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Les sachets de nicotine sont déjà interdits en Belgique et risquent d'être prohibés en France, aux États-Unis et surtout en Suède. Mais qu'en est-il au Luxembourg ?
Au Grand-Duché, les décideurs politiques cherchent un terrain d'entente qui mettrait en œuvre une réglementation stricte pour protéger les jeunes. Toutefois, certains producteurs estiment que ces réglementations sont si sévères qu'elles équivalent à une véritable interdiction.
Philip Morris est l'un de ceux qui demandent une révision. Le géant américain du tabac a dépêché une équipe de conseillers de Bruxelles au Luxembourg, dans l'espoir d'influencer le débat. Leur mission officielle ? Pas de lobbying, insistent-ils, mais de l'éducation. Une question d'interprétation.
Philip Morris se dit engagé dans la lutte contre le tabagisme.
Miguel Matos, directeur de la société pour le Benelux, affirme que les données scientifiques sont claires:
"le problème avec les cigarettes n'est pas le tabac ou la nicotine, mais la combustion. Lorsque vous allumez une cigarette, vous inhalez des milliers de produits chimiques. Cela peut être évité si rien ne brûle. Les sachets de nicotine sont placés sous la lèvre et délivrent de la nicotine sans combustion".
Actuellement, les produits du tabac et de la nicotine non combustibles (y compris les vapes, le tabac chauffé et les sachets de nicotine) représentent déjà 40% des ventes nettes mondiales de Philip Morris. L'entreprise considère ces produits comme l'avenir.
Cependant, une proposition de loi luxembourgeoise fixerait un plafond de nicotine si bas que "cela n'aurait pratiquement aucun sens pour les fumeurs de passer à ces produits", explique M. Matos.
Les experts en santé publique ne sont pas du tout d'accord. La Fondation Cancer, par exemple, affirme que les sachets de nicotine présentent un risque important, en particulier pour les jeunes.
Lex Schaul, expert en santé publique au sein de la fondation, met en garde : "le problème est la forte teneur en nicotine de ces sachets. Certains contiennent jusqu'à 20 milligrammes par sachet, contre seulement 1 milligramme par cigarette. Les jeunes, qui sont particulièrement sensibles à la nicotine, risquent de s'intoxiquer et d'avoir des nausées".
Il note également que les sachets aromatisés, souvent infusés à la menthe ou à l'eucalyptus, sont très attrayants pour les jeunes utilisateurs, ce qui rend la dépendance plus probable.
Néanmoins, Philip Morris nie les accusations de ciblage des jeunes.
L'entreprise affirme qu'elle est disposée à adapter l'emballage et les arômes pour dissuader les mineurs.
"Nous pouvons réduire les arômes pour les rendre moins attrayants, concevoir des emballages qui empêchent les jeunes consommateurs d'y accéder facilement et collaborer avec les détaillants", explique M. Matos.
L'entreprise reconnaît que les réglementations et les taxes sont nécessaires, mais affirme qu'une interdiction pure et simple ne ferait qu'alimenter le marché noir.
Margot Heirendt, directrice de la Fondation Cancer, rejette toutefois ce raisonnement, affirmant que les préoccupations de santé publique l'emportent largement sur ce type d'arguments. Néanmoins, les deux parties reconnaissent une réalité politique: les taxes sur le tabac restent une source de revenus importante pour l'État luxembourgeois, générant jusqu'à 2 milliards d'euros par an, principalement grâce aux cigarettes traditionnelles.