
Les autres députés européens luxembourgeois (CSV, LSAP, DP et Gréng) n'ont pas applaudi le coup d'éclat de Fernand Kartheiser lundi soir au Parlement européen.
L'eurodéputé ADR a tenté lundi une prise de parole en luxembourgeois devant le Parlement à Strasbourg, mais il a aussitôt été rappelé à l'ordre, car il ne s'agit pas de l'une des langues officielles de l'UE. Il a alors exprimé son souhait que sa langue nationale soit pleinement reconnue par le Parlement européen.
Certains eurodéputés évoquent un "numéro de cirque". C'est le cas d'Isabelle Wiseler-Lima, élue CSV au Parlement européen:
"Monsieur Kartheiser savait très précisément que son micro serait coupé. Ce sont les règles et c'était donc de l'exubérance pure et je ne trouve pas cela bien. Nous avons ici des sujets très sérieux que nous devons traiter, des sujets qui sont aussi très spécifiques au Luxembourg et je pense que nous devons nous faire connaître avec ces sujets, dire quelle est notre position. Nous devons forger ainsi notre réputation et pas avec un numéro de cirque."
Fernand Kartheiser a de toute façon adressé sa revendication au mauvais endroit. La question de la reconnaissance officielle de la langue luxembourgeoise par Bruxelles, doit être réglée par le gouvernement. Cela aussi, Fernand Kartheiser le savait très bien. Et que les pères fondateurs de l'UE aient parlé luxembourgeois, l'eurodéputé libéral Charel Goerens en doute:
"Je ne sais pas non plus d'où des gens peuvent tirer de la tradition luxembourgeoise que Joseph Bech, par exemple, aurait eu une préférence pour s'exprimer en luxembourgeois. Joseph Bech n'a même jamais parlé luxembourgeois à la Chambre. Sans parler qu’il aurait suggéré que le luxembourgeois soit imposé comme langue officielle de l’Union européenne."
Tout comme Charel Goerens, le député européen socialiste Marc Angel, souligne qu'il est possible de parler beaucoup en luxembourgeois au niveau européen. Tout citoyen a la possibilité de contacter par écrit en luxembourgeois les institutions européennes et il lui sera répondu dans cette langue. Son propre bureau peut être contacté en luxembourgeois, contrairement à celui de Fernand Kartheiser, selon Marc Angel.
"Ce dernier a deux assistants et aucun n'est Luxembourgeois. Pour moi, c'est un numéro qu'il voulait faire. C'est du populisme. Je tiens beaucoup à la langue luxembourgeoise. Moi, tout comme le dernier gouvernement et aussi ce gouvernement, nous faisons de la politique pour notre langue, que nous aimons, mais nous ne faisons pas de politique avec la langue. Mais cela, c’est de la politique faite avec la langue. C’est ce que fait l’extrême droite, c’est ce que font les populistes, je ne fais pas ça."
Outre Marc Angel, les trois autres eurodéputés luxembourgeois interrogés par RTL, affirment aussi leur attachement à la langue luxembourgeoise. Ils insistent également sur le fait que le Parlement ne compte que six représentants luxembourgeois. Tilly Metz, eurodéputée verte, calcule ce qu'il en coûterait si la demande de Fernand Kartheiser était menée à bien:
"Si le luxembourgeois était considéré comme toutes les autres langues en Europe, cela coûterait 40 millions d’euros par an, si c'était mis en œuvre de manière cohérente. Alors, je me dis que l'argent, dans une période de crises multiples comme celle que nous connaissons, cet argent pourrait être mieux investi ailleurs, étant donné que nous avons trois langues qui sont utilisées au Luxembourg."
Charel Goerens notamment souligne combien c'est un grand privilège de pouvoir parler autant de langues qu'on le peut en tant que Luxembourgeois. Ce qui pourrait être fait pour une meilleure reconnaissance de la langue luxembourgeoise, estime le député européen DP, serait par exemple de traduire les traités en luxembourgeois.