
“Nous n’avons jamais autant traqué la fraude”, a assuré le Premier ministre lors d’une conférence de presse à Bercy présentant le bilan du plan de lutte contre la fraude lancé l’été dernier. Celui-ci devait permettre de faire des économies et d’augmenter les redressements, avec notamment l’objectif de doubler ceux sur la fraude sociale d’ici à 2027.
Pour Gabriel Attal, le pari est tenu, voire même “dépassé” sur certains objectifs. “L’année dernière, nous avons augmenté de 25% les contrôles fiscaux”, soit autant que ce qui était prévu d’ici 2027, s’est-il félicité, “et le nombre de perquisitions fiscales a augmenté de 30%”.
Les mises en recouvrement de fraudes fiscales ont ainsi atteint 15,2 milliards d’euros en 2023, un record, après 14,6 milliards en 2022.
Côté fraude sociale, “pour la première fois, nous avons dépassé la barre des 2 milliards d’euros de fraude sociale détectée en une année”, a annoncé le Premier ministre, précisant que le recouvrement de la fraude aux prestations et celle aux cotisations ont toutes les deux dépassé le milliard d’euros, “deux records historiques”.
“Je suis atterrée par un tel niveau d’autosatisfaction”, a réagi dans un communiqué la députée LFI Charlotte Leduc, considérant ces résultats “absolument pas à la hauteur de l’enjeu”. “Ce ne sont que 0,6 milliard de plus qu’en 2022”, soit selon elle “une goutte face aux 100 milliards qui échappent chaque année aux finances publiques”.
La députée, rapporteure spéciale sur la lutte contre l’évasion fiscale, juge notamment “intolérable” de mettre fraude fiscale et sociale sur le même plan, malgré leur différence “d’échelle”, puisque l’évasion fiscale représente selon elle “entre 80 et 120 milliards d’euros de manque à gagner pour l’Etat”, quand “la fraude aux prestations sociales versées par la CAF ne dépasse pas les 3,2 milliards par an”.

Récupérer cet argent constitue cependant un enjeu crucial pour le gouvernement, qui peine à tenir sa trajectoire de réduction du déficit. 10 milliards d’euros de coupes budgétaires ont déjà été annoncées, mais ne seront peut-être pas suffisants pour maintenir le budget 2024 dans les clous.
Au vu de “la situation budgétaire dans laquelle nous sommes”, “chaque euro compte”, a martelé Gabriel Attal. “Chaque euro fraudé (...) devra d’une façon ou d’une autre être payé pour financer nos services publics, notre modèle social, notre souveraineté”.
Face à une croissance en berne, il est “plus juste” d’”augmenter la pression sur les fraudeurs que d’augmenter les impôts sur les Français” pour renflouer les caisses de l’État, a-t-il fait valoir.
Comme promis il y a un an, le Premier ministre estime avoir été “intraitable sur les gros schémas de fraude pour alléger la pression sur le petit contribuable”, qui peut “faire une erreur”. “Jamais autant de contribuables n’avaient bénéficié d’annulation de pénalités sur la base de leur bonne foi”, a-t-il affirmé.
Côté fraude sociale en revanche, c’est plutôt “tolérance zéro”, avec une “philosophie claire": “plus de contrôles pour plus de sanctions”, a indiqué Gabriel Attal, qui voulait doubler les redressements et d’atteindre “3 milliards d’euros de préjudices détectés et évités par les CAF et l’assurance vieillesse d’ici 2027”.
“Aujourd’hui, nous sommes dans les clous et nous sommes même en avance”, a-t-il affirmé mercredi, vantant l’augmentation d’un tiers des contrôles de la CAF et de 50% des redressements Urssaf sur la fraude sociale des entreprises.
Si bien qu’il a rehaussé les objectifs de redressements Urssaf, à 5,5 milliards d’euros d’ici la fin du quinquennat, et ceux de l’assurance maladie, avec “une cible de 2,4 milliards d’euros de fraude détectée entre 2024 et 2027”.
Pour y arriver, Gabriel Attal entend “renforcer les moyens humains": dans la fraude fiscale, “281 agents ont été recrutés l’an dernier, et 350 le seront en 2024”. Côté fraude sociale, c’est 1.000 agents que le gouvernement veut recruter d’ici 2027.
Par ailleurs, il a aussi salué le bilan des douanes face au “tsunami blanc”: elles ont saisi “41 tonnes de cocaïne à l’étranger” et “multiplié par deux” les saisies de stupéfiants avant qu’ils n’arrivent sur le sol français.