Les délais d’attente pour l’opération à l’hôpital devenant de plus en plus longs, trois ophtalmologistes opèrent désormais la cataracte dans leur cabinet privé.

Avec deux autres ophtalmologistes, le docteur Carla Schmartz gère un cabinet dans le quartier Gare à Luxembourg-ville. Ils y proposent de la chirurgie réfractive pour améliorer la vision ainsi que des interventions esthétiques. Depuis 2022, ils y opèrent aussi la cataracte. Une décision prise parce que les délais d’attente à l’hôpital, où elle et ses associés continuent d’opérer, sont devenus de plus en plus longs, explique le docteur Schmartz. Avant la pandémie, ils étaient de six à douze mois, ensuite ils se sont encore allongés.

Les trois confrères ont alors décidé de proposer les opérations de la cataracte en cabinet et ont investi dans une deuxième salle d’opération ainsi que dans l’équipement nécessaire. Et cela, bien qu’ils ne puissent facturer que l’acte chirurgical pour l'opération de la cataracte. A la différence des hôpitaux, il n’est pas prévu pour l'instant que la Caisse nationale de Santé rembourse aux médecins en cabinet l'équivalent du "passage au bloc" à l'hôpital, à savoir les frais liés à la salle, à l’équipement, au matériel, à la stérilisation et au personnel.

Les patients, quant à eux, ne paient pas plus pour l’intervention qu’à l’hôpital, hormis un examen préalable de 185 euros. Cela signifie que les ophtalmologues travaillent à perte lorsqu'ils réalisent des opérations de la cataracte en cabinet.

Pour couvrir les coûts, les trois ophtalmologistes ont mis en place un modèle à plusieurs niveaux. Il y a bien sûr les mémoires d'honoraires. Ils essaient également de négocier de meilleurs prix avec les fournisseurs. De plus, la chirurgie réfractive, qui n’est pas remboursée par la CNS, contribue à compenser les pertes liées aux interventions de la cataracte.

Le cabinet d’ophtalmologie, où exercent aussi des ophtalmologistes non associés, réalise désormais environ 1.500 opérations par an, indique le docteur Tom Pavant, cofondateur. Environ 1.000 d’entre elles sont des opérations de la cataracte.

Grâce à une certaine flexibilité pour répondre à la demande des patients, les délais d’attente au cabinet sont désormais réduits à deux à trois mois.

Les trois ophtalmologues, qui se sont regroupés au sein d'une association de frais, espèrent que les responsables politiques prendront bientôt la direction promise et permettront certaines activités également en dehors des hôpitaux et de leurs antennes. Et qu'à ce moment-là, les coûts liés à l’opération seront pris en charge par la CNS. Dans le domaine de l’ophtalmologie, ces frais pourraient alors être nettement moins élevés qu’actuellement à l’hôpital, estime le docteur Schmartz :

Si l’on créait un passage au bloc ambulatoire, celui-ci serait bien inférieur à celui d’une clinique, car nous n’avons pas à couvrir autant d’interventions différentes. À ce moment-là, on pourrait vraiment voir : ‘Quel matériel est nécessaire, qu’est-ce qui est juste et équitable pour financer ce que nous effectuons?’ Et je pense que cela serait nettement en dessous des coûts d’une clinique. Comme je l’ai dit, je ne peux vraiment parler que pour l’ophtalmologie, et principalement pour les injections intravitréennes et la cataracte. Pour le reste, je n’ai pas assez de connaissances”, souligne l’ophtalmologiste."

Les docteurs Schmartz et Pavant ne partagent pas la crainte que l’ouverture à l’extra-hospitalier entraîne une pénurie de médecins à l’hôpital. Tous trois continuent à travailler à l’hôpital et à assurer les gardes. Les patients présentant un risque de complications ou nécessitant des interventions plus lourdes ne peuvent être opérés qu’à l’hôpital. Si la cataracte, qui reste l’opération la plus pratiquée au monde, pouvait être réalisée en cabinet, cela libérerait des créneaux à l’hôpital pour des interventions plus complexes.

Avec le même argument, les Hôpitaux Robert Schuman, où est installé le Service national d’ophtalmologie spécialisée, ont annoncé qu’ils proposeront des opérations de la cataracte dans une antenne hospitalière à la Cloche d’Or courant 2026.