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Sur la route, se plaindre des "autres" est le premier réflexe des usagers. Quitte à en oublier que le véritable ennemi, ce sont parfois les infrastructures défaillantes.
La mort de Paul Varry, cycliste parisien tué par un automobiliste qui est soupçonné de l'avoir écrasé volontairement, a rappelé une triste banalité : la route est un des lieux où les colères du quotidien rejaillissent parfois très vite. Trop vite. Et souvent sur celles et ceux qui partagent nos galères.
Des noms d'oiseaux qui s'envolent dans les bouchons, un partage parfois hasardeux de la route entre usagers... Jusqu'aux débats enflammés sur la motorisation parfaite et universelle à choisir pour son véhicule (comme s'il fallait obligatoirement dénigrer les autres, alors que toutes cohabitent plutôt bien jusqu'ici). Bref, sur la route, il suffit de piocher un sujet pour s'engueuler un bon coup.
Cyclistes contre piétons. Piétons contre automobilistes. Automobilistes contre poids lourds... Une étude a d'ailleurs démontré que la route créait un discret mais puissant sentiment d'appartenance selon son mode de déplacement. Traduction : on aura toujours tendance à voir le mal et le danger... chez les autres ! Les "autres" prenant des formes variées : une même personne sera "pro-piéton" tant qu'elle arpentera le trottoir, puis deviendra "pro-automobiliste" une fois installée au volant de sa voiture.
Ce qui n'empêche pas les usagers de la route de se fâcher avec celles et ceux qui se déplacent de la même manière qu'eux (qui n'a jamais eu affaire à cet automobiliste qui vous colle d'un peu trop près, quelques appels de phares en bonus ?).
Le problème, ce sont les infrastructures
Pour rendre notre quotidien un peu plus supportable, il est encore temps de se détendre un peu.
Et de se rappeler que le véritable ennemi, ce ne sont pas forcément les "autres", mais surtout les infrastructures. Elles représentent bien le véritable problème de fond.
Nous avons tous en tête un parking sans accès piéton protégé. Une route jonchée de nids-de-poule. Une piste cyclable qui ne débouche sur rien...
Si les comportements humains sont souvent la source quotidienne de débordements (et ils sont tout à fait condamnables), ce sont aussi ces imperfections urbaines qui pourrissent nos déplacements.
Plutôt que d'insulter cet automobiliste mal garé, ou ce "trottinettiste" qui circule sur le trottoir, pourquoi ne pas concentrer notre énergie vers ceux qui aménagent nos rues ? Et leur rappeler que ces investissements dans la voie publique, certes coûteux, sont ceux qui facilitent nos trajets et protègent nos vies.
Sans piste cyclable bien aménagée, les cyclistes/trottinettistes/pilotes de gyroroues circuleront toujours sur la route. Sans trottoir suffisamment large ou passage protégé bien situé, un piéton devra toujours se mettre en danger sur la chaussée. Et sans ces infrastructures, l'automobiliste sera toujours convaincu que les autres empiètent sur "son" espace.
D'ailleurs, en termes de bienveillance, il est peut-être bon de se souvenir qu'aucun mode de déplacement n'est franchement plus vertueux qu'un autre : il y a "autant de cons à vélo qu'en voiture"reconnaissait même Thibaut Chardey, coprésident d'une association lyonnaise... de promotion du vélo. Signe qu'il est grand temps de lever le pied et de respirer un bon coup.