Se rendre chez son médecin traitant est tout à fait normal pour beaucoup d’entre nous. Pour de nombreux résidents venus d’autres coins du monde, ce n'est pas nécessairement le cas.
Au Luxembourg, 30% des résidents n'ont pas de médecin généraliste, a indiqué récemment sur RTL le docteur Chris Roller, président de l'AMMD, l'Association des médecins et médecins-dentistes.
L'une des raisons est que beaucoup de patients ne connaissent pas la médecine primaire, le travail des médecins traitants. Ils ignorent également comment fonctionne notre système de santé, explique le docteur Kevin Prohaska du Cercle des médecins généralistes. "Car dans de nombreux pays, il existe seulement des polycliniques, les urgences, là-bas, la structure des maisons médicales, par exemple, n'est pas du tout connue.”
Utile de consulter d'abord le généraliste
Ou bien les patients se rendent directement chez le spécialiste. C'est de plus en plus souvent le cas au Luxembourg. Alors qu'il est utile de consulter un généraliste, parce que des pathologies peuvent avoir différentes causes. Une douleur à la poitrine, par exemple. “Cela peut être cardiaque, cela peut être pulmonaire, mais cela peut aussi être orthopédique. Le patient croit: 'j'ai mal à la poitrine, alors je cours chez le cardiologue, car c'est le pire qui puisse être.' Mais finalement ce n'est pas ça. Le médecin primaire, le médecin généraliste, pose son diagnostic globalement et peut ensuite orienter si nécessaire.”
En outre, les médecins généralistes, s’ils sont équipés pour cela, peuvent aussi réaliser des analyses de sang ou des échographies et recoudre des plaies.
Il y a aussi une pénurie de généralistes
Le Luxembourg ne compte pas suffisamment de généralistes. Ils sont entre 800 et 900 à être inscrits au Collège médical. Le docteur Prohaska estime toutefois que seuls 200 à 300 d'entre eux sont actifs dans les soins de santé primaires. Le double serait nécessaire. De nombreux généralistes approchent aussi de l'âge de la retraite.
La problématique n'est pas nouvelle. La ministre de la Santé et de la Sécurité sociale, Martine Deprez, indique un certain nombre de pistes pour y remédier: “Ces médecins généralistes, il faut mieux les connecter, avec les hôpitaux et les spécialistes. Et les généralistes sont aussi en train de s'organiser. Nous avons plusieurs centre médicaux, dans lesquels se rassemblent quatre ou cinq généralistes. Et avec ces généralistes, nous allons lancer une campagne en faveur du médecin traitant, pour que les patients voient chez qui ils doivent se rendre et ce qu'apporte le médecin traitant."
Le docteur Prohaska plaide même pour un cours d'éducation à la santé dans les écoles. Beaucoup de gens n'ont plus de paracétamol à la maison, ignorent quoi faire s'ils ont de la fièvre ou mal au ventre. De plus, les recherches en ligne auprès de "docteur Google" inquiètent aussi les patients. “C'est pourquoi je pense que s'il y avait une matière comme celle-là, cela aiderait beaucoup.”
Un meilleur dossier de soins partagé numérique
Afin de rendre la profession de généraliste plus attractive, il faut créer davantage de cabinets regroupant plusieurs médecins, pour tenir compte de l'équilibre vie professionnelle-vie familiale. Une meilleure mise en réseau informatique entre docteurs est aussi importante. Surtout entre ceux qui n'exercent pas dans le même cabinet, mais en réseau en se partageant des permanences. Pour Kevin Prohaska, il est aussi essentiel de revoir le dossier de soins partagé et de l'améliorer. Il doit également jouer un rôle important dans la prise en charge des patients atteints de maladies chroniques. Il ne semble toujours pas fonctionner comme ce serait souhaitable:
“Des patients nous racontent même, qu'ils nous ont désignés comme médecins de référence. Et nous n'y avons pas accès! Cela bloque énormément au niveau informatique. C'est très compliqué pour notre population âgée, parmi laquelle ils sont nombreux à avoir besoin d'un dossier de référence”, indique le généraliste d'Hosingen.
Et les prix élevés de l’immobilier ne sont pas propices non plus à attirer de jeunes généralistes venus de l'étranger. Le représentant du Cercle des médecins généralistes souligne encore qu'il existe de grandes différences entre les revenus d'un généraliste et ceux de ses confrères dans d'autres spécialités.