37 robots parcourent les rayons de l’entrepôt de Dudelange pour préparer les commandes de la chaîne de supermarchés. Une première au Luxembourg.

Ce qui saute aux yeux en premier lieu quand on entre dans l’entrepôt, ce sont les énormes racks de douze mètres de haut escaladés en permanence par de petits robots autonomes.

La dégaine carrée de ces robots escaladeurs, les "Skypods", et les simples caisses en plastique qu'ils transportent ne semblent pas révolutionnaires à première vue. Mais en fonctionnement dans l'entrepôt, leur ballet est étourdissant: ils s'élancent à l'assaut des racks, jusqu'à plus de 12 m de haut, avant de rapporter leur prise de façon autonome à la station où se trouve l'opérateur.

L'entrepôt Auchan, basé dans le gigantesque parc logistique Eurohub à Dudelange, a choisi de robotiser son activité de logistique e-commerce. Le distributeur s'est équipé du système automatisé de stockage et de récupération développé par l'entreprise française Exotec.

L'environnement dans lequel se déplacent de manière autonome les 37 robots est entièrement clos et sans présence humaine. Ce qui réduit les risques liés à la circulation des employés dans l’entrepôt. La course de ces petites machines qui bougent dans toutes les directions pour extraire les produits des 15.300 bacs a quelque chose d'hypnotisant. Les robots acheminent ensuite les produits vers l'une des trois stations de préparation, où la commande est finalisée par des employés.

Amélioration des conditions de travail

"On a plusieurs avantages avec ce système. Le premier, c'est le confort de travail: ce n'est plus le collaborateur qui se déplace pour chercher le produit, c'est le produit qui vient au collaborateur et ça permet des gains de productivité" explique Clément de Saint-Louvent, responsable de l'exploitation e-commerce. La robotisation de l'entrepôt a en effet changé le travail de l'équipe.

Avant il fallait faire des kilomètres pour rassembler une commande, se baisser ou manipuler des produits en hauteur sur des étagères, ce qui pouvait entraîner des accidents. Aujourd'hui, ce sont les robots qui font ce travail pénible. Ce système automatisé augmente également le rendement de l'entrepôt. Jusqu'à 915 commandes sont préparées chaque jour.

Gain de place

L'installation a aussi permis d’optimiser l’espace de stockage. Martin Delattre, responsable des opérations logistiques, nous confie: "On est passé d'une surface de 2.200 m2 à 750 m2. Et ça nous a permis de rajouter des nouveaux produits. Depuis juillet, on est passé de 7.000 à 9.000 références sur les produits secs".

Tous les produits ne peuvent pas être transportés par les robots. Les produits lourds ou encombrants, les fruits et légumes, ainsi que les produits congelés sont toujours traités à part.

Menace sur l'emploi ?

Les robots sont-ils pour autant l'avenir de la distribution? En clair, les machines ne vont-elles pas remplacer les humains? L'enseigne précise en tout cas que la robotisation n'a pas eu d'impact sur la masse salariale dans l'entrepôt. Il y a toujours une cinquantaine de collaborateurs qui travaillent à la préparation des commandes chez Auchan Retail, et une cinquantaine d'autres collaborateurs qui travaillent sur les points de retrait Drive à la livraison des commandes aux clients.

"Les employés ont été consultés pour l'aménagement des postes de travail et la robotisation a vraiment été plébiscitée" explique Martin Delattre. "Dans la logistique, l'automatisation est devenue une nécessité. Ce sont des métiers pénibles et on trouve de moins en moins de candidats. Il y a des horaires décalés, des conditions difficiles, on travaille dans le froid et les robots sont un vrai plus pour les employés".
 
Pour Cécile Dolbeau-Bandin, sociologue à l'Institut pour l'Etude des Relations Homme-Robots, s'il n'y a pas de conséquence négative pour le moment sur l'emploi, au vu de la croissance du secteur logistique, il faut rester vigilant face à cette robotisation industrielle à grande échelle.
       
Dans ses entrepôts robotisés, l'entreprise de vêtements Uniqlo, qui utilise aussi des robots skypods, a réduit de 90% son personnel selon la presse spécialisée. "Il y a des conséquences sur l'environnement et notre empreinte carbone et le risque, dans certains pays, que des entreprises cherchent à remplacer les  humains," souligne la sociologue, appelant à "réfléchir à une éthique des robots".

Exotec, une pépite française

Exotec, le fabricant de ces petits robots escaladeurs, est désormais valorisé 2 milliards de dollars. L'entreprise est entrée en grande pompe dans le club des "licornes", ces startup indépendantes non cotées en  Bourse, valant plus d'un milliard de dollars.

Les premiers Skypods sont sortis des laboratoires en 2017, et le premier système est installé chez C-Discount en région parisienne, avec pour mission de densifier le stockage et accélérer la préparation de commandes. Ces robots envahissent les entrepôts, avec deux vastes centres logistique  d'Uniqlo au Japon, le dépôt de e-commerce Carrefour pour le sud de l'Ile-de-France, et un premier système chez Decathlon.

Au Luxembourg, pour l'instant, il n'y a que l'entrepôt d'Auchan qui utilise la technologie d'Exotec.