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La compréhension des polluants éternels reste un défi. A partir de 2026, des nouvelles valeurs limites s'appliqueront à l'échelle de l'Union européenne.
Les polluants éternels sont un problème de plus en plus important dans l'environnement. “Les PFAS sont des substances per- et polyfluoroalkylées. Ce sont des substances que l'on retrouve dans la vie quotidienne, partout où des propriétés spécifiques sont requises. Il s'agit de propriétés antiadhésives, mais aussi imperméabilisantes", explique Brigitte Lambert, responsable d'unité à l'Administration de la gestion de l'eau. Ils sont notamment utilisés pour la production de poêles en Téflon, de cosmétiques, de médicaments et de vêtements imperméables. Ils sont aussi un produit de dégradation de certains pesticides fluorés. Le problème de ces composés chimiques est qu'ils se dégradent difficilement et peuvent donc être présents partout dans l'environnement, même dans l'eau potable.
La concentration des PFAS ou polluants éternels dans l'eau au Luxembourg est analysée au laboratoire de l'Administration de la gestion de l'eau à Belval. “Au Luxembourg, nous avons des concentrations de PFAS relativement faibles. La situation est différente à l'étranger, où il y a certaines zones sensibles industrielles. Il y a là de réels dépassements de la valeur limite de 100 nanogrammes. Ce n'est pas le cas au Luxembourg", affirme Brigitte Lambert. À partir de 2026, l'UE introduira des valeurs limites à l'échelle de l'Union, que le Luxembourg applique déjà depuis 2023.
Actuellement déjà, la somme totale des 20 PFAS les plus importants dans l'eau potable ne doit pas dépasser 100 nanogrammes par litre. Cela correspond au volume de sept grains de riz dans une piscine olympique. La valeur moyenne des 20 PFAS analysés dans l'eau potable au Luxembourg est actuellement de 1,2 nanogramme par litre.
De plus, la somme de tous les PFAS présents dans l'eau potable ne doit pas dépasser 500 nanogrammes par litre. L'analyse de cette concentration est toutefois problématique, car parmi les 10.000 substances appartenant à la famille des PFAS, beaucoup n'ont pas encore été étudiées, explique Brigitte Lambert.
Un rôle plus particulier est attribué à la substance chimique éternelle TFA. L'acide trifluoroacétique est une substance chimique produite artificiellement qui se dégrade à peine, voire pas du tout, dans l’environnement. Le TFA n'est pas inclus dans la somme des 20 PFAS et il n'existe actuellement aucune valeur limite, mais seulement une valeur guide de 12.000 nanogrammes par litre. Actuellement, la valeur moyenne de TFA dans l’eau potable au Luxembourg est de 850 nanogrammes. Le TFA est une très petite molécule PFAS. “Il a été observé qu'il s'accumule moins dans les organismes humains. Et le peu d'études qui existent à ce jour semblent aussi indiquer qu'il est moins toxique que le PFOA, par exemple”, explique Laurence Wurth de la Direction de la Santé.
Le SEBES purifie l'eau potable d'une partie des PFAS
Le SEBES à Eschdorf est chargé de transformer les eaux du barrage d’Esch-sur-Sûre en eau potable. Le Syndicat des Eaux du Barrage d’Esch-sur-Sûre approvisionne 50 à 70% du Grand-Duché en eau potable, qui doit être préalablement traitée. “Nous devons éliminer les PFAS par ozonation puis filtration sur charbon actif. Malheureusement, ce n'est pas si simple avec le TFA. C'est une molécule qui n'est pas solide, elle est soluble. Et elle est tellement stable qu'elle n'est pas éliminée par notre traitement", indique le directeur du SEBES, Georges Kraus. Théoriquement, le TFA pourrait être extrait, mais cela nécessiterait un investissement important et, au final, le résultat serait quasiment de l’eau distillée.
Il serait donc heureux que le Luxembourg aille plus loin et interdise les produits à base de PFAS et de TFA. “C'est-à-dire que ce qui peut former du TFA dans la nature, ne soit plus utilisé", précise Georges Kraus. Encore que l’origine de la contamination de l’eau potable par les PFAS reste relativement floue.
Pour le Luxembourg, ce serait pourtant évident dans les zones rurales, selon le Mouvement écologique. Il s'agirait souvent de TFA, qui provient de certains pesticides. Le TFA est en effet un sous-produit issu de la dégradation de certains pesticides. Dans d'autres pays, ces pesticides sont déjà interdits, explique Claire Wolff du Mouvement écologique. Et cela, parce qu'entretemps, tout indique qu'ils pourraient nuire à la santé des humains.
“Nous appelons au principe de précaution en disant: ce sont des produits chimiques éternels. Puisqu'ils resteront éternellement dans l'environnement, nous devons les empêcher d'y pénétrer dès maintenant. Simplement pour éviter d'atteindre un point de non-retour, où nous ne pourrons plus rien améliorer", dit Claire Wolff.