Les chefs du Luxembourg retiennent leur souffle: lundi 28 avril, le guide Michelin BeLux dévoile à Anvers son palmarès 2025. Quels sont les prétendants les plus crédibles à une nouvelle étoile ? Les paris sont lancés.

La machine à rumeurs s'emballe à l'heure des nouvelles récompenses décernées par le guide Michelin. Près d'un mois après la cérémonie française, c'est à Anvers, en Belgique, ce lundi 28 avril 2025, que les chefs du Luxembourg sauront s'ils ont séduit les inspecteurs qui sévissent dans le BeLux. Qui, parmi les grands noms de la gastronomie luxembourgeoise, s'apprête à décrocher une nouvelle étoile Michelin ? RTL Infos sort sa boule de cristal.

L'heure de Louis Linster ?

Le Restaurant Lea Linsterà Frisange est régulièrement évoqué lorsqu'il s'agit de se prêter au jeu des pronostics. Louis Linster, qui a succédé à sa mère il y 8 ans en cuisine, a su conserver l'étoile décrochée en 1987 par l'établissement. Mais celui qui a été élu chef de l’année 2024 par un autre guide, le Gault&Millau, pourrait bien décrocher un deuxième macaron.

L'intéressé ne s'en cache pas: cela fait deux ans qu'il travaille pour ça. "Il y a plein de choses que l'on a améliorées pour que la visite du client soit la plus parfaite possible" affirme t-il. "On fait quand même un métier assez dur, alors c'est important d'être récompensé. Ça motive aussi les jeunes. Les clients nous disent que c'est très bon mais quand on reçoit un prix et qu'on monte sur scène, c'est encore différent." 

À Roeser, Roberto Fani, chef du RistoranteFANI, rêve toujours d'un deuxième macaron. Il a obtenu le premier en 2017. "Notre équipe est prête à recevoir une deuxième étoile. C'est normal de toujours vouloir grandir. C'est indispensable, c'est même vital ! Mais je pense que c'est plus dur pour nous car notre établissement était auparavant une pizzeria. Nous avons énormément investi sur le personnel. Nous sommes 10 personnes, plus la plonge. Pour un établissement comme le nôtre, c'est vraiment beaucoup. J'espère que le guide s'en rend compte." Mais malgré les efforts investis, le chef italien fait preuve de sérénité : "Si on obtient rien, on ouvrira le restaurant mardi à midi, comme d'habitude, avec le sourire et la même motivation. On ne peut pas toujours obtenir les récompenses aussi vite qu'on l'aimerait."

L'étoile Michelin, Clovis Degrave, de la Grünewald Chef's Table à Dommeldange, y pense également. Avec sa compagne Aline Bourscheid (ils gèrent deux autres établissements: "Maison B" et "Hostellerie Du Grünewald"), il a l'habitude de se rendre chaque année en Belgique pour assister à la cérémonie. "Tout le monde pense aux étoiles Michelin. Ce sont des conversations qu'on a tous les jours entre chefs. Mais il y en a qui ont attendu des années avant d'obtenir leur étoile. Ça se construit. On est déjà très content de l'expérience qu'on propose" confie t-il, avec une pensée pour l'un de ses confrères: "J'aimerais bien que Louis (Linster) décroche sa deuxième étoile. Et que tous les autres conservent les leurs. Les clients vont manger chez les uns et les autres. C'est valorisant pour la gastronomie du pays."

Archibald De Prince, qui a ouvert son hôtel-restaurant à Lauterborn en octobre dernier, attend le verdict avec sa compagne Rachel en étant "assez détendu". "On est ouvert que depuis six mois. L'objectif, c'est de décrocher une étoile dans les trois ans. Si on gagne quelque chose, on sera hyper heureux" dit-il. "Mais si on ne gagne rien, ce sera ok" ajoute sa compagne, qui tient à "garder les pieds sur Terre et la tête sur les épaules." "On est conscient que d'autres restaurants installés depuis plus longtemps que nous mériteraient d'obtenir une étoile supplémentaire."

Si le couple a pris son envol il y a seulement six mois, le chef belge a toutefois été le second de René Mathieu à La Distillerie, au Château de Bourglinster, durant 8 ans et a remporté le Bocuse d'Or Belgique fin 2023... "On sait qu'ils nous suivent..." confie t-il.

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Une deuxième étoile "libératrice", un fardeau "quand tu n'es pas prêt"

Les étoiles, fardeau ou fierté ? Vaste question. Clovis Degrave est catégorique. Les étoiles Michelin, "c'est une pression pour les chefs, c'est sûr. Quand tu n'as pas d'étoile, tu es moins stressé. Tu n'as pas d'étoile à perdre. Quand t'en as une, tu peux aussi te mettre la pression d'aller chercher la deuxième." Mais il nuance : "On ne devrait pas penser à l'éventualité de perdre une étoile. Il faut se concentrer sur le fait de faire toujours aussi bon, voire mieux, pour rester en phase avec soi-même. Et puis, on peut faire de la gastronomie sans avoir d'étoile. C'est aussi une question de produits."

Louis Linster, lui, estime même qu'une deuxième étoile serait même libératrice. "Quand t'as une étoile, tu peux avoir des idées trop extravagantes ou qui coûtent trop cher pour le client, alors tu vas y renoncer. Quand t'as deux étoiles, t'es plus libre, tu peux aller plus loin dans ce que tu mets dans l'assiette." Néanmoins, "on a peut-être plus à perdre le jour où on est déclassé..."

Pour Roberto Fani, il n'y a pas débat: "C'est seulement positif ! Si cela engendre des attentes de plus en plus élevées de la part des clients, ça nous pousse à faire toujours mieux. C'est du stress positif."

Archibald De Prince, un peu plus pragmatique, est lucide sur les conséquences de l'obtention d'une étoile. "Elles sont positives. Ça augmente ton chiffre d'affaires. Une étoile Michelin, c’est surtout un fardeau quand tu n'es pas prêt."

"On sait que les inspecteurs Michelin sont venus..."

Leurs rapports déterminent les récompenses chaque année alors forcément, la question entourant la présence ou non des inspecteurs du guide Michelin à leur table peut obséder les chefs. Louis Linster raconte : "Parfois on se rend compte qu'ils sont là, parfois pas du tout. C'est arrivé qu'ils viennent me donner leur carte de visite à la fin du repas car ils savent qu'ils ne reviendront plus. La première fois que ça m'est arrivé, j'ai cru que c'était des clients !"

Clovis Degrave, lui, avoue ne pas "avoir envie de savoir quand ils sont là, sinon tu deviens dingue. Je préfère vivre le service en étant décontracté." "De toute façon, les inspecteurs, on ne les connaît pas. On a des suspicions mais avec tous les clients qu'on reçoit, c'est difficile de les repérer. Ils ne viennent pas avec un bloc-notes sur la table !"

Roberto Fani préfère adopter une approche plus décontractée face à l'inconnu. "Je connais notre niveau de qualité, celui que l'on a construit depuis 9 ans. Je pense que nous sommes sur le bon chemin et que nous sommes en phase avec notre philosophie." Archibald De Prince, dont l'établissement a intégré le site web du guide jaune, sait "qu’ils sont venus au moins trois fois... mais on ne connaît pas leurs critères."

René Mathieu, retour de l'étoile en vue

Ce n'est pas encore une certitude absolue mais il apparaît assez impensable que René Mathieu, qui a quitté le château de Bourglinster et son restaurant gastronomique "La Distillerie" pour ouvrir le "Fields" au Findel en début d'année, ne récupère pas son étoile Michelin et son étoile verte.

Enfin, la possibilité que Cyril Molard, dont le restaurant Ma Langue Sourit à Moutfort est actuellement le seul doublement étoilé du pays, obtienne un troisième macaron, est régulièrement évoquée.

Il ne reste plus qu'à attendre le verdict à Anvers, lundi matin, pour mesurer la fiabilité de notre boule de cristal.

Tous les résultats du lundi 28 avril 2025, à retrouver ici.