C'est une petite entreprise mosellane qui s'est affirmée comme une des plus innovantes et des plus importantes dans le domaine de la blockchain et des cryptomonnaies. Reportage chez Just Mining.

Dans le monde des cryptomonnaies, elle figure déjà parmi les grands. Pas encore parmi les géants, mais tout de même.

Just Mining, petite entreprise mosellane d'une trentaine de collaborateurs, est une société d'investissement dans le monde de la blockchain et des cryptomonnaies. Un monde diablement compliqué mais potentiellement très rentable. C'est d'ailleurs en tentant d'en expliquer toute la complexité que son directeur, Owen Simonin, a posé la première pierre d'une société qui gère aujourd'hui plus de 400 millions d'euros d'investissement.

Tout a commencé sur Youtube, grâce à sa chaîne "Hasheur". Owen, alors jeune étudiant, l'a lancée pour parler de sa passion grandissante pour la blockchain. "J'étais étudiant à l'Edhec Business School à Lille. Études que je n'ai jamais terminées d'ailleurs" se remémore-t-il en riant.

D'abord confidentiel, son travail de vulgarisation lui permet de réunir une communauté attentive. "De fil en aiguille, quelqu'un m'a demandé ce qu'était un mineur de cryptomonnaie." C'est-à-dire un ordinateur qui reçoit de la cryptomonnaie en échange de la réalisation de calculs permettant de sécuriser les transactions effectuées sur le réseau. Avec son frère, il conçoit un prototype de mineur pour appuyer son exemple et publier une nouvelle vidéo. "En commentaires, quelqu'un m'a dit: "c'est dommage qu'il n'y ait pas une entreprise qui propose cet ordinateur qu'on a juste à recevoir chez soi, brancher internet et électricité pour que la machine sécurise les transactions et nous fasse une virement à la fin du mois"."

L'idée de Just Mining est née. Et la notoriété grandissante de Hasheur - plus de 530.000 abonnés aujourd'hui - lui permet de s'offrir la confiance des premiers investisseurs.

LE "BULL RUN"... PUIS LA CHUTE

Avec l'envolée du marché des cryptomonnaies - que l'on appelle "bull run" - l'entreprise décolle très vite et très fort. Cette année là, la valeur d'un Bitcoin, la plus connue, a été multipliée par 28. "Ça a été très très vite", confirme Thibaut Boutrou, le directeur des opérations de l'entreprise. Les clients se multiplient et le portefeuille de l'entreprise grossit jusqu'à atteindre un million d'euros la première année.

"Tout le monde voulait rentrer dans la technologie, on n'était pas capables de livrer plus d'une machine sur cinq demandes" lance Owen Simonin. "On en était arrivés à un point où on mettait des vis dans des machines toute la journée. Moins on dormait, plus on vendait, c'était complètement fou."

Heureusement, comme tout autre marché, celui des cryptomonnaies fonctionne par cycles: après chaque hausse fulgurante vient une baisse... tout aussi violente. "Là on s'est dit, heureusement qu'on a de la trésorerie." Just Mining profite de cette accalmie pour se structurer, se renouveler et trouver un fonctionnement plus efficace pour l'envolée suivante, lancée fin 2020.

"COINCÉ" ENTRE LE LUXEMBOURG ET PARIS

Après avoir grandi à la pépinière de Florange, où l'équipe découvre "les bases de l'entreprenariat", Just Mining recrute et s'installe à Metz. À mi-chemin de Paris et du Luxembourg, la capitale de la Moselle n'est pas pourtant pas un haut lieu de la finance.

"J'aime bien partir du fait que quand on voit le succès qu'on a eu, cette chance, il ne faut pas remettre tout en cause tout le temps. Et puis on était bien contents d'être ici, les loyers n'étaient pas très chers" nuance l'homme derrière "Hasheur". Thibaut Boutrou y voit même un certain avantage. Entre Paris, le Luxembourg, la Belgique et la Suisse accessibles facilement, Just Mining "rayonne naturellement sur plusieurs territoires".

D'ailleurs, rien ne dit que la société aurait survécu au marché immobilier et à l'environnement parisien. Tout comme la proximité du Luxembourg et de sa très lucrative place financière n'a finalement pas empêché la société messine de se développer et de recruter des talents aux compétences très demandées. "En réalité, on propose bien plus qu'un job, on propose une aventure. On est à la fois très structurés comme une institution financière, mais d'un autre côté on veut garder ce côté start-up, dynamique, ce côté "Vous allez bosser énormément mais vous n'allez jamais bosser un seul jour de votre vie"."

Ce côté "start-up" dû à la jeunesse de l'entreprise tend toutefois à s'effacer. "Je n'aime pas trop le terme "start-up" car aujourd'hui, on se rapproche plus d'une institution financière" corrige Thibaut Boutrou. "On commence à avoir des volumes qui sont conséquents. On travaille avec des banques, des fonds d'investissement... Donc ça ne correspond plus tout à fait à notre activité. Même si on l'est resté dans notre fonctionnement, avec une certaine agilité."

ET MAINTENANT?

Inutile de contacter Just Mining pour vous procurer un mineur de cryptomonnaies. La société en commercialise toujours, mais elle le déconseille aux petits investisseurs particuliers. Le marché a grandi et la rentabilité n'est plus la même. Elle a donc évolué pour proposer de nouveaux investissements. Le "staking" (dont le fonctionnement est semblable à un compte d'épargne), le "lending" (le prêt de cryptomonnaie) ou les "masternodes" (une part de la blockchain qui permet de sécuriser le réseau et vous rémunère en contrepartie). Encore peu connus du grand public, ces placements sont plus risqués qu'un simple livret mais peuvent facilement dépasser les 10% d'intérêts par an. De quoi faire pâlir les taux proposés par les banques traditionnelles.

De là à dire que la poule aux oeufs d'or est installée dans la région? Oui et non, car le monde de la cryptomonnaie ne propose pas "d'argent facile" rappelle Hasheur dans une de ses vidéos. Et si certains ont "gagné beaucoup d'argent très tôt", y compris parmi les employés de Just Mining, il faudrait une boule de cristal pour prédire quand aura lieu la prochaine hausse des prix.

Une chose est sûre toutefois, le monde de la blockchain est jeune mais s'étend et se diversifie. D'abord financier, il touche désormais le monde des assurances, du jeu vidéo, de l'art et des loisirs. Et il n'est pas prêt de s'arrêter.