Le préfet de la Meuse va porter plainte pour propos révisionnistes tenus en marge d'un hommage rendu samedi "au maréchal Pétain et à ses soldats" dans une église de Verdun, qui a attiré un poignée de fidèles face à une centaine de manifestants.
Le préfet, Xavier Delarue, a annoncé qu'il porterait plainte contre des propos "clairement révisionnistes" sur la base de l'article 40 du code pénal, qui oblige tout fonctionnaire ayant connaissance d'un crime ou d'un délit à saisir le procureur de la République.
Quelques jours après la commémoration de l'armistice de 1918, l'hommage au vainqueur de Verdun a généré une polémique, le maire de la ville martyre ayant tenté d'interdire l'événement, qui a finalement été autorisé vendredi par la justice administrative.
"Un tout petit nombre" de personnes, "une vingtaine au maximum", a assisté à cet office en l'église Saint-Jean-Baptiste, a déclaré le préfet. "Les choses sont organisées de façon à ce que l'église soit fermée et réservée aux membres de l'association", a-t-il expliqué.
Le préfet a précisé s'être entretenu avant la cérémonie avec le prêtre célébrant la messe, afin de s'assurer que les règles découlant de la loi de 1905 sur la séparation de l'Eglise et de l'Etat soient respectées, à savoir qu'aucune prise de parole ou de distribution de tracts de nature politique n'ait lieu.
"Révisionniste!"
Mais à la sortie de l'office religieux, le président de l'Association pour défendre la mémoire du maréchal Pétain (ADMP), Jacques Boncompain, a soutenu devant des journalistes que le chef du régime de Vichy, condamné à mort en 1945, avait été "le premier résistant de France".
"Vous n'avez pas peur des poursuites", lui a lancé une manifestante, alors que des policiers surveillaient la conversation.
Le procès de Philippe Pétain en 1945 "ne répondait pas aux critères d'équité", a également estimé M. Boncompain, alors qu'une personne le traitait de "révisionniste!".
Sous les huées, un militant d'extrême droite, Pierre-Nicolas Nups, ancien candidat aux législatives de 2024 en Meurthe-et-Moselle sous la bannière du Parti de la France, a interprété "Maréchal nous voilà", le chant à la gloire du chef du régime de Vichy.
Le préfet a dit envisager également une plainte contre "deux individus" liés au Parti de la France "qui n'ont pas cessé de harceler les forces de l'ordre".
"Profondément heurté"
A l'extérieur de l'église, un photographe de l'AFP a dénombré pendant la cérémonie une vingtaine de policiers et gendarmes, tandis qu'une centaine de manifestants protestaient dans le calme, entonnant la Marseillaise.
"J'ai mis en place un dispositif visant à éviter les contacts physiques" entre les manifestants et les personnes venues assister à la messe, a indiqué le préfet.
Plusieurs élus étaient présents à la manifestation avec leur écharpe tricolore.
© Photo par JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP
"Je suis profondément heurté, parce que je pense à toutes les victimes de la barbarie nazie et de la révolution nationale, l'idéologie du maréchal Pétain", a déclaré à la presse Samuel Hazard (divers gauche).
"C'est pas possible qu'on dérive comme cela", a déclaré une paroissienne, Mariette Descamps, portant une pancarte où l'on pouvait lire "Catho pas facho". "Je suis désolée de ce qui se passe aujourd'hui", a-t-elle dit.
Cette messe, "c'est salir tous les justes dans notre pays. L'extrême droite se délecte", abonde à ses côtés sa fille Elise, une militante CFDT.
L'ADMP avait été autorisée par l'archevêque-évêque de Metz, administrateur apostolique de Verdun, à célébrer la messe pour le repos de l'âme du maréchal Pétain et des victimes de toutes les guerres.
Philippe Pétain, héros de la Première Guerre mondiale puis chef du régime de Vichy qui collabora avec l'Allemagne nazie, a été frappé d'indignité nationale en 1945.