L'utilisation des téléphones est désormais interdite dans l'enceinte de l'Ecole européenne du Kirchberg. Le directeur, Martin Wedell, et la directrice adjointe de l'établissement, Caroll Lemarié, nous expliquent comment tout cela va se goupiller.

L'Ecole européenne du Kirchberg a pris une décision forte pour la rentrée 2024-2025: interdire l'usage du téléphone/smartphone dans l'enceinte de l'établissement. C'est une décision qui déplaira forcément à de nombreux élèves mais qui contente les parents parfois désarmés face à la dépendance de leurs enfants aux écrans.

Attention cependant, les règles ne sont pas les mêmes pour les jeunes étudiants (1ère à 3ème secondaire) et les plus âgés (4ème à 7ème). Caroll Lemarié, directrice adjointe de l'école secondaire, nous explique ces distinctions: "Les plus jeunes doivent laisser leur téléphone dans leur casier le matin et ne peuvent le récupérer qu'après les cours.

Elle précise qu'ils ne sont pas autorisés à garder l'appareil dans leur sac et que des sanctions sont prévues pour les écoliers qui ne respecteront pas les règles. "La première fois, on rappellera les règles mais ensuite, on a prévu un système (de sanctions) assez strict", prévient-elle.

Pour les étudiants de quatrième secondaire vers le haut (7e), les règles sont un peu différentes. Ils peuvent garder leur smartphone sur eux mais ne sont pas autorisés à l'utiliser dans l'enceinte de l'école. Ils peuvent néanmoins se rendre dans la cour de récréation ou dans la salle de détente pour consulter leur appareil.

"Renouer avec l'interaction sociale"

"L'idée ce n'est pas de diaboliser le téléphone mais il y a un temps pour tout", affirme la directrice adjointe. Dans ce contexte, elle rappelle les dangers d'une surexposition aux écrans. "Problèmes de concentration, isolation sociale, cyberharcèlement": c'est pour ces raisons qu'elle considère qu'il fallait agir.

Mme Lemarié admet qu'il y a également une volonté de "renouer avec l'interaction sociale". D'après elle, il n'y avait qu'à passer par les couloirs de l'école pour constater qu'il y avait un problème. "Les élèves étaient assis les uns à côté des autres mais n'échangeaient pas. Ils jouaient moins, communiquaient moins, ils passaient leur temps sur leur téléphone."

Elle insiste sur le fait que la décision n'a pas été prise à la légère. Un groupe de travail a été mis sur pied au début de l'année scolaire 2023-2024. Il comptait des représentants du corps enseignant, des parents d'élèves, des étudiants, des conseillers pédagogiques et même des psychologues.

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"Nous sommes arrivés à cette décision au bout d'un an de réunions, de conseils d'éducations et de sondages. Toutes les parties prenantes ont été consultées", assure-t-elle. "On a vraiment eu le soutien des parents. Les étudiants n'y étaient pas très favorables mais ils étaient conscients qu'il fallait faire quelque chose pour les jeunes". Des concessions ont d'ailleurs été faites.

"Les parents tenaient à ce que leurs enfants aient leur téléphone sur le chemin de l'école, ce qui est tout à fait compréhensible", raconte-t-elle.  C'est pour cela que les enfants sont autorisés à entrer dans l'école avec. Elle nous confirme également que les représentants des élèves se sont battus pour permettre aux plus âgés de conserver les privilèges cités ci-dessus.

Quant à un éventuel retour en arrière, le directeur de l'École européenne, Martin Wedel, affirme "que la direction globale ne changera pas". "Si quelque chose ne va pas, on pourra toujours adapter la politique. On se montrera flexible", nous a-t-il assuré. Il prévoit d'ailleurs un bilan, "une sorte d'évaluation" de ces nouvelles mesures à la fin de l'année scolaire 2024-2025.

Il est conscient qu'il s'agit là d'un grand changement et s'attend à des réticences. "Il y aura certainement des élèves qui ne comprendront pas le bienfondé de la décision. Les convaincre sera la tâche la plus difficile", nous a-t-il confié. Cela demandera des efforts de la part des professeurs mais aussi des parents. "Ça demande le soutien de toute la communauté scolaire. Il faudra qu'on soit cohérents."

Une rentrée particulière

Ce mardi les élèves étaient de retour à l'école pour leur journée d'orientation. Une journée qui leur a permis de découvrir les nouvelles restrictions liées aux téléphones. Certains étaient "déçus" alors que d'autres étaient "un peu perdus". "On va les accompagner", assure la directrice adjointe en évoquant diverses activités prévues pour leurs moments de détente.

"Ce matin, certains élèves étaient vraiment surpris, mais je crois qu’ils vont comprendre pourquoi, ils verront le bénéfice", estime-t-elle. Pour ceux qui ne sont pas d'accord, elle assure qu'il "y aura un échange" et "qu'ils seront écoutés". En attendant ces échanges, la directrice adjointe nous confirme cependant qu'il n'y aura pas de phase de transition.

Les nouvelles restrictions seront en vigueur dès ce mercredi matin. "Mon but c’est d’offrir la meilleure éducation possible, même si ça ne me rend pas très populaire. Je veux que cette politique soit respectée et elle le sera. Les élèves qui ne la respectent pas seront sanctionnés", a-t-elle insisté. Elle ne doute d'ailleurs pas que d'autres écoles suivront le pas dans les années à venir.

"C'est une vraie tendance dans les pays nordiques qui ont fait marche arrière sur tout ce qui est lié aux écrans", souligne-t-elle. Le directeur de l'Ecole européenne rappelle pour sa part que des pays tels que la Belgique et les Pays-Bas ont "pris des décisions dans ce sens là". "On est en bonne compagnie", a-t-il conclu.