Aujourd'hui, c'est la Saint-Nicolas, un jour férié pour les écoles primaires locales au Luxembourg, où les jeunes enfants fêtent le Kleeschen.

Les fêtes approchent, les marchés de Noël ouvrent dans tout le Luxembourg, et chaque enfant attend avec impatience la visite du Kleeschen. Aujourd’hui, jour de Kleesechersdag, est une journée fériée traditionnelle pour les élèves des écoles primaires luxembourgeoises. Cette célébration de Saint-Nicolas, également connue dans des pays comme la Belgique, les Pays-Bas, certaines régions de France et d’Allemagne, reste une tradition bien vivante au Luxembourg.

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© Alison Freeman

Vous connaissez probablement le Père Noël, ou son homonyme anglais Santa Claus, mais peut-être aussi d’autres figures similaires comme Kris Kringle, Sinterklaas, Saint Nick, Belsnickel, Olentzero, Mikulás, Christkind, Joulupukki, Ded Moroz, La Befana, les Yule Lads, Agios Vassilis, Tomte ou même Krampus. Ce dernier, un personnage cornu et menaçant du folklore des Alpes, est parfois comparé au Housiker, l’acolyte redoutable et effrayant qui accompagne Saint-Nicolas !

Si vous vivez au Luxembourg, il y a de fortes chances que le Kleeschen fasse partie de vos traditions familiales. Pour les familles avec de jeunes enfants, comme celle de Nisha et son mari, fêter Kleeschen et le Père Noël est souvent une affaire simple, sans confusion. Vivant au Luxembourg depuis quatre ans avec leurs deux fils, ils apprécient ces traditions sans avoir à expliquer les différences, leurs enfants étant encore petits et uniquement intéressés par les cadeaux.

Dans un pays où près de 50 % de la population a grandi dans un environnement multiculturel, les traditions s’entrelacent souvent, rendant la définition d’un "Noël luxembourgeois" parfois floue. Mais pour les luxembourgeois, le personnage central reste sans conteste le Kleeschen, chéri et attendu chaque année avec enthousiasme par les enfants.

Par exemple, Letitia, qui a quitté Londres pour s’installer à Steinsel avec son mari espagnol, célèbre plusieurs traditions : celles des Rois Mages, le Kleeschen, et Santa Claus. À Strassen, une autre famille, luxo-américaine, a fusionné Kleeschen et le Père Noël en une seule figure. Chez eux, il passe le 6 décembre pour distribuer des friandises, puis revient la veille de Noël pour le grand moment avec les cadeaux.

Kleeschen vs Père Noël

La question se pose alors : quelle est la différence entre le Père Noël et le Kleeschen ? Tous deux sont liés à la figure de Saint-Nicolas, arborent une barbe blanche, sont vêtus de rouge et apportent des cadeaux. Il n’est donc pas surprenant que les enfants puissent s’y perdre un peu. Pourtant, leurs acolytes donnent le ton : d’un côté, vous avez un personnage menaçant, vêtu d’un manteau à capuche sombre et armé de bâtons, et de l’autre, des lutins joyeux et huit rennes amicaux.

Le Kleeschen puise son inspiration dans Saint-Nicolas de Myre et est traditionnellement représenté en habits d’évêque : une robe rouge, une mitre, un manteau et une crosse. Il visite les enfants la veille du 6 décembre, accompagné de son acolyte Housiker, après des semaines de préparation excitantes. Les enfants placent leurs chaussures devant la porte en espérant que Kleeschen les remplisse de friandises et de cadeaux... plutôt que de bouts de bois apportés par Housiker !

Pendant les semaines qui précèdent la fête, de nombreux événements dédiés au Kleeschen se déroulent à travers le Luxembourg. Les enfants y rencontrent le personnage, chantent la traditionnelle chanson "Léiwe Kleeschen, Gudde Kleeschen" et reçoivent un sac de friandises appelé Titchen. Il fait également des apparitions dans les écoles, toujours escorté par Housiker, pour récompenser les enfants sages et, parfois, rappeler aux plus turbulents de bien se comporter.

CAN WE INBED SONG HERE?

À l’époque moderne, le Santa Claus américain trouve également ses racines dans les premières représentations de Saint Nicolas de Myre, fusionnées avec le personnage anglais du Père Noël, qui portait à l’origine des robes vertes. C’est la littérature moderne qui a façonné l’image de l’homme jovial et corpulent, vêtu d’un costume rouge et blanc, que nous associons aujourd’hui au pôle Nord, à Mère Noël, aux lutins et aux rennes. Ce Santa Claus moderne rend visite aux enfants la nuit du 24 décembre pour leur apporter des cadeaux.

Toutefois, cette évolution a aussi conduit à des divergences d’opinions parmi les différentes confessions chrétiennes, certaines acceptant cette figure festive, tandis que d’autres la rejettent, la jugeant éloignée de l’héritage chrétien originel.

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St Nicholas de Myre, saint patron des enfants

Saint Nicolas, un saint chrétien du IVe siècle, serait né aux environs de l'an 280 à Patara, près de Myra, dans l'actuelle Turquie. Connu comme le saint patron des enfants, il s’est distingué par son habitude d’offrir secrètement des cadeaux aux enfants de son vivant. Cette tradition de générosité s’est poursuivie après sa mort, survenue le 6 décembre 343, date à laquelle des offrandes furent faites en son honneur. Aujourd’hui encore, il est coutume de célébrer cette journée en offrant des présents aux enfants.
 
La tradition du Kleeschen

La tradition luxembourgeoise veut que les enfants placent leurs chaussures ou chaussons devant la porte chaque soir, à partir du 20 novembre, jusqu’à l’arrivée tant attendue du Kleeschen le 5 décembre. Ceux qui se sont bien comportés y découvrent chaque matin une friandise, tandis que les plus malchanceux, jugés moins sages, trouvent des bâtons laissés par le Houséker, l’acolyte du Kleeschen. Une méthode astucieuse pour inciter à la bonne conduite !

Cependant, toutes les familles ne suivent pas cette coutume de manière identique. Beaucoup préfèrent attendre la veille du 5 décembre pour sortir les chaussures, ce qui peut provoquer des jalousies. Emmanuelle, expatriée du Royaume-Uni vivant à Munsbach depuis six ans, raconte comment certains enfants de l’école locale étaient contrariés de ne pas avoir reçu de friandises après avoir entendu leurs camarades parler de chocolats découverts chaque matin. Ces variations dans les traditions familiales peuvent parfois décevoir les plus jeunes.

Mais qui est donc cet inquiétant Houséker, fidèle serviteur de Kleeschen ? Selon la légende, le Houséker serait l’incarnation d’un boucher malveillant. L’histoire raconte qu’un jour, trois garçons égarés en chemin vers le marché furent attirés dans la boutique d’un boucher qui avait l’intention de les tuer pour en faire des saucisses. Heureusement, Saint-Nicolas entendit leurs cris, intervint pour les sauver et punit le boucher en le condamnant à devenir son serviteur pour l’éternité.

Au Luxembourg, le Houséker tire son nom de la région de Housen, un lieu emblématique de la guerre des paysans de 1798. Les vêtements qu’il porte, d’inspiration paysanne, rappellent ces temps troublés, où les habitants de Housen soutenaient la révolte. Aujourd’hui, il reste une figure incontournable des traditions du Kleeschen, entre terreur et fascination.
 
Sinterklass 

Aux Pays-Bas, le Kleeschen est connu sous le nom de Sinterklaas, et est accompagné de Zwarte Piet, son acolyte et équivalent néerlandais du Houséker luxembourgeois. La légende de Sinterklaas aurait été importée par les colons hollandais au XVIIe siècle lorsqu'ils ont fondé New Amsterdam, aujourd'hui New York City. Avec cette tradition, ils ont également apporté l'habitude d'offrir des cadeaux le 6 décembre, jour de la fête de Saint-Nicolas.

Au fil du temps, Sinterklaas s’est transformé en un personnage plus laïque à New York, donnant naissance au concept moderne du Père Noël. Ce changement a été fortement influencé par des œuvres littéraires, notamment un récit satirique intitulé "L’histoire de New York", écrit par Washington Irving au XIXe siècle. Bien qu’Irving n’ait pas de lien direct avec la culture hollandaise, il s’est inspiré de Sinterklaas pour écrire une version humoristique et fictive de l’histoire néerlandaise de Manhattan. C’est dans ce livre que des éléments aujourd’hui iconiques, comme le traîneau volant et un Père Noël corpulent, ont été introduits – bien qu’ils soient le fruit de l’imagination d’Irving et non des traditions originales.

Par la suite, d’autres écrivains et poètes ont enrichi la légende en y ajoutant les rennes, les lutins et le pôle Nord. Ce même ouvrage serait également la première source à mentionner la cheminée comme passage de Santa Claus pour distribuer les cadeaux.

Les débuts du père noël tel qu'on le connaît

La plupart des gens connaissent le célèbre poème "Une visite de saint Nicolas" (plus communément appelé "The Night Before Christmas"), publié pour la première fois en 1823. Ce qui est moins connu, c’est qu’un poème illustré intitulé "Old Santeclaus with Much Delight" avait été publié anonymement deux ans plus tôt, en 1821, à New York. Ce texte est considéré comme la première représentation artistique publiée du Père Noël. Dans cette version, il porte du rouge, mais pas sous la forme d’un habit épiscopal, et c’est aussi la première fois qu’il est représenté avec un traîneau et des rennes. Notamment, Old Santeclaus introduit une nouveauté : la visite la veille de Noël, déplaçant ainsi la tradition du 6 décembre, jour de la Saint-Nicolas, à la date que nous connaissons aujourd’hui.

Le 23 décembre 1823, le périodique "The New York Daily Sentinel" a publié le poème Une visite de saint Nicolas, qui deviendra l’un des textes les plus influents pour façonner l’image moderne de Santa Claus. Dans ce poème, Saint-Nicolas est décrit comme un homme potelé et jovial, "rondouillard et dodu", avec "un petit ventre qui tressautait comme de la gelée lorsqu’il riait". Bien qu’un traîneau miniature et des "petits rennes" puissent paraître étranges pour un personnage aussi corpulent, qui voudrait gâcher une histoire aussi charmante ?

C’est également dans ce poème que les rennes du Père Noël sont pour la première fois nommés : Dasher, Dancer, Prancer, Vixen, Comet, Cupid, Dunder et Blixem. Les deux derniers noms, issus de mots néerlandais signifiant tonnerre et foudre, ont été ultérieurement germanisés en Donner et Blitzen, des noms désormais familiers.

Quant à la paternité du poème, elle reste sujette à controverse. Clement Clarke Moore est généralement crédité de l’œuvre, mais certains soutiennent que l’auteur véritable est Henry Livingston Jr., un poète amateur. Moore n’aurait revendiqué le poème qu’en 1837, soit neuf ans après la mort de Livingston, alimentant les spéculations sur une possible appropriation littéraire.

Illustrations du Père Noël 

L’illustrateur germano-américain Thomas Nast, célèbre pour ses dessins politiques incisifs, a joué un rôle clé dans la création de l’image du joyeux Saint-Nicolas que nous connaissons aujourd’hui. Il est également considéré comme l’origine de la légende selon laquelle le Père Noël résiderait au pôle Nord. En 1862, Nast dessina pour la première fois le Père Noël, fusionnant la figure traditionnelle de Saint-Nicolas avec des éléments issus du folklore allemand, notamment l’idée des lutins.

NAST 1862 IMAGE

Le mythe selon lequel la société Coca-Cola aurait "créé" le Père Noël est largement répandu, mais il s’agit bien d’un mythe urbain. Certes, Coca-Cola a considérablement influencé l’image moderne du Père Noël grâce à sa campagne marketing emblématique des années 1930. L’illustrateur Haddon Sundblom a immortalisé un Père Noël jovial vêtu de rouge et blanc, des couleurs qui correspondaient astucieusement à celles de la marque. Cependant, le Père Noël avait déjà été représenté dans ces couleurs bien avant cette période.

La contribution de Coca-Cola réside surtout dans la diffusion et la popularisation de ce joyeux personnage auprès d’un large public.

Une illustration antérieure de Thomas Nast, parue en couverture de Harper's Weekly le 3 janvier 1863, montre le Père Noël sous un jour tout à fait différent, dans un contexte fortement marqué par la guerre de Sécession. Ce dessin, ouvertement propagandiste, le montre vêtu d’une veste étoilée et d’un pantalon rayé, symboles de son soutien à l’Union. Assis sur un traîneau tiré par des rennes, il distribue des cadeaux aux soldats de l’Union tout en tenant une marionnette portant l’inscription "JEFF" autour du cou, une représentation moqueuse du président confédéré Jefferson Davis. Cette œuvre démontre comment le Père Noël a parfois servi de figure politique autant que festive.

L'idée d'une Mère Noël pour le Père Noël a peut-être été introduite pour la première fois au milieu du XIXe siècle, dans la nouvelle "A Christmas Legend", publiée en 1849 par le missionnaire James Rees.

Veille de noël

 
Au Luxembourg, la tradition veut que les cadeaux de la veille de Noël soient apportés non pas par Kleeschen ou le Père Noël, mais par Christkind (l'enfant Jésus), qui dépose des vêtements et des livres sous le sapin durant la nuit. Cependant, les coutumes varient d’une famille à l’autre, et certaines célèbrent le Père Noël la veille de Noël. On s’attend alors à ce qu’il descende par la cheminée pour déposer des cadeaux pendant que les enfants dorment. Heureusement, s’il n’y a pas de cheminée, le Père Noël dispose d’une clé magique qui lui permet d’ouvrir toutes les portes du monde !

Autrefois, la tradition voulait que les enfants laissent un verre de lait et des biscuits pour le Père Noël. Dans des pays comme le Royaume-Uni, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, on offrait parfois du sherry ou de la bière accompagnés de pâtés en croûte. Au fil des ans, ces traditions ont évolué et se sont mélangées, intégrant aussi des éléments comme une carotte pour Rudolph, le renne au nez rouge !

Poème ‘Old Santeclaus with Much Delight’ en anglais

Old Santeclaus with much delight
His reindeer drives this frosty night,
O'r chimney tops, and tracts of snow,
To bring his yearly gifts to you.

The steady friend of virtuous youth,
The friend of duty, and of truth,
Each Christmas eve he joys to come
Where peace and love have made their home.

Through many houses he has been,
And various beds and stockings seen;
Some, white as snow, and neatly mended,
Others, that seemed for pigs intended.

To some I gave a pretty doll,
To some a peg-top, or a ball;
No crackers, cannons, squibs, or rockets,
To blow their eyes up, or their pockets.

Where e're I found good girls or boys,
That hated quarrels, strife and noise,
I left an apple, or a tart,
Or wooden gun, or painted cart;

No drums to stun their Mother's ear,
Nor swords to make their sisters fear;
But pretty books to store their mind
With knowledge of each various kind.

But where I found the children naughty,
In manners crude, in temper haughty,
Thankless to parents, liars, swearers,
Boxers, or cheats, or base tale-bearers,

I left a long, black, birchen rod,
Such as the dread command of God
Directs a Parent's hand to use
When virtue's path his sons refuse.