Les propriétés des produits chimiques éternels qui font leur utilité, les rendent également dangereux. Ils sont stables et résistants et s'accumulent donc dans l'environnement et dans le corps humain.

Les PFAS (substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées) sont un groupe de substances chimiques utilisées dans de nombreux domaines: vêtements imperméables, certains cosmétiques ou médicaments, emballages antiadhésifs, mousses anti-incendie, liquides de refroidissement ou encore certains engrais. Parce qu’ils sont aussi résistants, ils se retrouvent partout dans l’environnement.
 
C'est ainsi que les humains les accumulent dans leur corps via la respiration, l'alimentation ou la peau. À fortes concentrations, certains polluants éternels peuvent provoquer des cancers, du cholestérol ou une baisse de fertilité. C'est ce que démontrent, entre autres, des études menées aux États-Unis, où plusieurs personnes ont été exposées à des niveaux élevés de PFOA pendant une longue période, explique Laurence Wurth de la Direction de la Santé. Le PFOA fait cependant partie des substances interdites depuis 2020.

L’effet cocktail des PFAS est peu étudié

Les répercussions des plus de 10.000 PFAS différents sur le corps humain restent globalement floues, en particulier l’effet dit cocktail. "Les humains ne sont pas exposés à une seule substance, mais à toute une série de substances tout au long de leur vie. Et l'impact de ce cocktail sur la santé est peu étudié", affirme Laurence Wurth, de la Direction de la Santé.
 
Des recherches sur le sujet sont menées, notamment au Luxembourg Institute of Science and Technology (LIST) à Esch-Belval. C'est là que l'impact global des PFAS sur les cultures cellulaires est analysé. Un effet a pu être constaté, mais aucune conclusion concrète n'a pu être tirée, explique Emma Arnesdotter, chercheuse au LIST. On reste toujours dans une analyse de laboratoire.

"Même si nous pouvons constater certains effets, nous disposons de nombreux mécanismes de défense dans notre corps qui peuvent contrer ces effets", d'après la chercheuse. Cependant, certaines conséquences des PFAS sur l'organisme semblent se dégager. Par exemple, le système immunitaire est affecté. “La réponse de l'organisme aux vaccins classiques, comme ceux contre le tétanos ou la rougeole, est réduite. Notre capacité à combattre ces maladies est également réduite”, dit Emma Arnesdotter. Et c'est évidemment à prendre au sérieux. 

Un polluant éternel n'est pas l'autre 

Cependant, la recherche en est globalement encore à ses débuts et est extrêmement complexe. Tous les PFAS ne s’accumulent pas dans l’organisme dans la même mesure et n'ont pas non plus le même niveau de toxicité. Le TFA, par exemple, est un produit de dégradation de divers PFAS. À ce jour, il n'existe pas de valeur limite pour sa concentration dans l'eau potable au Luxembourg, mais une valeur d'orientation de 12.000 nanogrammes par litre existe. Le TFA est cependant aussi une substance persistante, souligne Laurence Wurth, mais il s'agit d'une toute petite molécule PFAS. De plus, il a été observé qu'elle s'accumule moins dans le corps humain. "Dans le peu d'études existantes, il a été observé qu’il était moins toxique que le PFOA", indique la biologiste, qui insiste toutefois sur le fait qu'il subsiste des incertitudes et que par conséquent, l'exposition doit rester la plus basse possible. Du TFA a même été retrouvé dans des gouttes de pluie.

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© Diana Hoffmann / RTL

Possibilité d'une interdiction des PFAS 

Cinq pays européens envisagent actuellement une nouvelle directive pour interdire les PFAS en tant que famille. “Sauf pour des applications essentielles. Cette proposition est soumise à l'ECHA (Agence européenne des produits chimiques) et est actuellement en cours d'analyse", indique Laurence Wurth. Le Luxembourg pourrait les rejoindre. Depuis octobre dernier, le Grand-Duché dispose d'un groupe interministériel sur les PFAS. L'objectif est de mieux observer les PFAS dans l'eau, les aliments et les sols, mais aussi de contrôler et de surveiller l'exposition de la population.

En outre, des mesures qui pourraient être prises dans différents secteurs pour maintenir la pollution environnementale au niveau le plus bas possible, sont aussi recherchées. "Il y a de très nombreuses sources et, en fin de compte, chaque secteur doit assumer une certaine responsabilité et proposer des actions à entreprendre", estime Laurence Wurth.
 
À l'avenir, les autorités souhaitent obtenir des chiffres plus précis. Une étude est actuellement en cours dans le cadre d'un projet européen, pour laquelle le Laboratoire national de santé (LNS) analyse les concentrations de PFAS dans l'organisme de 300 enfants. Ensuite, ce sera au tour de 300 adultes.  
 
Mais au-delà de l'étude des répercussions sur la santé, il faudrait également veiller à rendre la nature à nouveau propre, juge Emma Arnesdotter. "Etudier la manière d'éliminer les PFAS de la nature. Ce serait mon souhait. Poursuivre les recherches sur ce que quelque 15.000 composants peuvent faire", ajoute la chercheuse.
 
Au Luxembourg, seuls 20 PFAS sont mesurés dans l'eau à ce jour. Leur concentration ne doit pas dépasser la valeur limite de 100 nanogrammes par litre. Actuellement, elle est bien inférieure à cette dernière avec1,2 nanogramme. Pour le TFA, une valeur guide de 12.000 nanogrammes par litre a été fixée, et elle est actuellement de 850 au Grand-Duché.