Les deux députés du Parti pirate se reprochent mutuellement d'avoir poussé à bout des membres et des collaborateurs du parti.

Le 15 juillet 2024 a été une journée noire pour le Parti pirate luxembourgeois. Ce jour-là, le troisième député pirate récemment élu à la Chambre, Ben Polidori, annonçait qu'il quittait le parti. Le parlementaire se justifiait en évoquant des "raisons liées à la vie de la sensibilité, comme à l'évolution récente vécue au sein de la sensibilité politique Piraten". À ce sujet il expliquait encore qu'"il y a eu des divergences concernant la gestion interne, comme la méthode de prise de décisions". Ensuite, au lieu que Sven Clement et Marc Goergen se serrent les coudes, comme on aurait pu s'y attendre, il y a eu des accusations. Surtout de la part de Marc Goergen envers Sven Clement.

Dans différents journaux, il a déclaré que Ben Polidori était parti principalement parce qu'il avait des problèmes avec Sven Clement et avec sa gestion du dossier de l'application de traduction MALT. Le 19 juillet, Marc Goergen était l'invité de la rédaction de RTL Radio. Il a alors affirmé que l'une des porte-parole du parti, Rebecca Lau, était depuis longtemps en arrêt maladie car elle ne s'entendait plus avec Sven Clement. Il ajoutait par ailleurs que la plupart des collaborateurs de la sensibilité politique souhaitaient travailler avec lui et non avec Sven Clément.

Des adversaires présumés coupés de l'accès aux informations 

Sven Clément s'est alors senti obligé de riposter. Lors d'une conférence de presse, il a reproché à Marc Goergen d'avoir créé un environnement de travail toxique et d'avoir poussé à bout psychiquement des gens. Il s'est aussi reproché d'avoir trop longtemps détourné le regard et de ne pas être intervenu plus tôt. Les deux députés pirates s'adressent donc des reproches plutôt similaires, mais qui dit la vérité?

Nos collègues de RTL ont discuté avec un certain nombre de personnes, des membres actuels du parti mais aussi des ex-membres. Il s'est avéré qu'à propos de harcèlement, seul le nom de Marc Goergen est cité. Une phrase revient sans cesse: "Pour Marc Goergen, le monde est soit blanc soit noir, on est pour lui ou contre lui." Et quand Marc Goergen a classé quelqu'un comme adversaire, la méthode serait toujours la même. Il n'en vient pas à une confrontation directe, mais l'autre est peu à peu coupé de l'accès aux informations. Des ex-collaborateurs racontent qu'il s'agissait d'informations dont ils avaient besoin pour leur travail. Si ensuite le travail n'était pas fait comme attendu, ils étaient critiqués. Quant aux membres du parti, ils racontent que lors des élections communales, ils ont été sabotés en étant parfois exclus des discussions de groupe. Par ailleurs, ils n'auraient pas toujours reçu toutes les affiches qu'ils avaient commandées. Marc Goergen aurait alors indiqué aux sections concernées que les affiches n'avaient pas été commandées. Ce reproche est notamment émis par la conseillère communale de Luxembourg-Ville, Marie-Marthe Muller.

Des pressions exercées pour soutenir Marc Goergen?

Il est frappant que la section de Pétange, où habite Marc Goergen, qui est coordinateur du parti, s'en sort mieux que les autres. Dans la circonscription Sud, Esch-sur-Alzette et Differdange et leurs conseillers communaux respectifs, Tammy Broers et Morgan Engel, seraient exclus. C'est pourquoi un membre du parti s'étonne que le nom de Morgan Engel, conseillère communale de Differdange, figure au bas du communiqué, dans lequel plusieurs conseillers communaux apportent leur soutien à Marc Goergen et le défendent contre les accusations de harcèlement, entre autres. RTL dispose d'informations dans lesquelles Morgan Engel nie avoir signé ce communiqué. Il y figure aussi qu'elle se sent exclue par les autres membres du parti et qu'elle serait de toute manière toujours le mouton noir. Interrogée, elle nie cependant avoir été harcelée par Marc Goergen. Elle l'aurait été par d'autres personnes, qui ont quitté le parti depuis.

Au total, neuf conseillers communaux ont signé la lettre. Des pressions auraient été exercées pour que plus de personnes la signent. Parfois elles auraient été menacées d'être exclues du parti si elles refusaient. C'est en tout cas ce qu'affirme Tammy Broers. Après avoir décidé de rester neutre, elle a reçu un message de Marc Goergen, dans lequel il lui écrit "tu sais déjà que Sven veut se débarrasser de toi?" Tammy Broers ajoute encore que Marc Goergen aurait été agacé par son élection au conseil communal d'Esch. C'est pourquoi dès le départ, elle n'aurait reçu aucun soutien et elle aurait même parfois été délibérément mal informée.

Marc Goergen réplique

En ce qui concerne l'accusation de couper l'accès à l'information, Marc Goergen ne peut pas se souvenir que ce fut le cas pour des salariés. Il y aurait eu une seule décision de la sorte et selon le souhait des personnes concernées. Pour ce qui est des membres, il n'aurait pas un aperçu de toutes les discussions de groupes du parti.

A propos des accusations venues d'Esch, Marc Goergen indique que le parti a proposé son aide à Tammy Broers, mais qu'elle ne l'a pas acceptée. En outre, il ne serait pas possible d'aider en permanence de l'extérieur un conseiller communal, l'engagement doit aussi venir de l'autre côté. Pour ce qui concerne la campagne des élections communales dans la capitale, la section locale aurait souhaité mener une campagne électorale indépendante et a néanmoins reçu toutes les affiches demandées. Il ignore ce qu'il en est advenu après leur livraison à Luxembourg-ville. Marc Goergen réfute aussi le reproche selon lequel il aurait contribué à une mauvaise ambiance parmi les candidats en attirant certains d'entre eux dans le Sud. Les gens auraient été frustrés par le comportement des têtes de liste, Marie-Marthe Muller et Pascal Clément, et se seraient adressés pour ce motif à la direction nationale du parti. Ce que confirme, au moins en partie, le porte-parole de la section Luxembourg-ville du parti, Steve Fuchs.

De manière générale, Marc Goergen estime qu'on ne peut pas parler de harcèlement à propos de ces griefs. Starsky Flor, un autre porte-parole du parti est sur la même ligne. Il y a déjà eu de telles accusations à l'encontre de Marc Goergen par le passé. Mais elles émanaient souvent de personnes qui n'avaient pas obtenu de bons résultats aux élections. Il laisse sous-entendre, au moins indirectement, que les reproches pourraient être une réplique du tac au tac.