argent récolté a effectivement été dépensé lors de ces voyages humanitaires. En 2023, auprès de BFMTV, l'influenceur se défendait en assurant qu'il ne subsistait que 10.000 "sur la totalité de toutes les cagnottes" et que le reste avait bien été dépensé à Madagascar, "sans oublier ce qui sort de (s)a poche".
Mais devant les enquêteurs, il a déclaré n'avoir dépensé au total que 69.000 euros (sur plus de 250.000) à Madagascar pour financer des denrées alimentaires, la construction d'une maison, de puits et l'achat d'un terrain - dont les conditions de cession restent floues, selon l'enquête.
Qu'est-il advenu du reste? Toujours selon BFM, "tout l'argent récolté a été envoyé directement sur le compte courant de Dylan Thiry qui, lui, a effectué d'importantes dépenses personnelles, souligne la BRDA. Sur ses réseaux sociaux, il ne manquait pas d'afficher son cadre de vie luxueux à Dubaï, entre voitures et vêtements de luxe."
En juin 2022, "entre le premier et le second séjour à Madagascar, alors que son compte courant personnel était principalement alimenté par les cagnottes", Dylan Thiry a acheté une Mercedes AMG à plus de 81.000 euros.
Puis, en septembre 2023, "après la dissolution de l'association et après avoir conservé sur son compte courant 72,07% du montant global des dons versé", l'influenceur a décidé de changer de voiture pour s'acheter une Mercedes Class G, occasionnant une "dépense supplémentaire" de plus de 28.000 euros. Avec ce compte courant alimenté en partie par les cagnottes, il a également payé le loyer de son logement à Dubaï, qui s'élevait à 48.000 euros sur l'année 2022, ajoute BFM.
Ses revenus seraient en chute libre
Et ce alors que ses revenus d'influenceur fondaient comme neige au soleil. Ses recettes financières ont diminué de 92,6% entre 2021 et 2023, selon le rapport, passant de 342.000 euros à 25.000 euros annuels.
Il faut dire que l'influenceur accumulait alors les polémiques. Il avait par exemple fait la publicité de compléments alimentaires guérissant "les cellules cancérigeuses" (sic), avait suggéré que des personnes puissent "adopter" un enfant à Madagascar en échange d'une contrepartie économique, ce qui s'apparente à du trafic d'enfant.
Dylan Thiry semble ainsi avoir perdu la plupart de ses revenus issus de ses placements de produits à cette période, également marquée par le vote de la loi influenceurs.
Pour Me Raphaël Molina, qui représente trois plaignants dans ce dossier, "son business a baissé et il a mené cette escroquerie pour continuer à financer son train de vie".
Dylan Thiry n'est pas le seul à être poursuivi dans cette affaire. Son ex-agente et la vice-présidente de l'association "Pour nos enfants", Sandra D. doit également comparaître ce lundi. Selon le rapport de la BRDA, Dylan Thiry et Sandra D. se rejettent mutuellement la faute dans cette affaire, niant avoir agi avec une intention frauduleuse. Malgré leurs liens professionnels, ils ne se sont jamais rencontrés physiquement.
Son avocat, Me Tom Michel, affirme que Sandra D. "est une victime" et "une lanceuse d'alerte", puisqu'elle a également porté plainte en 2023, dénonçant un manque de transparence de la part de l'influenceur sur la gestion de l'association.
L'influenceur risque cinq ans de prison
Contacté, l'avocat de Dylan Thiry, Me Jonathan Bellaiche, a indiqué que ni son client ni lui ne souhaitaient faire de commentaire sur cette affaire. La peine encourue pour abus de confiance est de 5 ans d'emprisonnement et de 375.000 d'amende. Les avocats des donateurs espèrent une condamnation "exemplaire" de l'influenceur.
Sur Instagram, l'influenceur continue de s'afficher en train de nourrir des enfants ou de construire des maisons, sans que l'on sache dans quel cadre ces actions sont réalisées. Une manière pour lui de "redorer son image", pour le collectif AVI. Reste à voir si cela sera encore possible après son procès.
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