Les professionnels de l'intérim luxembourgeois ont attiré du monde mardi à Yutz, où des centaines de personnes à la recherche d'un poste ont fait le déplacement. Mais aussi attractif soit-il, le Luxembourg a encore besoin de main d'œuvre et doit convaincre.

La salle "L'Amphy" de Yutz accueillait un salon de l'emploi intérimaire "Spécial Luxembourg" ce mardi. L'occasion pour 25 entreprises spécialisées du Luxembourg de se faire connaître auprès des Lorrains... Et à ces derniers de peut-être décrocher un emploi au Grand-Duché.

Organisé par la Fedil Employment Services, principale association de l'emploi intérimaire luxembourgeois, le salon a fait le plein : plus de 1 500 participants sur la journée. "C'est une satisfaction" embraye Michaël Damasio, administrateur de la "FES". Car le Luxembourg "manque de candidats" assure-t-il. "C'est pour cette raison que nous venons en France, à leur rencontre, nous devons séduire les travailleurs" explique-t-il.

Comme le confirme Roxanne Ugolini, chargée de projet à la FES, près de 70% des intérimaires du Luxembourg sont frontaliers. Et si le pays a longtemps recruté à tour de bras, il est aujourd'hui confronté à de nouveaux défis. "Depuis la crise du coronavirus, on remarque aussi qu'une partie des candidats à l'intérim sont plus sensibles aux notions de flexibilité, de périodes libres..." L'intérim leur permet aussi d'avoir la main sur leur calendrier.

Le secteur continue surtout d'avoir cette image de "précarité" qui lui "colle à la peau". Les entreprises doivent donc se montrer attirantes. D'où ce salon, organisé tous les six mois par la Fedil Employment Services. "On rappelle systématiquement qu'un contrat en intérim reste similaire à un contrat classique, en CDD ou CDI. Avec des avantages sociaux bien définis." Le travailleur bénéficie des congés payés, du système de sécurité sociale luxembourgeois, dont ses fameuses allocations familiales (307,35€ par mois depuis mai 2025)... Et évidemment, d'un bon revenu: le salaire minimum luxembourgeois est aujourd'hui le plus élevé d'Europe.

Les recruteurs du Luxembourg ont besoin de travailleurs

Du côté des entreprises d'intérim, Abalone est présent au salon "depuis la 1ère édition". Généraliste, la société a toutefois des secteurs d'activités très demandés : l'industrie, le bâtiment et la restauration. Si le secteur du bâtiment reprend un peu, celui de l'industrie est plutôt au ralenti. "En revanche, ça fonctionne très bien dans la restauration" explique Sébastien Kayser, responsable de l'agence à Esch-sur-Alzette. Et la fin d'année va marquer un pic d'activité sur le secteur.

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Sébastien Kayser, responsable de l'agence de recrutement Abalone. / © Thomas Toussaint / RTL

Chaque secteur aura toutefois ses spécificités. La restauration peut s'avérer être un enchaînement de nombreuses missions très courtes, voire à la journée, quand l'industrie pourra demander plusieurs fois des semaines entières. "Mais à la fin, les durées vont être équivalentes, simplement plus segmentées d'un côté peut-être."

Une chose est sûre, l'agence recherche constamment des candidats. "Côté luxembourgeois, la demande est plus forte qu'en France." Les missions intérimaires leur permettent de compenser un manque ou de tester un candidat. Mais cet avantage va dans les deux sens. "Très récemment, j'ai accompagné deux jeunes femmes qui ne voulaient que des contrats courts, pour tester l'activité et l'emploi sans être embauchées."

"Ça n'empêche pas de conduire vite à des embauches" rebondit Michaël Damasio."Certains postes peuvent être pris 24 ou 48h après une rencontre." Les recruteurs seront d'ailleurs "nombreux" à inviter les candidats à revenir directement en agence pour approfondir les premiers échanges du salon, nous glisse Roxanne Ugolini.

"Le Luxembourg est connu pour ses salaires"

Du côté des travailleurs, la popularité du Luxembourg n'est pourtant pas démentie. Et le salaire est justement un des arguments qui attire. Car les candidats n'ignorent pas que les employeurs luxembourgeois sont plus généreux que les autres. "Le Luxembourg est connu pour ses salaires" reconnaît Wafa, 25 ans. Déjà employée en CDI en France, elle a également eu une expérience au Grand-Duché et vient de déménager plus près de la frontière. Elle souhaite trouver un poste administratif. "Le pays ouvre plein de portes."

Même remarque pour Frédéric, un conducteur de cars et de poids lourds avec plus de 30 ans de métier. Dont la quasi-totalité en France. "Mais la France paie tellement peu que tout le monde s'en va" constate-t-il. S'il n'est pas ravi de faire de l'intérim, par crainte d'être sur un siège éjectable, il reconnaît qu'il faut "faire avec". Tout comme il faut bien "prendre les avantages comme les inconvénients" : un bon salaire mais des semaines un peu plus longues (40h contre 35h en France) et des trajets parfois compliqués.

Carole a elle construit la majorité de sa carrière au Luxembourg. Ce mardi, elle a fait le déplacement pour mettre de l'humain sur cette relation entre l'entreprise d'intérim et le candidat : "Un CV peut vite être noyé en ligne, je voulais un contact direct".

Formée au commerce international, elle a aussi travaillé à des postes administratifs ou, quand le besoin s'est fait trop insistant, à une caisse de supermarché, alors que ses compétences l'auraient conduite à un emploi de bureau. À force de cumuler CDD, CDI et intérim, elle a déjà plus de 25 ans d'expérience au Luxembourg et environ trois ans en France. Alors, pour boucler la dizaine d'années qu'il lui reste à assurer avant la retraite, elle ne se ferme pas de porte : "Il faut essayer, je viens dès qu'il y a un salon et je mets un visage sur mon profil."

La priorité, c'est de trouver un emploi

À 55 ans, et avec un adolescent à la maison, Arnaud sait qu'il a encore du pain sur la planche. Et comme pour d'autres, sa priorité est de "trouver un emploi bien sûr". Originaire de l'ouest, il est désormais bien attaché à la région et n'a "pas prévu de repartir". Passé par les métiers de l'assurance, il estime que les recrutements seront compliqués sur la fin de l'année. Mais veut "mettre toutes les chances de son côté" pour montrer qu'un employé "sénior" peut être "opérationnel" grâce à l'expérience accumulée tout au long de sa carrière. "Quand on a passé 15 ans dans la même entreprise, c'est qu'on a fait ses preuves" clame-t-il, confiant. Mais le quinquagénaire est catégorique : "Je ne cherche pas au Luxembourg en visant ma future retraite, il y a des expériences variées qui sont possibles. J'espère trouver un contrat le plus long possible."

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Hugo, en recherche d'emploi au salon de l'intérim "Spécial Luxembourg" organisé mardi 30 septembre 2025 à Yutz. / © Thomas Toussaint / RTL

De l'autre côté de la salle, Hugo, 33 ans, a lui déjà mis le pied au Luxembourg. Formé à la communication et au marketing, il constate à ses dépens que le secteur est "bouché". Après une longue expérience de cinq ans au Luxembourg, et une autre sur une année de remplacement pour un congé maternité, il a dû laisser son poste "comme c'était prévu". "J'espérais rester mais la personne est revenue comme convenu, donc maintenant, je dois remettre un pied dans le marché de l'emploi." Peut-être en trouvant un poste dans l'informatique ou l'administratif.

À 23 ans, Théo sort lui d'une école d'ingénieur de Nancy. Il recherche désormais son premier emploi, et après un stage réalisé au Luxembourg, le pays reste une piste évidente. "J'ai écumé les offres en ligne, maintenant je mets toutes les chances de mon côté." Y compris via l'intérim. "Mais l'idéal, c'est d'aller décrocher un CDI !" Le jeune homme est prêt à faire des efforts : "Ce mercredi, j'ai aussi un entretien en Suisse, alors je fais l'aller-retour."

Une mentalité partagée par Kévin, 23 ans également. Lui aussi vient de terminer ses études à Nancy, en finance, et a pu faire un stage à la Banque de Luxembourg. Un poste pourrait se libérer pour lui prochainement au Grand-Duché, mais pour "couvrir ses arrières", il a fait le déplacement au salon de l'intérim. Avec l'idée de mener une vie de frontalier, en s'installant à Metz et en prenant le train chaque jour jusqu'au Luxembourg.

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Morgane, en recherche d'emploi au salon de l'intérim "Spécial Luxembourg" organisé mardi 30 septembre 2025 à Yutz. / © Thomas Toussaint

Avec sa veste claire, Morgane se détache dans cette salle bien remplie. Contrairement à d'autres, l'intérim fut longtemps un choix pour elle. Notamment dans la vente ou l'hôtellerie. "Avec mes jobs étudiants et plus tard, car j'ai beaucoup voyagé, donc l'intérim, c'était pratique." Installée à Thionville, elle veut maintenant "trouver un emploi au Luxembourg pour un moment". Elle ne le cache pas, "ça paie mieux que la France".