
© Maxime Gonzales/ RTL Luxembourg
Des biens sous bail emphytéotique vendus sur le marché privé, pour des prix bien plus élevés que lors de leur construction, on en voit de plus en plus au Luxembourg.
Des logements abordables qui finissent sur le marché privé, ce n'est plus une surprise pour personne. Les particuliers les vendent en indiquant que le bien est sous bail emphytéotique. Cela signifie que seul le logement est vendu, le terrain reste la propriété de la commune ou des promoteurs publics comme la SNHBM ou le Fonds du Logement.
S'il n'est aujourd'hui plus possible d'acheter de l'abordable pour le revendre sur le marché privé, c'est parce que la réglementation a changé ces dernières années. Auparavant, les acquéreurs pouvaient vendre le bien librement après 12 années d'occupation. L'occasion pour certains propriétaires de gagner beaucoup d'argent.
Prenons l'exemple d'un appartement en vente dans la capitale luxembourgeoise, au Weimerskirch. On peut confirmer via le cadastre que le terrain sur lequel repose le bien appartient à la Ville de Luxembourg. Le logement de 100 m2 est pourtant à vendre sur un portail immobilier luxembourgeois pour la modique somme de 850.000 euros.
Le prix au mètre carré est donc de 8.500 euros. C'est inférieur à la moyenne du quartier et pour une bonne raison: le bien est vendu sous bail d'emphytéose. Patrick Goldschmidt, échevin de la Ville de Luxembourg, nous confirme que lors de sa construction, en 2012, l'appartement avait été vendu à 4.700 euros le m2.
C'est un "gros problème"
Douze ans plus tard, le ou la propriétaire va donc empocher 380.000 euros pour la vente de cet appartement à Weimerskirch. La Ville de Luxembourg conserve son droit d'emphytéose, ce qui est indiqué dans l'annonce mais ce logement ne peut plus être considéré comme abordable.
"Nous estimons qu’une grosse partie des logements construits et vendus entre 1979 et 2013 sont susceptibles d’être revendus sur le marché privé, de part la loi appliquée avant 2013", nous a confirmé le Fonds du Logement dans une réponse écrite.
La fuite de logements abordables vers le marché privé doit être considéré comme un "gros problème" considère le directeur du Fonds du Logement, Jacques Vandivinit. C'est précisément parce que le pays se confrontait à des cas de figure pareils que la réglementation a été modifiée.
"On a appris avec le temps", a admis Patrick Goldschmidt. Les contrats récents ne permettent plus aux propriétaires de vendre leur bien sur le marché privé. Les communes ou les promoteurs publics ont désormais un droit de préemption sur la totalité de la durée du contrat (99 ans).
Concrètement, cela signifie que les promoteurs publics rachètent forcément le bien lorsque le propriétaire le met en vente. Une manière de s'assurer qu'il restera dans le parc de logements abordables du pays. Ce changement a été "un pas important" estime M. Vandivinit qui tient à ce que l'offre de logement sociaux se maintienne au Luxembourg.
Le reportage en langue luxembourgeoise: