Un énorme gisement d’hydrogène naturel représentant la moitié de la production mondiale actuelle a été découvert en Moselle. L'hydrogène blanc est une source d'énergie décarbonée et très convoitée, qui pourrait bien devenir le pétrole - propre - du futur.

Après le charbon, l'hydrogène ? Alors que les dernières mines de charbon ont fermé il y a 20 ans, la Lorraine pourrait bien espérer un renouveau industriel avec cette découverte majeure. La Française de l'Energie, un producteur d’énergie à faible empreinte carbone, annonce avoir découvert d’importantes concentrations d’hydrogène naturel (dit "hydrogène blanc ou natif") dans des puits en Lorraine.

Dans le cadre du projet de recherche Regalor (pour Ressources gazières de Lorraine) mené en collaboration avec l’Université de Lorraine et le CNRS, Philippe de Donato et Jacques Pironon ont fait cette découverte majeure presque par hasard. Il avaient pour mission de quantifier le méthane présent dans le sous-sol lorrain.

Ce gaz, aussi appelé le grisou, était autrefois la terreur des mineurs de charbon à cause de ses explosions meurtrières. Et première bonne nouvelle, il est présent en très grande quantité. "On estime qu'il y a sous nos pieds 371 milliards de tonnes de méthane. C'est environ 8 ans de consommation de gaz en France" explique Philippe De Donato.

Pour mener à bien leur mission, les chercheurs ont mis au point, en collaboration avec la société Solexperts, une sonde unique au monde capable de descendre à plus de 1.000 mètres de profondeur dans un puits de seulement six centimètres de diamètre pour analyser les gaz présents.

Un véritable Eldorado

Dans un forage à Folschviller, les deux chercheurs effectuent des mesures à différentes profondeurs. Et à leur plus grande surprise, ils constatent que le sous-sol contenait non seulement le méthane attendu, mais aussi des quantités de plus en plus importantes d’hydrogène. De moins d’1% à 100 mètres et entre 14 à 17% à 1.093 mètres de profondeur.

"On estime que la concentration maximum d'hydrogène, supérieure à 90%, devrait se trouver à 3.000 mètres de profondeur" explique Jacques Pironon

L'autre bonne nouvelle, c'est qu'il existe une véritable usine à hydrogène sous nos pieds. L'hypothèse des chercheurs est que le sous-sol est riche en carbonates ferreux qui réagit avec l'eau présente à ces grandes profondeurs et forme de l'hydrogène. "Cette réaction continue de se produire en ce moment, on peut donc parler d'une véritable énergie renouvelable" ajoute Philippe De Donato.

La Française de l'Energie a déposé en mars une demande de permis exclusif de recherches de mines, dit "Permis des Trois-Évêchés" pour l’exploration de l’hydrogène naturel dans le bassin minier lorrain, sur une superficie de 2.254 km², sur les départements de la Moselle et de la Meurthe-et-Moselle.

Bref, la Lorraine pourrait bien devenir l'un des plus gros réservoirs d'hydrogène naturel au monde. Il faut maintenant confirmer cette découverte avec des forages à plus grande profondeur avant d'initier une production locale d’hydrogène naturel à grande échelle dans le Grand-Est.

L'hydrogène blanc, plus "vert" que l'hydrogène vert !

Les spécialistes estiment "que les marchés de l'hydrogène devraient générer en France un chiffre d'affaires de plusieurs milliards d'euros par an d'ici 10 à 15 ans, permettant la création de plus de 10.000 emplois".

L'hydrogène a l'immense avantage de ne pas émettre de gaz à effet de serre lorsqu'il est consommé pour dégager de l'énergie. Seule de l'eau (H2O) est produite, lorsqu'il se combine avec l'oxygène.

Il peut notamment être utilisé dans des véhicules électriques équipés de "piles à combustible", qui l'utilisent pour produire de l'électricité, ce qui permet aussi d'augmenter la portée souvent faible d'une voiture électrique.

L'hydrogène est actuellement quasi intégralement produit à partir d'hydrocarbures fossiles (gaz, pétrole, charbon, etc.) polluants. Une situation qui le rend au final peu vertueux, sauf pour dépolluer les villes.

Toutefois, il peut également être produit via des catalyseurs d'eau consommant de l'électricité renouvelable (éolien, photovoltaïque...) ou en extrayant l'hydrogène du biogaz, qui peut lui aussi être obtenu à partir de ressources renouvelables (fumiers, déchets, etc).

Mais ces solutions dites "propres" pour produire de l'hydrogène ne sont pas encore compétitives. Et c'est là que l'hydrogène blanc pourrait bien devenir une révolution.

La découverte a un fort potentiel, mais il y a encore tout à inventer pour envisager une exploitation à grande échelle de l’hydrogène naturel, un secteur qui n’en est encore qu’à ses balbutiements.