Le divorce est une épreuve pour les enfants. Comment les rassurer, préserver leur bien-être et les aider à s’adapter à cette nouvelle réalité ?

Le divorce est une épreuve difficile, non seulement pour les parents, mais aussi – et surtout – pour les enfants. Ces derniers peuvent se sentir déstabilisés, perdus et envahis par des peurs profondes. Pour les aider à traverser cette période, il est essentiel de faire preuve de patience, de bienveillance et de leur offrir un soutien constant.

Lynn Frank, psychologue et présidente du groupe de soutien aux parents Passage, souligne que le divorce peut susciter chez les enfants une peur réelle de l'abandon.

"C'est une inquiétude bien tangible, particulièrement chez les plus jeunes. Ils peuvent craindre d’être laissés de côté par le parent qui part, mais aussi – et c'est souvent sous-estimé – par celui qui reste. Ils se demandent alors : et si lui aussi disparaissait ?"

Cette angoisse peut se traduire par une forte dépendance affective envers le parent présent, voire par une régression dans le comportement : l’enfant cherche davantage d’attention, adopte des attitudes plus infantiles ou développe une anxiété de séparation marquée.

"Ces réactions sont temporaires, mais elles méritent d’être prises au sérieux. Comprendre ce que vit l’enfant, l’accompagner avec douceur et le rassurer sur la stabilité de l’amour parental est essentiel pour l’aider à surmonter cette épreuve", conclut-elle.

Le sentiment d'avoir perdu un parent

Le divorce est une véritable perte pour un enfant, souligne Lynn Frank. "Il est important de reconnaître que le divorce n’est pas un simple événement, mais un processus. Cela prend du temps, et le sentiment de perte et de chagrin peut durer longtemps. D’une certaine manière, cela peut presque ressembler à un deuil."

"Si un parent est absent pendant une longue période, cela peut être vraiment effrayant pour l’enfant. Évidemment, une fois qu’il grandit, c’est différent, mais il faut se rappeler que les jeunes enfants sont en phase de développement. Leur cerveau n’est pas encore entièrement formé, et la logique et l’émotion restent très déconnectées. Comme ils peuvent être très émotifs, ils ont parfois tendance à se blâmer pour le divorce de leurs parents."

Rassurer l'enfant

Mme Frank explique qu’en tant que psychologue, elle rencontre souvent des enfants qui se sentent responsables du divorce de leurs parents.

Elle insiste sur l’importance de les rassurer et d’expliquer, encore et encore, qu’ils n’y sont pour rien. Cette conversation ne doit pas être ponctuelle, mais répétée régulièrement par les deux parents.

"Parfois, les parents pensent qu’il vaut mieux ne rien dire pour protéger leur enfant. Mais un divorce ne se produit pas du jour au lendemain. Il s’inscrit souvent dans une période de turbulences", souligne-t-elle.

Dans la mesure du possible, elle recommande d’impliquer les enfants, surtout s’ils sont plus âgés, en leur expliquant ce qui se passe. L’objectif : les aider à comprendre, tout en leur rappelant qu’ils ne sont en aucun cas responsables.

Ne pas se reposer émotionnellement sur l'enfant 

Elle insiste sur l'importance de ne pas faire de son enfant un médiateur ni de s'appuyer sur lui émotionnellement.

"Les adultes doivent rester des adultes. Un enfant ne devrait jamais être utilisé comme messager ou comme béquille émotionnelle entre des parents séparés."

Elle met en garde contre le risque que l’enfant prenne le rôle de "sauveteur", persuadé qu’il peut recoller les morceaux. Elle souligne aussi qu’il est crucial d’éviter toute critique de l’autre parent en sa présence.

"Un enfant est le reflet de ses deux parents. S’il entend des reproches sur l’un d’eux, il risque de l’intérioriser et de penser que cela s’applique aussi à lui."

Pour l’aider à traverser cette période, elle recommande de préserver au maximum la stabilité et les routines.
"La routine apporte un sentiment de sécurité et de prévisibilité, essentiel pour les jeunes enfants. Essayez de la maintenir dans les deux foyers : heure du coucher, rituels du matin, etc."

Quant aux plus grands, elle conseille de les impliquer pour limiter les perturbations.
"Assurez-vous qu’ils aient toujours leurs affaires essentielles avec eux – une brosse à dents, des jouets – lorsqu’ils passent du temps chez l’autre parent. Cela les aide à mieux s’adapter aux changements."

Favoriser les liens

  

Passer du temps de qualité avec chaque parent est essentiel, souligne Mme Frank.

"Nous encourageons toujours les parents à consacrer des moments en tête-à-tête avec leurs enfants, en les laissant guider les activités. Ce n’est pas forcément un moment de discussion, cela peut être un jeu, un film… L’important, c’est de créer du lien."

Elle invite aussi à rester attentif aux signes de détresse : repli sur soi, agressivité, troubles du sommeil ou difficultés scolaires, qui peuvent apparaître pendant cette période d’adaptation.

"Il faut du temps pour apprivoiser cette nouvelle réalité, ces nouvelles routines et cette nouvelle dynamique familiale. Essayez d’être compréhensif, d’ouvrir le dialogue et, si possible, de maintenir des réunions familiales. Lorsque les deux parents parviennent à montrer une certaine cohérence, cela aide énormément l’enfant."

Plus largement, elle insiste sur l’importance pour les parents de bénéficier eux-mêmes d’un soutien, afin d’être en mesure d’aider leur enfant de façon saine et constructive.

"Pour les familles expatriées, cette période est d’autant plus délicate qu’elles sont souvent éloignées de leur cercle familial et amical. Ce sentiment d’isolement peut être pesant, ce qui rend encore plus crucial l’accès à des conseils professionnels et à des réseaux de soutien."

En faisant preuve de patience, en offrant un accompagnement constant et en plaçant le bien-être de l’enfant au cœur des priorités, les parents peuvent l’aider à traverser cette transition de manière plus sereine.

Ressources utiles :

Kanner-Jugendtelefon (KJT) – Ligne d’assistance aux parents en plusieurs langues
Passage – Groupe de soutien aux parents
Familljen-Center – Centres situés à Bonnevoie et Rollingergrund