
© France Clarinval
L'actualité gastronomique n’est pas faite que d'ouvertures de restaurants, mais aussi de changements de chefs ou d'exploitants. Trois exemples récents.
1. QUAND PAPA EST PARTI…
Cela fait bientôt 30 ans que le restaurant Notaro régale les amateurs de cuisine italienne. On adore la manière dont le chef Sandro s’inspire des terroirs régionaux pour cuisiner des suggestions originales et variées. On se laisse faire à la suggestion des vins, tant la cave est riche et bien pensée. On rit sous cape quand la table voisine ose demander du fromage avec ses linguine vongole (un crime de lèse-majesté qu’aucun Italien ne vous pardonnera). Et on se lèche les babines en lisant la liste de pizza.
Tout ce qui fait de ce restaurant un incontournable des spécialités de la péninsule. Tout ce qu’a construit Mario Notaroberto, avec bonhomie et générosité, avec une équipe fidèle et… avec son fils Livio.
Progressivement, papa Mario se retire dans son Italie natale où il produit du vin, gère une résidence touristique au milieu des vignes et des champs et continue à traquer les bons produits, notamment l’huile d’olive de son frère.
Le fils Livio veut maintenant faire entrer le Notaro dans son époque avec des changements plus ou moins importants qui ne perturberont pas les habitués, mais attireront un nouveau public. Et avant de relooker le logo et de dépoussiérer les lieux, c’est à la carte qu’il s’attaque.

Strascinati, alici, burrata e Raffermo
Bien évidemment, il ne transige pas sur la qualité des produits, mais veut balayer les classiques et apporter des nouvelles spécialités. Exit les penne al arrabiata, les tortelini panna e prosciuto, bienvenue aux paccheri avec lard, ricotta et tomates, aux fusillis à la saucisse calabraise (la piquante et très appréciée Nduja).
De nouvelles pizzas font aussi leur apparition, notamment une "blanche", sans tomate avec de la mortadelle, ricotta et parmesan. Au rayon viande, on se réjouit de voir une entrecôte au gros sel, de la joue de porc cuite à basse température.
Une fois la nouvelle carte bien maîtrisée, les suggestions de l’ardoise reviendront.
2. PAS QUE DE L’EAU À MONDORF
Après quelques années de tergiversations pour "mettre de l’ordre, repenser l’offre et recruter une nouvelle équipe", Jeremy Schwachhofer le directeur de la restauration du Domaine thermal de Mondorf tient son concept – ou plutôt ses concepts - pour les restaurants du domaine.
L’idée maîtresse et commune est de «proposer une cuisine saine et équilibrée alliant saveurs et produits du terroir et bio». Une sorte d’évidence à l’heure où chacun revendique la fraîcheur et la saisonnalité et que Loïc Benatru, chef exécutif des cuisines du Domaine thermal depuis 2016 tient à appliquer dans l’ensemble de la restauration.
Il tient à cœur des équipes de bien identifier et mettre en évidence les spécificités de chaque établissement. Au Maus Kätti, le jeune chef Peter Larroque met en œuvre une cuisine de brasserie où les plats minceur ou équilibre ont toute leur place.
Au Chalet am Brill, on est sur une cuisine traditionnelle de terroir, menée par le chef alsacien Lionel Schweizer. Les enfants y sont les bienvenus grâce à la grande aire de jeux. Au sein de l’espace wellness du Domaine, le 36 propose une petite restauration simple et rapide.

Pot-au-feu de canard aux légumes racines.
Mais c’est au De Jangeli que l’évolution est la plus intéressante à suivre. Après le départ de Gilles Goess, c’est un nouveau chef qui a donné une impulsion bistronomique au restaurant. Sébastien Domange a fait ses armes en France et au Luxembourg (Léa Linster, Les Roses, L’Agath, Oberweis…) d’où il retient le savoir-faire et la rigueur des grandes adresses.
La bonne idée est de proposer un menu en trois services pour 51 euros (32 euros pour un plat seul, 40 ou 43 pour entrée – plat ou plat - dessert). Ces trois plats sont à piocher dans un vaste menu. On a pu déguster un tartare de St Jacques relevé au yuzu et wasabi, un pot-au-feu de canard aux légumes racines tout à fait convaincant et une mandarine givrée proposée par le chef pâtissier Bertrand Gehin.
3. KIM ANNEXE L’ANNEXE
L’Annexe est une de ces adresses incontournables qu’on se refile entre gastronome: un excellent rapport qualité/prix, un service sans faille, une assiette toujours réussie. Voilà quelques semaines, François Moreau qui y avait succédé avec succès à Arnaud Magnier dont ce fût la deuxième adresse, annonçait qu’il pliait bagage et livrait l’affaire à Kim Mathekowitsch et Jörg Flohr.
Le couple étant plus connu pour ses yachts à Majorque que pour sa cuisine, on a craint que l’établissement tourne à l’adresse bling où l’accueil et le cadre comptent plus que l’assiette. On a été mauvaise langue…
Dans leur bagage, Kim et Jörg ont amené Peter Peerapong, un chef thaï qui a déjà travaillé avec eux. Et force est de constater qu’il sait cuisiner. Le tartare de saumon façon thaïe est particulièrement relevé, épicé comme il faut et savoureux, le pavé de thon à l’émulsion de curry rouge ravi les papilles et l’œuf parfait en croûte sur son nid, spaghetti de courgettes, tofu caché est très esthétique et goûteux.

L'œuf parfait en croûte sur son nid, spaghetti de courgettes, tofu caché.
La nouvelle direction a voulu marquer la différence entre le midi – une carte brasserie bien pensée avec les entrées comprises à partir de 19 euros, mais plus généralement 25 – et le soir – nappes, lumière tamisée et carte plus élaborée lorgnant vers la gastronomie (dans les années 90, on disait "semi-gastronomique", aujourd'hui, on utilise "bistronomie").
On est content que Sébastien soit resté fidèle au service – et aux bouteilles taille magnum pour les vins au verre – on espère que la patronne trouvera la juste mesure entre être enjouée et être obséquieuse et on attend de voir comment la distinction midi/soir va séduire ou pas les clients.