C'est ce qu'a souligné le défenseur d'un des accusés au cinquième jour d'audience du procès Bommeleeër bis lundi.

"La piste Geiben est un élément clé de toute l’enquête", estime l’enquêteur entendu lundi, reprenant ainsi la thèse des enquêteurs précédents. Il ne faudrait pas que ce qui s’est passé soit révélé, car sinon tout l’édifice s’effondrerait. Il s’agit là du fait que la surveillance de Ben Geiben, l’ancien chef de l’unité d’élite de la gendarmerie, a soudainement été abandonnée le jour suivant l’attentat au Palais de Justice en octobre 1985. Jusqu’alors, c’était la piste la plus prometteuse pour la résolution de l’affaire Bommeleeër.

Rien n'est vraiment clair

Ainsi, la journée d’audience de lundi a beaucoup tourné autour des déclarations concernant ce jour-là. Les enquêteurs se sont penchés en détail sur les fausses déclarations présumées de l’ancien adjoint de l’unité d’élite, Guy Stebens, et de son supérieur, Pierre Reuland. Ce qui est apparu clairement pour l’auditeur, c’est qu’en réalité, rien n’est vraiment clair. Ni le chef de l’époque, ni son adjoint ne disent avoir été informés au début de la surveillance de Geiben. Ils ont pu s'en souvenir vaguement par la suite, mais ne peuvent donner aucune raison pour expliquer pourquoi elle a été interrompue du jour au lendemain et ils n’ont pas posé de questions à l’époque non plus. De même, il n’est pas clair, au vu de leurs déclarations contradictoires, qui était responsable le jour de la surveillance et de l’attentat au Palais de Justice en octobre 1985. L’enquêteur a toutefois estimé qu’il était difficile d’imaginer que la surveillance ait échappé au chef de l’unité d’élite. L’avocat de ce dernier a souligné que son client, Pierre Reuland, reste convaincu à ce jour que Ben Geiben n’a rien à voir avec l’affaire. Une conviction qui, jusqu’à présent, a été confirmée par l’instruction. En effet, Ben Geiben n’a pas à répondre devant le tribunal en tant qu’accusé et ne devrait pas non plus être entendu à nouveau comme témoin dans ce procès.

"Un réquisitoire à charge plutôt qu'une déclaration objective d’un enquêteur"

Le fait est aussi que Pierre Reuland s’était déjà rendu suspect avant le procès de 2013/2014. "Vous arrivez à un certain point, et puis c’est fini", a-t-il répété à plusieurs reprises en diverses occasions. Ou encore qu’il ne pouvait se souvenir de rien, quel que soit ce qu’on lui demandait lors d’un interrogatoire. L’enquêteur a conclu que Pierre Reuland avait volontairement retenu des déclarations qui auraient pu contribuer à la découverte de la vérité, et qu’il en savait plus qu’il ne l’a admis devant le tribunal.
L’avocat de l’accusé, Maître Roland Assa, a immédiatement réagi : "Pour moi, cela ressemblait davantage à un réquisitoire à charge qu’à une déclaration objective d’un enquêteur." La phrase "Vous arrivez à un certain point, et puis c’est fini" avait déjà été relativisée par l’accusé lors du procès de 2013. Il s’agissait de "langage administratif", car l’enquête arrive à un moment donné à son terme. Cette conviction se dégage également de déclarations, notamment du juge d’instruction de l'époque, Prosper Klein, qui avait aussi affirmé : "Cela vient d’un très haut niveau et, à son avis, il n’en sortirait pas grand-chose", a souligné Maître Roland Assa.

Fausse déclaration, mensonges ou contradictions

"Il y a des contradictions entre les différents témoins", estime l’avocat de Guy Stebens, Maître Georges Pierret. Ils ont été entendus devant le tribunal 30 ans après les faits. Ils ont été confrontés à une situation à laquelle ils n'étaient pas préparés, puisqu’ils ne connaissaient pas les questions et n’avaient pas pu se préparer à se souvenir. Que certaines dates ou certains noms soient erronés, ou que des réunions n’aient pas pu être situées,  c'était évident au préalable pour l’avocat. "Mais fondamentalement, aucun faux témoignage n’a été fait pour induire le tribunal en erreur", a affirmé Georges Pierret. Un mensonge peut être une fausse déclaration, mais ce n’est pas forcément le cas. Pour cela, il faut qu’il ait été fait sous serment, sciemment ou dans le but de nuire à quelqu’un.
 
Le procès se poursuivra mardi matin avec les plaidoiries des avocats.

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