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Le premier satellite d'observation luxembourgeois du Luxembourg Earth Observation System (LUXEOSys) a été lancé dans l'espace avec une fusée de SpaceX moins de douze minutes après son décollage. C'est le résultat d'une longue et coûteuse saga.
Le lancement a eu lieu avec succès mardi soir vers 21 h, heure locale, avec une fusée Falcon 9 de SpaceX depuis la base spatiale de Vandenberg, en Californie. Après 11 minutes et 42 secondes, le satellite gouvernemental luxembourgeois a été placé en orbite. À ce moment-là, la fusée, qui pourra être réutilisée, était déjà de retour en Californie.
Regardez la rediffusion de la mission:
Contrairement au satellite de communication Govsat, le satellite LUXEOSys n'est pas géostationnaire. Il a été placé en orbite basse synchrone avec le soleil -à une altitude d’environ 450 kilomètres- et effectue Avec 15 révolutions par jour autour de la Terre. "Le système sera capable de fournir jusqu’à 100 images à très haute résolution par jour, offrant une couverture mondiale", écrit la Direction de la Défense dans son communiqué. Avant de préciser que cette mise en service marque une étape importante "dans la mise en œuvre de la stratégie spatiale de défense du Luxembourg".

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Le système satellitaire à double usage sera utilisé pour un large éventail d’applications: des opérations militaires, des applications de sécurité, la surveillance des mouvements de troupes dans une zone de conflit, les catastrophes humaines et l’aide humanitaire, le soutien en cas de catastrophe naturelle et la surveillance du changement climatique.
Une saga pleine de rebondissements
Par ce système d’observation de la Terre ,la Défense luxembourgeoise "répondra à la demande croissante en images satellitaires gouvernementales". Une fois pleinement opérationnel début 2026, LUXEOSys permettra à la Direction de la défense d’agir en tant que fournisseur d’images pour l’UE, l’OTAN, l’ONU et d’autres partenaires de confiance.
Mais LUXEOSys est une véritable saga pleine de rebondissements. Le projet de satellite d'observation, avait été élaboré entre 2016 et 2018 sous la direction du ministre de la Défense Étienne Schneider (LSAP). En août 2018, peu avant les élections législatives, la Chambre des députés avait voté : les partis alors au pouvoir, le DP, le LSAP, les Verts, mais aussi les partis d'opposition CSV et ADR, ont voté en faveur du satellite. Seuls les deux députés de gauche ont voté "non".
Plus d'effort attendu en faveur de l'OTAN
L'un des principaux arguments en faveur du projet était que le Luxembourg devait augmenter sa contribution financière à l'alliance militaire de l'OTAN. Trump avait d'ailleurs déjà exercé des pressions sur lui lors de son premier mandat. La contribution du Grand-Duché s'est avérée plus que généreuse. 170 millions d'euros étaient prévus. Après les élections, les Verts, forts de leur bon résultat, ont pris le contrôle du ministère de la Défense avec François Bausch. En mars 2020, il s'est avéré que le satellite militaire coûterait presque deux fois plus cher !
L'opposition, dont le CSV à l'époque, s'était sentie trahie. Une douzaine de responsables de Schneider et Bausch ont été auditionnés. Une prolongation budgétaire n'a été approuvée par la coalition tripartite fin 2020. L'ancien ministre de la Défense, Étienne Schneider, avait déclaré mi-2021: "Si j'avais su rétrospectivement ce que tout cela signifierait, je ne l'aurais pas signé non plus". Lui et son ministère avaient approuvé le projet de 170 millions d'euros "en toute connaissance de cause", convaincus de sa "réussite".
Marchés privés
Un rapport spécial de la Cour des comptes de 2022 a montré qu'il était connu, avant même le vote de 2018, que ce montant ne suffirait pas. Un autre rapport de PwC, demandé par le ministre Bausch, avait auparavant soulevé plusieurs autres questions concernant les appels d'offres.
L'entreprise italienne OHB, dont l'entreprise luxembourgeoise Hitech est le fournisseur, a remporté le contrat avant même l'adoption de la loi. En mai 2020, le député pirate Sven Clement avait "soupçonné ou craint" que l'entreprise y ait vu une "opportunité en or", sans connaître le coût du satellite.
Comment, quoi et où ?
Une certaine confusion régnait également quant à savoir qui devait exploiter le satellite, traiter les images ou les données. L'armée été pressentie, sans qu'elle sache vraiment ce qui l'attendait. Mais aujourd'hui, c'est un autre opérateur qui s'en charge : un consortium au sein duquel la Direction de la Défense détient le pouvoir de décision. Les antennes devaient initialement être déployées au Centre militaire de Diekirch, mais c'est finalement Redu, près de Libramont, en Belgique, qui a été retenu.
Au départ, le satellite LUXEOSys devait être mis en orbite par Ariane en 2022, mais des problèmes ont entraîné une modification du programme et trois ans de retard ont suivi. Dans environ six mois, le satellite pourra observer la Terre pendant une durée de sept à dix ans, à des fins civiles, mais aussi militaires. Le satellite n'a ni été conçu pour l'espionnage, ni pour détruire des missiles ou des drones.
Outre le satellite d'observation militaire, le Luxembourg dispose également d'un satellite de communications militaires, Govsat-1. Le gouvernement prévoit de mettre en orbite un deuxième satellite Govsat prochainement.