Les pâtissiers du Luxembourg carburent pour livrer les bûches de Noël, qu'ils revisitent pour séduire toujours plus de clients. Pour eux, la période des fêtes est capitale.

C'est la star des fins de repas de Noël. C'est aussi un produit traditionnel qui génère un véritable business. Au Luxembourg comme ailleurs, la bûche est devenue un enjeu majeur pour les pâtissiers qui jouent une partie non-négligeable de leur chiffre d'affaires annuel. "C’est LE moment de l’année à ne pas manquer" nous dit-on chez Namur, artisan confiseur historique du Grand-Duché. Et pour cause, "les ventes de bûches génèrent pratiquement le double du chiffre d’affaires réalisé durant certains mois de l’année."

Au 22 décembre 2024, les chiffres de vente des bûches toutes boutiques confondues s’élevaient à 910.350 euros, contre 871 800 euros à la même date l'année dernière, nous indique Namur. "Cela représente une augmentation de 5%."

Chez Kaempff-Kohler, autre maison historique au Luxembourg qui a fêté ses 100 ans en 2022, cette hausse est encore plus importante: au 21 décembre 2024, elle avait vendu 14% de bûches en plus que l'an dernier. L'objectif est plus qu'atteint, dans la mesure où les espoirs de la pâtisserie-traiteur était d'égaler le nombre de commandes de l'an dernier. Ces chiffres ne prennent pas en compte les commandes de dernière minute.

Le chocolat et les looks soignés attirent, la crème au beurre un peu moins

Alors, comment les pâtisseries s'y prennent-elles pour séduire de plus en plus de clients pendant les fêtes de fin d'année? En innovant, notamment. L'an dernier, Jonathan Szymkowiak, chef-pâtissier chez Kaempff-Kohler et Paul Bungert, son homologue du restaurant doublement étoilé Ma Langue Sourit, avaient confectionné une bûche de haute volée butternut-sapin 100% luxembourgeoise, limitée à 500 exemplaires.

Cette année, Jonathan Szymkowiak a misé sur une bûche "Carrot Cake" avec un biscuit à la carotte, gianduja pécan, un confit de carottes au yuzu et une mousse cream cheese. Le chef-pâtissier a également revisité un classique, la Forêt Noire, en l'ornant d'une grosse ceinture qui rappelle celle du Père Noël. Mais si "les clients sont réceptifs aux nouvelles saveurs", affirme t-il, "les bûches traditionnelles restent au top des ventes." Ainsi, la bûche au chocolat est la "best seller" chez Kaempff-Kohler. "Elle représente environ un quart de nos commandes. Chez nous, c'est un classique. La Forêt Noire suit juste derrière" nous répond l'établissement. D'une manière générale, "les bûches "mousse" représentent environ 60% des ventes contre 40% pour les bûches traditionnelles à la crème au beurre."

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Ce n'est pas vraiment une bûche mais une Forêt noire revisitée qu'a imaginé le chef pâtissier de Kaempff Kohler, Jonathan Szymkowiak. / © Kaempff Kohler

Chez Namur, ce sont les bûches bavaroises au design soigné qui font un carton. Notamment la "Santa" (chocolat blanc framboise) et la "Render" (choco-noisette), qui "s'habillent" en Père Noël et en renne. Elles ont l'avantage de séduire les enfants et les jeunes familles.

Bien que traditionnelles, les bûches à la crème au beurre sont également en retrait même si celle au café demeure une valeur sûre. "Nous en fabriquons environ trois fois plus que les autres, principalement en raison de leur meilleure conservation dans la dernière ligne droite, mais ces dernières restent davantage appréciées par une niche de clients, souvent plus attachés aux traditions luxembourgeoises" nous répond l'artisan confiseur.

Quant aux nouvelles créations plus ambitieuses en matière de goût, qui mêlent chocolat noir et épices ou des agrumes, elles ont permis "de capter une clientèle plus large."

D'une manière générale, les bûches glacées sont minoritaires sur les tables.

Réduire la déco pour faire face à la hausse des prix des matières premières

Chocolat, beurre, farine, sucre, crème "et même les emballages": la hausse du prix des matières premières est une contrainte à laquelle les pâtissiers ont dû faire face toute l'année. Comme en grande surface, cela peut se traduire par une "shrinkflation" dans les vitrines. Et en période de fête, par des bûches plus petites au même prix que l'an dernier, voire plus chères.

Si Namur reconnaît une légère augmentation du prix de ses bûches (environ 40€ pour 5/6 personnes), il prétend ne pas être tombé dans cette stratégie commerciale de "réduflation" en faisant le choix de "réduire, par exemple, les éléments décoratifs comme les pastilles ou ornements en chocolat." "Nous adaptons aussi nos volumes de production pour éviter le gaspillage, en nous concentrant sur les produits les plus demandés" nous a-t-on répondu.

Comme on l'ajoute du côté de Kaempff-Kohler, il faut jouer les équilibristes pour "maintenir la qualité" des produits "et gérer les coûts de manière responsable." Ici, le prix des bûches varie entre 35,80€ et 39,90€.

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Le soin apporté au bûche de Noël est un élément de plus en plus pris en compte par les clients. Ici, la bûche "traineau" de Namur. / © Namur

Certaines bûches sont congelées en avance, mais comment ?

La période des fêtes est un vrai défi logistique. Pour confectionner un maximum de bûches en un minimum de temps, les équipes des différents établissements sont réorganisées, voire renforcées. "De nouvelles personnes nous rejoignent pour un mois afin de mieux répartir la charge de travail" confirme Kaempff-Kohler.

Chez Namur, on ne cache pas que la charge de travail de l'équipe permanente s'intensifie "incluant des heures supplémentaires pour répondre à la demande."

La production des bûches suit des étapes clés: préparation des bases, stockage et finalisation. Enfin, les livraisons sont regroupées par zones géographiques pour optimiser les trajets.

Afin de parvenir à fournir autant de produits sur une période aussi courte, il n'y a pas d'autre solution que de commencer la fabrication à l'avance et à surgeler les bûches. "Cela nous permet de répartir la charge de travail sur plusieurs semaines et d’éviter un embouteillage dans les jours précédant Noël" nous explique t-on chez Namur. Vient ensuite l'étape de finalisation juste avant les fêtes: "cela inclut le glaçage, la décoration, ainsi que les finitions personnalisées selon les commandes." Les bûches à la crème au beurre, elles, ne se congèlent pas: elles sont fabriquées et assemblées juste avant la livraison.

Lorsque les bûches sont mises en rayon, "elles se conservent au frais pour une durée maximale de 3 à 4 jours selon les variétés" nous indique Kaempff-Kohler. Aucune livraison n'est effectuée les 24 et 25 décembre, "les clients viennent directement récupérer leurs commandes en boutique, ce qui facilite l’aspect logistique."