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Les auto-écoles se mobilisent lundi contre le manque de places à l'examen du permis de conduire, qui oblige les élèves à attendre des mois, alors que des solutions existent, assurent les professionnels.
Les écoles de conduite traditionnelles sont appelées à faire grève et à se rassembler en voiture à la mi-journée place de la République à Paris.
"Le mouvement va être suivi", avait prédit mi-septembre le président de l'Unic, Benjamin Panis, prévoyant l'équivalent d'un défilé de "3.000 voitures" auto-écoles dans la capitale en 2019 contre une réforme du permis.
Les organisations professionnelles vont aussi demander à être reçues à Matignon, explique Patrick Mirouse, à la tête du réseau d'auto-écoles ECF et président de l'Unidec, l'un des syndicats à l'origine de la mobilisation.
Les auto-écoles en ligne ne feront pas grève mais soutiennent le mouvement, assure Edouard Rudolf, président de leur fédération, la Fenaa, et PDG d'En voiture Simone.
A Lyon, Enguerrand de Boissieu a attendu quatre mois cette année pour avoir une place, raconte-t-il à l'AFP. L'avocat de 30 ans avait besoin du permis pour raisons professionnelles et parce qu'il allait devenir papa.
Il faut être particulièrement patient dans les grandes villes et en Ile-de-France: jusqu'à huit mois d'attente - les écoles de conduite étant tributaires du nombre de places d'examen que la préfecture leur attribue.
Dans l'intervalle, Enguerrand de Boissieu a repris "une heure par-ci, par là" pour ne pas perdre la main, une heure de conduite étant facturée entre 50 et 60 euros en France.
Cette somme s'ajoute au coût initial de la formation: environ 1.800 euros dans une école traditionnelle et 1.100 euros en ligne, détaille Edouard Rudolf.
Mais certains élèves ne peuvent pas payer la rallonge et "prennent des risques" en attendant leur tour, souligne Christophe Saligot, moniteur indépendant dans les Hauts-de-Seine.
Ils conduisent illégalement avec leurs proches ou trouvent de faux moniteurs sur internet, dont certains n'ont même pas le permis, s'indigne le professionnel.
"Goulot d'étranglement"
Près des deux tiers (64%) des jeunes de 18 à 24 ans n'ayant pas le permis estiment qu'il est difficile d'obtenir un rendez-vous pour l'examen, selon un sondage OpinionWay réalisé pour En voiture Simone en septembre 2025.
Patrick Mirouse, qui dirige plusieurs auto-écoles dans le Sud-Ouest, dénonce un "goulot d'étranglement" au moment où les élèves sont prêts pour l'épreuve.
En cause: d'abord le manque d'inspecteurs. Ils sont moins de 1.500 en France pour près de 1,4 million d'élèves en 2023. Toutes les organisations d'auto-écoles réclament l'embauche de 150 à 200 fonctionnaires supplémentaires.
Quinze postes ont été créés en 2023, 38 en 2024, et 103 doivent l'être en 2025, selon le ministère de l'Intérieur.
Mais les effectifs n'ont pas suivi l'augmentation du nombre de candidats, due à la possibilité de passer le permis à 17 ans, depuis 2024, et à son financement par le compte formation (305.500 élèves inscrits avec le CPF en 2023, selon la Dares, la direction des statistiques du ministère du Travail).
Les auto-écoles interrogées évoquent aussi un examen très sélectif, avec un taux de réussite qui stagne juste au-dessus de 50%.
Les syndicats ont bien été reçus deux fois par le gouvernement ces derniers mois, mais "on laisse la situation traîner", selon le patron d'En voiture Simone.
Pourtant, les professionnels assurent qu'il existe des solutions. Certaines organisations d'auto-écoles demandent de passer de 20 à 28 heures de conduite exigibles avant l'examen, pour améliorer le taux de réussite.
La Fenaa propose un rattrapage, comme au baccalauréat, où les élèves ayant presque les points nécessaires décrocheraient leur permis après cinq heures de conduite supplémentaires, sans repasser l'épreuve.
Pour Patrick Mirouse, il faudrait permettre la conduite accompagnée dès 14 ans, au lieu de 16. Les élèves qui apprennent ainsi ont besoin de cinq à sept heures de formation en moins, explique-t-il, et leur taux de réussite est meilleur (environ 77%).
Christophe Saligot rappelle, lui, que l'examen avait été temporairement allégé de certaines questions théoriques après le Covid, pour rattraper le retard des confinements.