Les huiles essentielles, tout un monde de senteurs

Les huiles essentielles sont extraites exclusivement des végétaux. Soit dans leur entièreté, soit dans une partie des plantes: les fleurs (la lavande), les aiguilles de conifères (le sapin de Sibérie), l’écorce (la cannelle), le bois (le bois de Hô), les feuilles (l’eucalyptus), les rameaux (le cyprès), les graines (le cumin) ou la racine (le gingembre).

Le procédé de distillation
Elles sont obtenues grâce à un procédé appelé distillation. Cette distillation se passe dans un alambic: de la vapeur d’eau est envoyée à travers les plantes et va entraîner les composés volatils de ces plantes. Cette vapeur traverse ensuite un système de refroidissement qui la rendra liquide.
Le liquide ainsi obtenu est composé de deux parties: l’huile essentielle au-dessus et une phase composée à plus de 95% d’eau appelée «Hydrolat» en-dessous.

Au lieu d’être considéré comme un déchet, cet hydrolat est un outil précieux puisqu’il contient encore de l’huile essentielle mais en quantité minime et permet un usage sécurisé. L’hydrolat de Rose de Damas, par exemple, est un tonique pour le visage d’excellente qualité. Celui de bleuet est une magnifique lotion pour les yeux congestionnés. Composé principalement d’eau, sa conservation est plus difficile et il faudra veiller à l’utiliser rapidement et avec grand soin.

Les huiles essentielles produites par distillation sont d’une grande stabilité et d’une très bonne conservation. Si toutefois le flacon est conservé loin de la chaleur et bien fermé car étant très volatiles, elles s’évaporeront très vite.
Par contre, le rendement de ce procédé est parfois tellement bas que le prix de certaines huiles essentielles s’avère très élevé. Par exemple, 100 kg de fleurs d’oranger (Néroli) ne donnent qu’environ 70 g d’huile essentielle!

Le cas des agrumes
Toutefois un autre procédé existe pour les agrumes (citron, orange douce, mandarine…): la pression à froid. La peau des agrumes est composée de petits sacs renfermant une essence. Lorsque vous épluchez une orange ou une mandarine, vous libérez cette essence et parfumez agréablement votre environnement. Afin de conserver la qualité de l’essence, le pressage doit se faire à froid. Ce procédé a un rendement nettement plus grand mais l’essence obtenue est fragile et aura une durée de vie moins longue que les huiles essentielles obtenues par distillation. De plus, appliquées sur la peau, ces essences peuvent provoquer une réaction si vous vous exposez au soleil, on parle de photosensibilisation.

Un troisième procédé est une extraction par des solvants chimiques; ce procédé permet de réduire les prix mais ne convient pas pour un usage «sain». Votre santé est entre vos mains, exigez de vraies huiles essentielles de qualité ! Beaucoup sont mêmes disponibles en magasin Bio.

Un monde biochimique propre à chaque plante
On pourrait croire que les huiles essentielles s’inscrivent dans la phytothérapie au même titre que les infusions ou les gélules d’extraits secs de plantes. Toutefois, un même romarin planté dans différents sols ne donnera pas la même huile essentielle, et n’aura donc pas les mêmes caractéristiques. Pour les différencier, on parle de leur chémotype (type chimique) c’est-à-dire la molécule biochimique principale que la plante a fabriquée grâce au soleil, à la nature et aux composants du sol dans lequel elle pousse. Le romarin officinal qui pousse en Corse sera riche en verbénone, ce qui le rend excellent pour le foie mais le rend fort toxique pour les épileptiques et les femmes enceintes. Celui qui pousse au Maroc est appelé romarin off. à cinéole et sera précieux dans toutes les affections respiratoires chez l’adulte. Quant à celui qui pousse dans le midi de la France, on parle du romarin off. à camphre et ses propriétés sur les muscles en fonction des doses varient: à faible dose il servira de tonique musculaire, et à dose plus élevée, il devient un relaxant musculaire. Il est par contre toxique à fortes doses, une dilution appropriée est donc plus que nécessaire.

Parlons de leur usage
Tout est possible et tout doit être fait avec grande prudence ! Voilà le mot d’ordre à respecter: Vous pouvez
• les appliquer pures ou diluées dans une huile végétale en massage ou en application locale sur un bouton ou un hématome;
• les diffuser pour assainir une chambre ou parfumer votre maison aux senteurs de Provence grâce à un diffuseur;
• faire une inhalation dans un bol d’eau chaude lors d’un rhume;
• les disperser dans votre bain via un produit adapté car les huiles essentielles ne se mélangent pas à l’eau;
• les respirer profondément et en tirer un effet tonifiant, relaxant, ou rafraîchissant… Certains vont même à l’utiliser comme thérapie en tant que tel dans le but de révéler d’anciennes émotions via l’odorat, on parle alors d’olfactothérapie;
• les prendre par voie orale (attention de respecter scrupuleusement les doses!) ou demander à votre pharmacien de vous préparer des gélules.

En bref, il vous faut un livre bien détaillé et sérieux qui sera un guide d’utilisation de vos huiles. Ce livre doit vous renseigner sur les meilleurs usages de chaque huile car chacune a ses propriétés propres; n’hésitez pas à choisir, pour commencer, des livres de référence écrits par des pharmaciens: Dominique Baudoux ("L’aromathérapie" ou "L’huile essentielle à tous les étages") ou Danièle Festy («Je ne sais pas utiliser les huiles essentielles » ou «Ma bible des huiles essentielles»). Car certaines huiles sont dites dermocaustiques, ce qui veut dire qu’elles provoquent des irritations parfois graves sur la peau; c’est le cas du clou de girofle par exemple, il faudra toujours veiller à le diluer dans une huile végétale. D’autres, comme la menthe poivrée ou la cannelle de Ceylan, ne devront pas être diffusées seules. Veillez aux précautions d’usage pour les petits enfants et les femmes enceintes, et à les proscrire pour les personnes épileptiques.
Au moindre doute, passez chez votre pharmacien, il vous renseignera avec plaisir !

Laurence Depienne, pharmacienne