Fini le paquet logement et ses incitatifs fiscaux: le marché de l'immobilier doit désormais retrouver un équilibre sans se reposer sur les mesures gouvernementales. Le problème, c'est que la situation n'a pas beaucoup évolué depuis le début de la crise, en 2022.

Trois ans après les premières hausses des taux d'intérêt, le marché de l'immobilier luxembourgeois est toujours en convalescence. Temporairement boosté par les aides logements annoncées au cours de l'année 2024, il doit désormais retrouver un équilibre alors que la situation n'a pas forcément beaucoup évolué. Les taux fixes long terme avoisinent toujours les 4%, les prix du neuf n'ont pas autant baissé que l'on pouvait l'espérer et le pouvoir d'achat des ménages n'a pas assez progressé pour résoudre cette équation.

44. La pénurie de logements s'aggrave

Concrètement, cela signifie deux choses: le Luxembourg ne construit pas assez de logements et le secteur de la construction est toujours dans l'impasse. Un secteur "en proie à l'incertitude" avec une visibilité "à très court terme", affirme Tom Wirion, directeur de la Chambre des métiers, dans "La Bulle Immo". La faute à un marché qui ne connaît pas la relance tant attendue depuis près de trois ans. En témoignent les chiffres dévoilés par l'Observatoire de l'habitat au début de l'été. Et la situation ne s'est pas améliorée depuis. "On ne voit pas de relance sur le marché", confirme Max Urbany, chef économiste à la Chambre des métiers.

La faute à qui? Pour Tom Wirion, la cause principale de cette crise reste le niveau élevé des taux d'intérêt bien qu'il admette que d'autres facteurs jouent également un rôle. Il souligne d'ailleurs l'écart entre les taux accordés par les banques luxembourgeoises et les banques belges (0,52 point de base). Un manque de compétitivité qu'il explique en soulignant le fait qu'au Luxembourg "cinq banques détiennent 90% des prêts immobiliers". C'est d'ailleurs ce qui lui fait dire "qu'un effort" de la part du secteur bancaire est nécessaire pour remédier à la situation sur le marché de l'immobilier.

Max Urbany reconnaît, pour sa part, que l'on "ne peut pas écarter la piste des prix". Surtout quand on sait que les baisses annoncées par l'Observatoire de l'habitat sur la VEFA ne sont pas forcément représentatives des prix pratiqués sur le marché. En effet, les entreprises qui ont vendu des biens neufs entre 2023 et 2024 n'avaient pas forcément toujours le choix que de baisser leurs prix au-delà de ce qui pourrait sembler raisonnable. Dans ce contexte, l'économiste attire l'attention sur les dangers d'une telle trajectoire. "On a calculé au moins 6.000 logements manquants entre 2022 et aujourd'hui", a-t-il souligné. Signe que la pénurie de logements s'aggrave au Luxembourg.

D'autant plus que les calculs de la Chambre des métiers se reposent sur des moyennes "pré-crise" qui ne suffisaient déjà pas à répondre à la demande croissante de logements. "Augmenter l'offre reste la solution ultime pour faire baisser les prix", rappelle Max Urbany. Et pour stimuler la construction de logements, la Chambre des métiers a des idées mais ne prétend pas détenir LA solution. "Une piste intéressante est celle d'un prêt à taux zéro (comme en France) dont une partie serait indemnisée par l'Etat", suggère le chef économiste de la CDM. À ses yeux, il faudrait qu'elle soit "ciblée socialement"pour avoir un l'effet escompté. Tom Wirion croit, lui, surtout en la simplification administrative "pour construire plus vite" et à des mesures "pour contrer la rétention foncière". "L'impôt foncier ne peut pas être un tabou", a-t-il insisté.

Et ça tombe bien puisque c'est exactement ce que prépare l'Etat luxembourgeois. En effet, une réforme de l'impôt foncier est en préparation et la simplification administrative pour le secteur de la construction est en marche. Le problème reste cependant toujours le même: si ces réformes sont adoptées, on n'en verra les effets que bien après 2030. Avec près de 10.000 nouveaux résidents chaque année, le Luxembourg ne peut évidemment pas se permettre d'attendre jusque là. "Sans logement, l'attractivité du pays disparaît", souligne le directeur de la Chambre des métiers.

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